2008
Publication
# | Year | Text | Linked Data |
---|---|---|---|
1 | 1697 |
Bayle, Pierre. Dictionnaire historique et critique [ID D1772]. Virgile Pinot : Bayle semble avoir été attiré à l'étude de la Chine, moins par l'intérêt que présentait la chronologie chinoise que par le souci qu'il avait aux environs de 1685, soit immédiatement avant, soit aussitôt après la Révocation de l'Édit de Nantes, de combattre l'intolérance de Louis XIV. Or, la Chine vint lui offrir tout à point un exemple de tolérance, puisque selon la lettre du P. Verbiest, l'empereur de Chine se déclarait prêt à accepter les missionnaires dans son empire. Il écrivait dans ses Nouvelles de la République des Lettres [ID D20148] : "Je ne sçai pourquoi, les Chrétiens font si peu de réflexions sur l'esprit de tolérance qui règne dans ces Rois païens que nous traitons hautement de barbares et de féroces. Voilà un empereur chinois très persuadé que la Religion des Jésuites est fausse et tout à fait opposée à celle dont lui et tous ses sujets font profession, qui ne laisse pas de souffrir des missionnaires et de les traiter fort humainement". Le ton même de cette observation marque l'étonnement de Bayle, à constater que la tolérance est possible, puisqu'elle existe. Les mois qui suivent lui fournissent des faits qui vont lui permettre d'observer le contraire de la tolérance, à savoir l'intolérance : d'abord et surtout, c'est la Révocation de l'Édit de Nantes, avec les persécutions qu'elle provoque, conversions de force et Dragonnades, ensuite l'envoi de missionnaires jésuites en Chine. Ainsi Louis XIV semble se contredire, puisqu'il réclame de l'empereur de Chine pour ses missionnaires cette tolérance qu'il refuse à ses sujets. Louis XIV en obligeant par la force ses sujets à se convertir, et en introduisant ses missionnaires en Chine, ne fait qu'obéir au même principe qui est de conquérir les âmes. Faut-il donc conseiller à l'empereur de Chine d'accepter le papisme au nom de la tolérance ? Que non pas. Ce serait le meilleur moyen de la détruire. Un souverain tolérant, et précisément parce qu'il l'est, doit examiner les religions qui veulent pénétrer dans ses États, et se montrer intolérant des religions intolérantes, c'est le premier principe et la condition d'existence de la tolérance. Bayle part de ceci que le principe essentiel du papisme est une fausse interprétation du précepte chrétien Contrain-les d'entrer. Si la mission consistait à prouver rationnellement la supériorité de la religion que l'on apporte sur les religions existantes, rien n'empêcherait les Chinois de recevoir les missionnaires chrétiens. Au cours de cette longue argumentation, où Bayle considère la tolérance non comme une résultante de l'indifférence en matière de religion, mais comme une conséquence nécessaire du christianisme, il s'élève parfois à des généralités et il s'efforce de montrer que l'intolérance de l'intolérance, c’est-à-dire la nécessité de chasser les Chrétiens de son empire, est imposée à l'empereur de Chine par un principe de conscience "loi éternelle et antérieure à toutes les religions de droit positif". L'empereur ne doit donc pas hésiter à chasser ces missionnaires, pour éviter à ses peuples la tentation presque insurmontable de commettre le plus grand de tous les crimes", l'apostasie d'une religion qu'ils croient vraie. Mais, pense Bayle, cette croyance des Siamois ne provoque qu'une vertu mercenaire, puisque la notion pure de l'honnêteté n'en est pas le principe, de même d'ailleurs que la croyance en la Providence, sur laquelle elle a seulement l'avantage de n'être pas une duperie. Il est donc à croire que ce dogme de la rétribution des actes humains a été inventé seulement par les Lettrés siamois, qui, du moment qu'ils niaient la Providence, ont voulu la remplacer par autre chose, par utilité sociale, et pour contenir le peuple. Ils ont donc dû avoir - tout comme en Chine les sectateurs du dieu Fo - une double doctrine, l'une réservée aux philosophes et à leurs adeptes, mais qui reste secrète, l'autre faite pour le peuple, et qui se contente d'exposer quelques principes utiles à la société. Quant à la doctrine métaphysique des Lettrés chinois - Bayle ne dit pas siamois, bien que La Loubère soit toujours sa source - cette doctrine qui met un grand nombre d'âmes dans l'univers, distinctes les unes des autres, dont chacune existe par elle-même et agit par un principe intérieur et essentiel, il la croit plus acceptable que la théorie de l'éternité de la matière, qui doit nécessairement conduire à l'atomisme, car s'il peut y avoir deux êtres coéternels et indé pendans quant à l'existence, il y en peut avoir cent mille millions et à l'infini. En somme en 1697, avant le moment critique de la Querelle des Cérémonies chinoises, Bayle a peu connu la philosophie des Chinois : il ne connaît que la doctrine des Siamois d'après La Loubère, les hypothèses des disciples de Fo en Chine d'après un extrait de la préface du P. Couplet. Mais ces faits si peu nombreux et si fragmentaires qu'ils soient, l'avertissent qu'en Extrême-Orient il y a des doctrines matérialistes, donc des doctrines athées. Cependant Bayle s'intéressait aux rivalités entre Jésuites et Missionnaires, bien qu'il ne prît pas encore définitivement parti pour les uns ou pour les autres sur le fait des cultes chinois. En 1699, il écrit à Minutoli qu'il a lu le VIe volume de la Morale pratique, qui lui semble "plus curieux que les deux précédents ; car il traite du culte qu'on rend à Confucius à la Chine et des démélez que les Dominicains ont suscitez aux Jésuites, prétendans et soutenans par leurs subtilitez que ce culte n'est point de Religion mais civil, et en quelle manière on y peut participer sans idolâtrie". Cependant en 1701, son opinion semble se modifier, à cause de l'ouvrage de Hyde, où il trouve une confirmation des idées du P. Le Comte. Le Comte qui apportaient un argument si fort en faveur du consentement universel. Or Bayle, bien qu'il connaisse dès lors les principaux écrits des Jésuites, notamment ceux du P. Le Comte et du P. Le Gobien va se séparer de son correspondant et conclure à l'athéisme des Chinois, pour ruiner l'argument du consentement universel. Bayle qui a déjà signalé dans son Dictionnaire (1e édition, 1697) l'athéisme des Siamois et l'athéisme de la secte des Lettrés de la Chine (2e éd. du Dictionnaire, 1702) veut montrer en 1705 que l'athéisme en Chine n'est pas seulement une doctrine particulière à un petit groupe de philosophes, mais la théorie philosophique dominante. Sans doute parce qu'il ne se sent pas assez sûr de lui, n'ayant pas lu la préface du P. Couplet, qui d'ailleurs eût infirmé sa thèse au lieu de la vérifier, il jette allègrement par-dessus bord la question de l’athéisme ou du spiritualisme des disciples de Confucius : "Je ne vous dirai pas que Confucius qui a laissé d'excellens préceptes de morale était athée. Ceux qui l'affirment trouvent des contredisans ; je passe donc à des faits non contestés". Bayle trouve que la découverte de l'athéisme de ces peuples primitifs n'a qu'une importance secondaire, car ce sont des 'athées négatifs', tandis que l'exemple chinois a une importance capitale, car les Lettrés de la Chine sont des philosophes, qui ont comparé ensemble le système de l'existence de Dieu et le système opposé. Ce sont des 'athées positifs'. La Querelle des Cérémonies chinoises apporte donc à Bayle en 1706 un criterium qui lui permet de conclure à l'athéisme des Chinois. Bayle n'a fait une étude particulière de la philosophie ou de la religion des Chinois. Il n'a même pas lu le P. Couplet, et il s'est contenté d’un creterium tout extérieur pour conclure à l'athéisme. La Chine pour lui n'a été qu'un exemple, un argument dans le débat sur la valeur du consentement universel. Mais en établissant même de cette manière détournée l'athéisme des Chinois, alors que personne ne doutait d'autre part de leur grande valeur morale, il a montré qu'il n'y avait pas antinomie entre l'athéisme et la morale, d’où il résultait, par une conséquence toute naturelle, que la morale est indépendante de la religion. Willy Richard Berger : Einer der ersten, der in die theologische Diskussion über die chinesische Kultur eingriff war Bayle. Äusserer Anlass waren Hugenotten-Verfolgung und der Widerruf des Ediktes von Nantes. Die Freiheit, von welcher Louis XIV. wie selbstverständlich voraussetzte, dass sie in China seinen Missionaren gewährt werde, verweigerte er im eingenen Land seinen Untertanen, und jenes 'Compelle intrare', das Wort, das dazu dienen musste, die Verfolgungen, Zwangsbekehrungen und Dragonnaden zur rechtfertigen, denen sich die Hugenotten ausgesetzt sahen, war für Bayle das Losungswort der Intoleranz schlechthin, das Synonym für den inhumanen Absolutheitsanspruch des Katholizismus, dem er die chinesische Duldsamkeit als leuchtendes Gegenbeispiel entgegenhielt. Zum ersten Mal ist China nicht mehr bloss das Land, das zwar über eine staunenswerte materielle und geistige Kultur verfügt, das aber – da leider heidnisch geblieben – bekehrt werden muss ; es ist vielmehr ein Land, das den Europäern als Tugendexempel dienen kann und aus welchem sogar, da die religiöse Toleranz alles, nur nicht die Intoleranz dulden darf, das Christentum eigentlich ausgewiesen werden müsste. Bayles utopische 'Republik der Ideen', in der Wahrheit und Vernunft, Gerechtigkeit und gesunder Menschenverstand, Toleranz und natürliche Moral zu Hause sein sollten, hat gewiss von dem hypostasierten chinesischen Idealreich einiges an bekräftigender Kontur übernommen. Es handelt sich auch beim China der religiösen Toleranz um ein typisch europäisches Gedankenkonstrukt. Man hat die Missionierungsarbeit geduldet, und das 1692 von Kaiser Kangxi verkündete Toleranzedikt stellt einen bemerkenswerten Kontrapunkt zum Edikt von Fontainebleau dar und bestätigt Bayles Argumentation nachdrücklich. Nach dieser durch die aktuelle religionspolitische Situation in Frankreich motivierten Inanspruchnahme des Topos vom 'Chinois philosophe' als einer Waffe im geistigen Kampf spielt der Ferne Osten für viele Jahre in Bayles Schriften keine Rolle mehr. Im Dictionnaire historique et critique geht es wieder um ein ursprünglich theologisches Problem, um die Frage, ob es eine überall auf der Welt gültige Übereinkunft (consentement universel) im Hinblick auf die Existenz eines göttlichen Wesens gebe oder nicht. Wie die Idee der Toleranz, so hat Bayle auch dieses zentrale Thema seines Werks, den Atheismus, mit der Figur des chinesischen Philosophen verbunden. Song Shun-ching : L'athéisme attribué à Bayle s'explique par son apologie de la tolérance et son exigence de la liberté du pensée. Voltaire et Bayle ne partagent pas la même conception au sujet de la religion. Pour Bayle, Confucius enseigne un athéisme supérieur à la croyance du peuple idolâtrique et superstitieux qui observe les préceptes religieux de bonzes débauchés et corrompus, et Bayle conclut que la civilisation chinoise est supérieure parce que le pays est gouverné par une classe de lettrés athées. Jacques Pereira : Bayle ne s'est intéressé à la Chine, après 1685, que parce que sur le rapport de Verbiest, Kangxi ouvrait son territoire à l'évangélisation des missionnaires. Cet élément lui semblait constituter un excellent exemple de tolérance religieuse dont il entendait se servir dans sa lutte contre la politique religieuse de Louis XIV. Avant 1700, Bayle est d'ailleurs moins préoccupé des Chinois que des Siamois dont il tire des informations de Tachard et da La Loubère. Sa perspective est plus axée sur la question du rapport entre la croyance en und Providence et la vie morale. C'est par la lecture de l'ouvrage Historia religionis de Thomas Hyde [ID D20205] que Bayle est amené à se recentrer sur la querelle chinoise. Il choisit de conclure à l'athéisme des lettrés chinois. En effet, l'exemple d'une société qui ignore l'existence de Dieu et qui, pourtant, a su se donner des préceptes d'une haute moralité était tout trouvé pour venir conforter sa double hypothèse : et que l'athéisme n'est pas incompatible avec la moralité et la sociabilité, et que la foi n'est pas une donnée innée que viendraient contrarier la perversité ou la corruption. Bayle va s'attacher à montrer, dès 1705, que ce ne sont pas quelques Lettrés qui sont athées mais que cette philosophie occupe une position dominante dans l'ensemble de la société chinoise. Pour cela il s'appuie sur Histoire de l'édit de l'empereur de la Chine de Le Gobien [ID D1780], qui affirme l'athéisme des Chinois, et qui ne saurait être soupçonné de complaisance pour son ordre puisque la Compagnie avait été condamnée pour avoir nié l'athéisme en Chine. Prudent sur le cas de Confucius, Bayle est plus affirmatif sur celui des néo-confucéen. Bayle qui ne se sera qu'incidemment intéressé à la question chinoise aura cependant, par le rayonnement de son oeuvre, influencé toute une génération intellectuelle sur ce problème sensible. |
|
2 | 1708.3 |
Malebranche, Nicolas. Entretien d'un philosophe chrétien et d'un philosophe chinois [ID D1799]. Sekundärliteratur Quellen : Artus de Lionne. Longobardo, Niccolò. Responsio brevis super controversias de Xamti [ID D1659]. Sainte-Marie, Antoine de. Traité sur quelques points importans de la mission de la Chine [ID D16444]. [Eventuelle Quelle]. Erwähnte Quellen : Testimony of several jesuits concerning the atheism of the Chinese. In : Note on the Conversation. Ricci, Matteo ; Trigault, Nicolas. De christiana expeditione apud sinas suscepta ab Societate Jesu [ID D1652]. Martini, Martino. De bello Tartarico historia [ID D1699]. Semedo, Alvaro. Relaçao da propagaçao da fé no regno da China [ID D1685]. Le Favre, Jacques. De sinensium ritibus politicis [ID D4595]. Le Comte, Louis. Nouveaux mémoires sur l'état de la Chine [ID D1771]. Virgile Pinot : Dans les Entretiens le philosophe chinois n'a pas le beau rôle et c'est lui qui doit être convaincu par les raisons du philosophe chrétien. Son Entretien est donc une sorte d'aide-mémoire métaphysique à l'égard des futurs Missionnaires en Chine, mais sous forme de dialogue pour qu'ils aient plus rapidement présentes à l'esprit les réponses à faire aux arguments ou aux objections des philosophes chinois. C'est en principe un traité d'apolégétique du christianisme d'après les idées métaphysiques de Malebranche. Malebranche fait exposer par le philosophe chinois certains principes de sa doctrine, pour avoir l'occasion de les réfuter, mais l'exposé de la philosophie chinoise n'est pas l'essentiel de son ouvrage ; ce qui lui importe avant tout c'est la démonstration de sa propre métaphysique. Sur la philosophie chinoise, il est peu renseigné ; il en connaît seulement certains principes qui lui ont été exposés par [Artus de Lionne] évêque de Rosalie ; il n'y a que deux genres d'êtres, le Ly, qui est la souveraine Raison, et la matière. Le Ly et la matière sont éternels. Le Ly ne subsiste point en lui-même et indépendamment de la matière, (les Chinois le considèrent sans doute comme une forme ou comme une qualité répandue dans la matière) le Ly n'est ni sage ni intelligent, quoiqu'il soit la sagesse et l'intelligence souveraines. Le Ly n'est point libre et n'agit que par la nécessité de sa nature. Il rend intelligentes, sages, justes, les portions de matière disposées à recevoir l'intelligence, la sagesse, la justice, car l'esprit de l'homme n'est que de la matière épurée ou disposée à être informée par le Ly et par là rendue intelligente ou capable de penser : "C’est apparemment pour cela qu'ils accordent que le Ly est la lumière qui éclaire tous les hommes et que c'est en lui que nous voyons toutes choses". Voilà un certain nombre d'erreurs et de paradoxes que Malebranche va essayer de réfuter dans son écrit. Malebranche l'estime être un athéisme ayant de grands rapports avec celui de Spinoza. Les Jésuites lui ayant en effet reproché de mettre l'athéisme au compte d'un philosophe chinois, il leur répond : "Ainsi puisqu'il n'y a pas un seul Chinois qui donne dans l'athéisme et qui sans blesser la vraisemblance puisse me servir d'interlocuteur pour réfuter l'impiété, il n'y a pour contenter la délicatesse de l'Auteur qu'à changer Chinois en Japonois ou Siamois ou plutôt en François ; car il convient que le Système de l'impie Spinoza fait icy de grands ravages ; et il me paroît qu'il y a beaucoup de rapport entre les impiétés de Spinoza et celles de notre philosophe chinois. Le changement de nom ne changeroit rien dans ce qui est essentiel à mon écrit." David E. Mungello : Malebranche did not have a compelling interest in China. Nevertheless, his concern with metaphysical demonstration of his faith drew him into the Chinese Rites Controversy, and he responded by composing, late in life, a hypothetical conversation between a Chinese philosopher and a Christian philosopher. He had little interest in China or Chinese philosophy until late in life. Artus de Lionne was not only the prime motivator of Malebranche's composition of the Conversation, he was also Malebranche's primary source of information on Chinese philosophy. The six points in Malebranche's summary are: 1st. That there are only two types of being to know-li (or supreme Reason, Order, Wisdom, Justice) and matter [ch'i]. 2nd. That li and matter are eternal beings. 3rd. That li does not subsist by itself and independently of matter. Apparently, they regard it as form or as a quality distributed in matter. 4th. That li is neither wise nor intelligent although it is supreme wisdom and intelligence. 5th. That li is not free and that it acts only by means of the necessity of its nature without knowing or wishing anything of what it makes. 6th. That it renders intelligent, wise, and just the portions of matter disposed to receive intelligence, wisdom, and justice. For according to the literati of whom I speak, the mind of man is only purified matter, or disposed to be informed by means of i/, and by it rendered intelligent or capable of thinking. This is apparently why they agree that the li is the light which illuminates all men and that it is in it that we see all things. Malebranche's reference in the first point to supreme Reason, Order, Wisdom, and Justice as synonyms for ii implies a possible allusion to the four cardinal virtues of Confucianism. They are jen (Benevolence or Goodness), ii (Propriety or Ritual Order), chih (Wis-dom) and i (Righteousness or Justice). The four cardinal virtues were very prominent in the school of Chinese philosophy transmitted to Malebranche. While he consistently transliterates ii, Malebranche refers to ch'i only in translated form as "matter." But speaking more precisely, ch'i means "matter-energy" or "material force." As used by the School of li, li means principle in the sense of an organizing element. Li is sometimes referred to as "infrastructure," in contrast to "superstructure" in order to highlight the contrast between inner organization versus surface manifestation. There are very strong organic connotations in li, as there are in many elements in Neo-Confucianism. With reference to Malebranche's second point, it is misleading to say that ch'i (material force) is eternal. Ch'i is permanently present in the world but is in constant flux. On the third point, it is oversimplified to say that li cannot exist independently of matter. In one sense this is true, but there are two aspects to the relationship between li and ch'i. In the chronological dimension li is co-temporal with ch'i and cannot exist apart from ch'i, but in a second dimension li has a logical priority over ch'i. The fourth point presents a superficial conception of li. While it is true that li is not regarded as wise or intelligent, the philosophy of Chu Hsi regards li as but one of three manifestations of Heaven. Chu Hsi states that in the Chinese classics, Heaven (t'ien) "... sometimes designates the blue sky (ts'angts'ang), sometimes it signifies the sovereign lord (chu-tsai) and sometimes it denotes principle (li) alone." Chu Hsi also states "Heaven is principle (li) but the blue sky is also Heaven, and the sovereign lord (chu-tsai) above is also Heaven." The criticism applied to the fourth point also applies to the fifth point. To say that ii is neither conscious nor wills anything of its creation is, in one sense, accurate. Chu Hsi himself says something similar. However, to refer to li as neither conscious nor willful in the way that Malebranche does is meaningless if one realizes that Chu Hsi used li to designate specifically that part of Heaven which is neither conscious nor willful. Malebranche overextends this one as-pect because he fails to realize that there is another dimension of Heaven which Chu Hsi designated as chu-tsai (sovereign worker) and which is conscious and wills things. In the sixth point, to say that the mind consists only of purified matter is to overemphasize the material aspect in the School of li Neo-Confucianism. In the context of insular Eurocentrism, Malebranche may have been motivated to write the Conversation more because he recog-nized signs of the Spinozistic enemy in Chinese philosophy than be-cause of any great interest in China. In his letter of June 1713 to Fenelon, Malebranche complains that his composition of the Conversation was not based on any desire to participate in the Chinese Rites Controversy and in the debate between the Jesuits and the Society of Foreign Missions, but simply to satisfy the repeated requests of De Lionne. Malebranche states that he had permitted the Conversation to be published because he believed he could use it to make clear that he had written not against the Jesuits but against Spinozists in disguise. For the defenders of the faith, the Chinese Rites Controversy was important only as it related to their battles with Benedict Spinoz and certain followers of Descartes who carried Cartesian principles in freethinking directions. Spinoza, in particular, was regarded as a deadly enemy of the Christian faith. Malebranche probably wrote the Conversation in 1707 and con-sented, with some reluctance, to its publication in February, 1708. He is said to have been shocked and completely unprepared for the intensity of the response. The first published reaction came in a critical review in the July 1708 issue of the prominent Jesuit journal, Memoires de Trevoux pour servir a l'histoire des sciences et des beaux-arts. The review was unsigned but later identified as the work of Louis Marquet, S.J. (ca. 1650-1725), a professor of theology at Paris. Malebranche responded with a point-by-point rebuttal published in August 1708 as Avis touchant l'Entretien d'un Philosophe chretien avec un philosophe chinois (referred to herein as Note on the Conversation). The second response from the Memoires de Trevoux (December 1708) was less critical of Malebranche than the first response and, in fact, criticized the unnamed author of the first response (i.e. Marquet). There were further countercharges of Spinozism and atheism against Malebranche by the Jesuits Jean Hardouin (1646-1729) and Joseph Rene Tournemine, both of whom were closely associated with the Memoires de Trevoux. Nevertheless, the Christian responds to the Chinese's skepticism about the existence of infinity with the first of his proofs for the existence of God. It consists of a variation of the ontological argument, which happens to be the principal argument in Malebranche's philosophy for the proof of God's existence. The ontological argument originated with Anselm of Canterbury and was used by Descartes whose version of it was adapted by Malebranche. In Malebranche's formulation of this argument, the idea of a mere finite thing does not imply its exis-tence because finite things have ideas to represent them, i.e., the thing is separate from the idea. Malebranche adopts Descartes' separation of mind and extension. There is no interaction between thought and extension, except through God who contains the idea of extension which our minds perceive. Malebranche's philosophy, we can better understand the Christian philosopher of the Conversation when he says ". .. one cannot perceive all things in ii if it does not eminently contain all beings. If the ii is not the infinitely perfect Being, who is the God whom we adore?" Malebranche makes it quite clear that to be regarded as the equivalent of the Christian God, ii must be infinite in the extent of its being. After the Chinese philosopher has accepted the notion of infinity, he still expresses considerable difficulty with the abstractness of the Christian philosopher's argument. In response to the former's request for a demonstration of God's existence as a particular being, the Christian philosopher responds that a particular God is too limited and would contradict God's infinite nature. After the Chinese philosopher has accepted the notion of infinity, he still expresses considerable difficulty with the abstractness of the Christian philosopher's argument. In response to the former's request for a demonstration of God's existence as a particular being, the Christian philosopher responds that a particular God is too limited and would contradict God's infinite nature this interpretive extension. In Malebranchian philosophy, truth consists of the correspondences between our ideas and the truth. understanding of such correspondences by himself, but needs God as the source of his illumination. We see eternal truths in God indirectly by means of ideas which correspond to these truths. Malebranche concludes that ii can be supreme truth only because, being infinitely perfect, it contains in the simplicity of its essence, the ideas of all the things that it has created and that it can create. This, of course, represents a projection of Malebranche's def-inition of God onto the Chinese ii. We should not be surprised to find that ii fails to satisfy some of these criteria. Malebranche resolves the deficiency of ii being unable to subsist without matter when he claims that while the arrangements of matter may change and perish, ii itself is eternal and immutable; thus, the Chinese philosopher is able to conclude that ii really would subsist by itself. Malebranche resolves the deficiency of ii being unable to subsist without matter when he claims that while the arrangements of matter may change and perish, ii itself is eternal and immutable; thus, the Chinese philosopher is able to conclude that ii really would subsist by itself. The second deficiency proves to be more difficult to resolve, and an interesting debate ensues over whether ii manifests Wisdom and Justice as abstract qualities or whether ii is consciously wise and just. The Christian argues that ii should manifest both, whereas the Chinese, perhaps reflecting less of a tendency toward anthropomorphizing divine forces, argues that ii is Wisdom and Justice but not wise and just because the abstract qualities of Wisdom and Justice are greater than their human manifestation. Put somewhat differently, the Chinese argues that forms and qualities are different from subjects. This debate draws out further differences between the Christian and the Chinese on the power of their conceptions of deity. The Christian stresses that God as infinitely perfect being acts of his own volition and draws consequences from himself alone, that is, his power is unlimited. In contrast, the Chinese philosopher tends to see certain limitations on the power of li. It is interesting to note that Leibniz saw similarities between the Chinese limits on the power ofli and his own monadically-based limitations on God's power to intervene actively in the world. The remainder of the Conversation attempts to bring God and ii closer together. Malebranche has the Christian distinguish between material (i.e., finite) space and infinite space. To be equivalent to God, ii would have to contain infinite space. More specifically, ii would have to contain-Malebranche implies that the Chinese concedes it does-all the objects of our understanding as infinitely perfect and maintain a correspondence between the perfect simplicity of its essence and the reality of all finite beings. John Ho : Malebranche war nie in China und äussert sich von seiner christlichen Philosophie aus. Seine Abhandlung ist eine christliche Apologie gegen die chinesische Metaphysik. Das Prinzip li kann niemals dem Gott der christlichen Offenbarung verwandt sein, weil Gott ein absolutes Wesen ohne Anfang und Ende ist. Aber das li der Chinesen ist aus dem Nichts hervorgegangen und ist niemals die Vollkommenheit und Unendlichkeit selber. Li ist Materie und kann nicht aus sich selber existieren. Vielmehr erhält sie im Licht unserer Erkenntnis erst ihr Sein. Die Materie existiert, weil unsere Erkenntniskraft sie in Dienst nimmt. Lee Eun-jeung : Malebranche nimmt im Ritenstreit Partei gegen die Jesuiten und stellt seine Auseinandersetzung mit dem Konfuzianismus in Form eines Dialogs dar. Anstelle von Sokrates lässt er einen christlichen Philosophen als Gesprächspartner auftreten, der die theologische Waffe seiner Religion gegen den heidnischen Widerpart kraftvoll ins Felde führt. Am Schluss muss sich die chinesischen Philosophie gegenüber der europäischen geschlagen geben. Jacques Pereira : La forme dialoguée s'explique par une visée didactique qui rend peut-être comte du fait qu'il ne brille pas par son équité intellectuelle à l'endroit de la pensée chinoise. Peu renseigné, et de manière tendancieuse, par l'évêque de Rosalie qui avait eu à se plaindre de l'accueil des missionnaires jésuites là-bas, Malebranche, à la vérité, se soucie assez peu de l'exactitude de la pensée chinoise et la conception qu'il s'en fait est en réalité asservie à ses propres finalités polémiques ; comme il a plus en tête de combattre les systèmes métaphysiques européens déviants tels que l'athéisme ou le spinozisme, sa lecture de la philosophie chinoise va très nettement être tirée vers ceux-ci. C'est ainsi que par un réflexe philosophique strictement européen il va spontanément en comprendre les principes comme ceux d'un dualisme : deux principes éternels structurent la réalité, le 'Ly' et la matière ('K'y') ; cette dualité ne saurait cependant se ramener à l'antithèse Esprit / matière, dans la mesure où le 'Ly' n'est pas à proprement parler une substance. En d'autres termes, nous avons affaire à un dualisme bancal, hétérogène aux catégories logiques et métaphysiques élaborées par la philosophie antique reprises par la métaphysique chrétienne et, dans les aléas de la transposition, ce principe spirituel va devenir un être matériel d'une nature épurée qui vient se superposer exactement au schéma de la cosmologie matérialiste de l'Antiquité gréco-romaine. Ayant ravalé à son palier extrême le système métaphysique des lettrés chinois néo-confucéens, il a toute latitude pour en faire, au choix, un athéisme ou un spinozisme, ce qui dans son esprit, et celui de nombre de ses contemporains, n'est pas loin d'être la même chose. Malebranche se dégage de l'impasse dans laquelle s'enlisait la polémique du 'T'ien' ; mais ce faisant, lui qui n'est déjà guère versé dans la philologique et la philosophie chinoises, lorsqu'il finit, au terme de son parcours, par interroger le 'Ly' comme un synonyme recevable de ce dernier et l'examine en tant que représentation de Dieu, il ne fait que perpétuer un grossier abus de méthode, aux yeux de la philosophie occidentale elle-même, en rabattant und problématique métaphysique sur une problématique théologique. Malebranche trouva dans le traité de Longobardi une confirmation des opinions d'Artus de Lionne, et ne chercha pas plus loin. C'est que, comme le dit Etiemble avec une sévérité que nous ne pouvons qu'approuver, il ne tient pas pour essentiel de rendre justice à la pensée chinoise : sa première préoccupation étant de se disculper de l'accusation de spinozisme en le combattant, il n'aura pas fait autre chose que substituer dans son dialogue un spinozist au malheureux philosophe chinois. Willy Richard Berger : Malebranches christlicher Philosoph führt massiv die theologischen Waffen seiner Religion gegen den heidnischen Widerpart. Sein Dialog ist eine tehologisch tendenziöse, dezidiert antijesuitische Kampfschrift, in Form eines scholastischen Traktats über die wahre Gottesnatur, aber doch deutlich als vorbehaltlose Parteinahme im Ritenstreit erkennbar. Der Dialog verdankt sein Entstehen der freundschaftlichen Verbundenheit Malebranches mit Artus de Lionne, einem erklärten Jesuitenfeind. Dieser überzeugte Malebranche, dass allein seine Philosophie imstande wären, den Chinesen und ihren jesuitischen Fürsprechern die singulare Wahrheit und Überlegenheit der einen katholischen Lehre begreiflich zu machen. In der aufgeladenen Athmosphäre der Ritendiskussion fand die Schrift starke und unmittelbare Resonanz. Gleich nach dem Erscheinen erschien eine projesuitische Erwiderung : Mémoires de Trévoux (1708), die wiederum Malebranche zu einer unmittelbaren Entgegnung veranlasste : Avis touchant l'entretien (1708). Malebranche versucht sich am Vergleich zwischen der Idee des Li bei Zhu Xi und dem christlichen Gottesbegriff. Doch beschränkt sich die Parallele auf ganz äusserliche Gemeinsamkeit. Malebranches Schrift ist nicht nur eine Apologie orthodoxer katholischer Glaubensfrömmigkeit im Gewand eines cartesianischen Traktats, sondern zugleich eine Refutation des Spinozismus in der Verkleidung einer vergleichenden Auslegung eines chinesischen Philosophen. André Robinet : On peut dire que l'Entretien est une pièce de combat adaptée à une quadruple finalité : 1. prendre parti dans la lutte qui oppose la quasi-totalité du monde chrétien des Jésuites et qui se manifeste ici très particulièrement par le refus d'abaisser la vérité de la religion au profit d'un opportunisme de conquête : mission, oui, mais sans démission ; 2. reprendre une nouvelle fois, en les précisant, les points philosophiques élaborés aux dépens d'Arnauld, en réponse aux oeuvres publiées après la mort de cet adversaire et en annonce du Recueil massif qui se prépare ; 3. profiter de l'aspect métaphqsique de la dispute pour recenser les griefs contre Spinoza : dans cet Entretien, le tacite est peut-être 'l'essentiel', et le tacite, c'est l'ombre des Spizoza ; d'ailleurs les lettres au spinoziste Mairan s'appuieront sur cet Entretien ; 4. donner au malebranchisme missionnaire et militant sa chance dans le contact des idées qui s'instaure entre l'Orient et l'Occident. |
|
3 | 1731 |
Silhouette, Etienne de. Idée générale du gouvernement et de la morale des Chinois [ID D20047]. Hermann Harder : La brochure assez insignifiante et un peu scolaire est visiblement inspirée par les Jésuites sinophiles. La Chine y est préentée comme 'le pays le plus poli de l'Asie'. Elle s'appuie depuis toujours sur la morale et la sagesse de Confucius et ses principes de base sont la 'vertu, l'amour et la modération'. Si l'empereur règne en despote, son despotisme est limité par les 'cours souveraines' et par les lois qu'il 'ne peut violer sans donner quelque atteinte à son autorié'. Etiemble : Silhouette pensait que le gouvernement de la Chine se recommande à l'admiration de l'Occident par la théorie non point tant paternaliste que paternelle du pouvoir suprême : le prince est véritablement le père de ses enfants et de ses sujets, ou du moins il doit l'être. Jacques Pereira : Le texte reprend l'essentiel des thèses de Louis Le Comte censurées par la Sorbonne et s'attache à montrer, que la Chine confucéenne est une monarchie 'despotique' dotée de tous les éléments de pondération et de justice sociales qui manquent tellement à la France de Louis XV. |
|
4 | 1734-1738 |
Montesquieu, Charles de Secondat de. Quelques remarques sur la Chine [ID D20162]. Montesquieu schreibt : "P. Couplet ne veut pas que l'on puisse révoquer en doute l'histoire des tems qui ont suivi Yao, à cause de l'exactitude avec laquelle les événements sont rapportés à leur date et les années disposées par les cycles de soixante ans, en sorte que l'on a une histoire suivie de 4073 ans depuis le règne d'Yao jusqu'à la présente année 1713." "Ces lettres sont pleines de faits très curieux il faut qu'ils disent la vérité lorsqu'ils n'ont pas d'intérêt de la cacher pour être crus lorsqu'ils veulent mentir." "Ces lttres sont très curieuses ce sont des gens qui restent plus long temps dans le pays que les faiseurs de relations ordinaires." "Après le plan du temple du ciel et le temple de la terre ou vomme il dit du Seigneur de la terre il y a des massifs dédiés aux genies tutelaires des montagnes des rivierres [sic] que gagnent donc les jesuites à prouver que les Chinois ne sont pas athées puisqu'ils sont manifestement idolâtres." "A mesure que le christianisme se dépouillait des superstititons juives, il se chargeait des païennes, de la même manière que les liqueurs perdent l'odeur qu'elles avaient conractées dans le vase où elles ne sont plus, pour prendre celles du vase où elles sont. Si la religion s'établit jamais à la Chine, la religion chrétienne orientale sera bien différente de l'occidentale." "Toutes les religions introduites à la Chine ne sont point reçues comme religions nouvelles, mais comme suppléments à l'ancienne : Confucius, en laissant le culte des Esprits, a laissé une porte ouverte à ces suppléments." "Inconvénients arrivés à la Chine par l'introduction des sectes de Foë et de Lao-chium : les guerres et les exécutions sanglantes qui en naquirent. Un empereur de la Chine fut obligé de faire mourir à la fois cent mille bonzes. Le peuple chinois vivait sous une morale, la plus parfaite et la plus pratique qu'aucun peuple qu'il y eût dans cette partie de la Terre. On l'alla entêter, lui et ses empereurs, des illusions d'un quiétisme et d'une méempsycose qui défendait de faire mourir jusqu'aux criminels mêmes et faisait consister tous les devoirs de la morale à nourrir des bonzes." Louis Desgraves : Les Quelques remarques sur la Chine sont suivies de notes sur la Chine et les Indes prises par Montesquieu dans les ouvrages de Philippe Couplet et Athanasius Kircher. Montesquieu a lu attentivement l'oeuvre de Philippe Couplet écrite dans un latin difficile ; il en donne l'essentiel et intervient par des remqrques personnelles pour marquer son désaccord avec la pensée de l'auteur ou le manque de rigueur de son raisonnement. Jacques Pereira : Les jésuites ayant décidément mauvaise réputation, Montesquieu est sans doute enclin à penser qu'ils ont souvent 'intérêt à cacher la vérité'. Toujours est-il qu'il pécherait plutôt par excès de méfiance et qu'il rejette des données qu'il aurait été mieux insprié de retenir, d'autant qu'elles étaient assez fidèlement consignées dans les Geographica. Pourtant, il arrive de saluer le travail des missionnaires et de reconnaître exactement ce qui fait la qualité de leur information. Montesquieu semble s'être fixé pour tâche de rompre définitvement avec cette problématique biaisée de l'idolâtrie et de la superstititon pour des raisons qui sont à la foix de conviction, de prudence et de méthode. Sans perdre de vue qu'il tient compte du pluralisme religieux qui règne en Chine, il réserve à ce rite officiel qu'est le confucianisme. Montesquieu dit assez peu de choses sur Confucius qu'il intègre la plupart du temps dans le collectif 'les législateurs de la Chine' : son nom n'est cité qu'une fois dans L'esprit des lois, il ne lui consacre qu'une pensée et deux fragments du Spicilège. Il ne paraît pas s'attacher à la distinction entre confucianisme et néo-confucianisme, considérant que c'est dès ses origines, c'est-à-dire dans les textes canonique du maître lui-même, que s'affirment le dogme de la matérialité de l'âme et le refus de toute référence précise à la divinité. Il semble que Montesquieu a voulu mettre son ouvrage à l'abri de toute implication intempestive dans la querelle chinoise, jugeant sans doute qu'il ne valait pas la peine d'exposer le contenu politique et moral d'une entreprise, dont il sentait la richesse et la nouveauté, aux humeurs de disputeurs qui s'affrontaient sur une question ressortissant à un domaine religieux étroit, que l'esprit de sa démarche reléguait déjà sur les marges. La question qu'il se posait était de savoir comment la religion s'intègre dans le système politico-social chinois, et rien ne devait un tant soit peu le faire sortir de ce cadre de recherche, dans la fermeté duquel il engageait la cohérence de sa méthode. Aussi s'en tient-il prudemment à la thèse d'un matérialisme doctrinal et philosophique. Confucius est pour lui le chef d'une secte dont il n'a cessé de proclamer la supériorité morale. |
|
5 | 1748.3 |
Montesquieu, Charles de Secondat de. De l'esprit des loix [ID D1829]. Sekundärliteratur (2). 2008 Jacques Pereira : Par le fait, intellectuellement, Montesquieu était tout disposé à franchir le pas et à faire de la religion une institution essentiellement humaine qui trouve sa place dans une totalité normative caractéristique du génie national d'un peuple. Au coeur du débat entre libertins, déistes et apologistes, l'originalité de Mondesquieu est de vider le religieux de son contenu de croyance vécue pour n'en conserver que la forme, mais tout de la forme jusqu'au dernier prêtre et au moindre rituel pour mettre en évidence l'efficience de sa fonction politique qui ne dépend en rien, bien sûr, du fait que cette religion soit 'vraie' ou 'fausse'. La religiosité chinoise va lui offrir opportunément l'occasion de vérifier la prégnance de cette approche en fournissant l'exemple extrême d’une piété réduite à ce qu'il appelle les rites et dont le dogme, vidé de toute conscience de la transcendance, est 'dirigé' vers le corps social et ses exigences propres. Sur la question de la morale Montesquieu a encore des vues originales à faire valoir, et que ce sera à travers l'étude de celle des Chinois qu'il parviendra. Dans le domaine moral, tout en s'inscrivant dans le vaste mouvement de refondation laïque que le XIIIe siècle a conduit à partir d'une réflexion sur le droit naturel, l'origine du devoir et la notion de libre-arbitre, Montesquieu nous semble se singulariser par le fait qu'il entrevoit qu’une morale sans sujet ou plutôt dont les moeurs sont le sujet réel, est possible et pleinement valide. A plus d'un égard le discours que Montesqieu tient sur le despotisme chinois apparaît découplé du contexte de son propre discours sur la Chine et largement asservi à des exigences de cohérence interne propres à son système de classification tel qu'il l'élabore à travers L'esprit des lois. Sans aller jusqu'à dire que ce choix doctrinal de faire du gouvernement chinois un despotisme est inexplicable et contradictoire, il demeure qu l'on n’est pas moins surpris que certains de ses contemporains quand on voit tomber la sanction. Il est clair qu'au moment où Montesquieu s'occupe de la question chinoise, les positions se sont radicalisées : les témoignages des voyageurs et de missionnaires dissidents sont venus apporter la contradiction aux belles affirmations des jésuites qui font en Europe l'objet d’attaques de plus en plus violentes dont un des principaux mobiles est bien de discréditer dans ce dont ils tirent leur plus grande gloire. L'appareil mandarinal, par la qualité de son personnel (les lettrés) et par sa structure (des réseaux hiérarchiques qui aboutissent aux six tribunaux pékinois dont les pouvoirs sont interdépendants) semble suffisamment garantir le contrôle du pouvoir impérial. Montesquieu a tout de suite senti le danger que constitue aussi bien pour sa typologie politique que pour ses engagements idéologiques, un gouvernement aussi atypique. Renversant alors la pente naturelle de ses anylses, il va s'efforcer de montrer que cette belle harmonie sociale chinoise aux allures utopiques dissimule une forme particulièrement pernicieuse d'oppression despotique. Mais ce ne sera pas sans avoir assez d'honnêteté intellectuelle pour insister sur le fait que la Chine revient invariablement au despostisme plutôt qu'elle n'y demeure, sous la contrainte de forces qui la dépassent : climat et situation géographique, étendue du territoire, surpopulation endémique, poids de la tradition. Montesquieu note qu'il est remarquable que dans les Etats despotiques la religion borne naturellement le politique. C'est en Chine, pays conservateur s'il en est, et d'un despotisme déjà aménagé par la pression du facteur démographique. Il prend l'idée que 'l'objet' du gouvernement chinois est la 'tranquillité publique', en se fixant pour but de montrer que c'est an alliant étroitement le ritualisme et la constitution familiale du gouvenement qu'il y parvient. Il est en effet tout de suite apparu aux yeux des législateurs de la Chine, au premier rang desquels il faut bien sûr placer Confucius, que le meilleur moyen d'atteindre cet 'objet' de la politique chinoise était d’inculquer l'esprit de subordination. Le ritualisme chinois et confucéen reste aux yeux de Montesquieu fondamentalement idolâtre comme l'était à Rome la religion du peuple : les offrandes matérielles et notamment de nourriture, dans le culte des morts, étaient décrites avec suffisamment de détails par les missionnaires et les voyageurs pour dissiper tout doute à ce sujet. Lorsque Montesquieu aborde le problème de la religion en Chine, il prend en compte la multiplicité des croyances et distingue entre le confucianisme d'une part et le taoïsme et le bouddhisme de l'autre. A l'extrême opposé du confucianisme, nous trouvons donc deux formes de pensée religieuse : 'les Tao et les Foë', que Montesquieu n'est pas le seul à confondre dans un même opprobre quoiqu’elles soient fort différentes et que l’une soit d'origine indienne et l'autre typiquement chinoise ; et, à toutes deux, il semble imputer généreusement le dogme de la métempsycose. Montesquieu ne croit pas que le christianisme, qui devrait être la plus tolérante des religions, le soit effectivement, et s'il ne doute pas que les déboires qu'il a rencontrés à la Chine ne soient liés, précisément, à son esprit d'intolérance qui l'a rendu là-bas à peu près aussi insupportable qu'il l'avait été parmi les Romains, il n'est pas non plus disposé à admettre que la tolérance chinoise soit de la même nature exactement que celle que l'on a pu rencontrer dans l'antiquité gréco-latine. Le problème que se pose Montesquieu a toutes les apparences d'un paradoxe : il faut que la Chine soit intolérante pour d'autres raisons que le traitement qu'elle a infligé aux missionnaires chrétiens et à leurs néophytes, et qui aurait pu sembler le motif le plus évident aux yeux des Européens. Une première interprétation de la doctrine de Montesquieu montre qu'il admet le principe d'une plus grande tolérance de la nation tartaro-chinoise dans le domaine de la religion. Mais les troubles religieux existent tout de même à la Chine, les annales l'attestent, les bon Pères en font timidement état ; et la manière de les traiter n'est pas toujours des plus humaines. Montesquieu se préoccupe assez peu de reconstituter une morale proprement dite qui aurait un caractère raisonné et s'appuierait sur un corps de principes métaphysiques. Il connaît l'existence d'une école néo-confuciénne mais son intérêt pour les développements particuliers de l'histoire éthique de la Chine ne dépasse jamais l'ordre de l’anecedotique et de l'historique. Se refusant à inventer la doctrine de la sagesse chinoise à la place des Chinois qui ne s'en étaient guère souciés, il aura ce premier mérite de renoncer à trouver ce qui n'existe pas sous la forme où on l'attendait, sans pour autant cesser de chercher inlassablement à rendre raison de ce manque dans le langage d'une nouvelle rationalité. La morale chinoise, on s’entendait à considérer que son pragmatisme découlait naturellement de son découplage dogmatique : parce que la religiosité des Chinois était laïque, voir fondamentalement athée, la morale qui était tenue malgré tout de codifier l'ensemble des conduites socialisées ne pouvait être raccrochée qu'à l'expérience ou à l’exercice natural de la raison. Montesquieu, tout en donnant le sentiment de ne pas s'éloigner de la position la plus couramment adoptée par ses contemporains sur la question du non-dogmatisme de la morale chinoise, va en réalité s'attacher à rechercher dans son alayse les fondements d’un dogmatisme d'une autre façon. Montesquien tient la Chine pour un gouvernement despotique, contre l'avis des bons Pères qui en font presque unanimement une monarchie ; que les moeurs que l'on peut trouver dans un Etat despotique sont assez corrompues pour n'y pas jouer un rôle politique fondamental ; que les censeurs, qui ont à charge de surveiller la pureté des moeurs, constitutent, par le fait, une institution politique plus appropriée aux régimes pour lesquels la vertu est le principe même de gouvernement. Montesquieu rend comte, le plus objectivement possible, du poid qu'exerce le ritualisme sur la société chinoise et dont témoignent unanimement les relations missionnaires. Montesquieu montre que c'est par des voies comparables que Lycurgue et Confucius ont ouvré à modeler une espèce tout à fait prticulière de citoyen : l'un en forçant les usages par la loi, l'autre en donnant aux usages la force des lois. Les institutions chinoises ne sauraient être assimilées à celles d'un vulgaire despotisme à la turque ou à la persane : on y accorde trop de prix à la formation des esprits. Si Montesquieu s'attarde tant sur les modalités de l'éducation chinoise, c'est qu'il sent là, que nous sommes en présence d'un système éducatif qui n'est pervers que d'avoir atteint la perfection de sa logique d'intégration. Le secret de la longévité de cette société tient à ce qu'il n'y a rien d'extérieur à l'univers étique du Chinois. Il semble intellectuellement fasciné par la cohésion du ritualisme chinois dans lequil il voit la véritable assise du système politique impérial. Montesquieu explique que les législateurs de Chine eurent l'habileté de faire du dogme moral un article de foi et qu'ils sacralisèrent ce qui en climat chrétien relève du formalisme relationnel le plus extérieur. Dans la continuité des modalités de l'éducation chinoise, il s'opère une sorte de retournement par lequel le 'précepte' - qui, dans nos traditions, est source de l'action morale – trouve son ressort dans la mise en forme gestuelle et cérémonielle de sa propre élocution. Très significativement, le terme de rite est employé indifféremment comme cérémonie et comme contenu mental. Le culte des morts et le culte de Confucius ne sont que des expansions mystiques de la ritualisation du sentiment filial, et si la religion constitute bien l'arrière-plan dogmatique de la morale chinoise, cet arrière-plan est en réalité généré par la morale elle-même. Montesquieu semble attaché à expliquer le fonctionnement de la morale chinoise qu'à l'invalider ou même simplement l'évaluer, et sa critique forte, finalement, plus sur les voies de l'acquisition de ce sens moral que sur sa qualité : du point de vue du rendement social, il n'est pas loin de considérer que ces deux morales atteignent également leur but. Montesquieu qui ne conceptualise guère la notion de vertu morale, ne s'intéresse que médiocrement à les applications concrètes de la moralité chinoise, soit qu'il soit d’avance convaincu que les Chinois ne peuvent pas être individuellement moins moraux, soit qu'il considère que les actes vertueux qui regardent la morale individuelle sont toujours enveloppés dans la mécanique de la morale collective où ils trouvent leur véritable valeur. Le discours que tien Montesquieu sur l'application des peines dans la justice courante, tend à suggérer que ces pratiques s'incrivent dans la continuité d'un système des moeurs qui n'a pas su découvrir la valeur morale de la personne humaine ou qui n'en fait pas son principe : asservi à l’objet politique de la 'tranquillité publique', il n'hésite pas à le chercher par la voie de l'intimidation, de l'humiliation et, à l'occasion, de l'extermination. De la même façon, les moeurs chinoises ne tolèrent pas que 'les hommes et les femmes se communiquent', et Montesquieu retient que si les Chinoises sont recluses au même titre que la plupart des femmes asiatiques, c'est qu'il y a une nécessité physique à les séparer. Tout l'appareil des cérémonies s'édifie autour du respect dû au père, et l'ordre social va calquer sa hiérarchie sur un rapport archétypal qui donne au respect la force conjuguée du devoir moral et du sentiment. Montesquieu relève aussitôt que la piété filiale qui vient remplir de son contenu affectif la civilité chinoise a toutes les apparences d'un principe politique. Ce que redoute Montesquieu dans le recours à une continuité du pourvoir paternel au pouvoir positif, c'est l'enfermement dans l'illusion idéologique qui conférerait au gouvernement monarchique le prestige de l'archétype : il en résulterait que tous les autres tomberaient immédiatement dans l'irrationnel, de sorte que la typologie prendrait les allures d'une classification tératologique. Or, le modèle social chinois est dangereux parce qu'il ne naturalise pas seulement l'organisation civile de la société, mais que cette naturalisation emporte celle de son organisation politique. S'agissant de la Chine, c'est la politique qui présente le plus de difficulté à Montesquieu. Comme ses contemporains, il a d'abord été fasciné par les échos des 'merveilles' qui se rapportaient sur la Chine dont les voyageurs et les missionnaires entretenaient la légende. Son évolution vers une certaine intransigeance s'explique largement par des données conjoncturelles dont le changement de l'opinion générale sur les jésuites en Europe n'est peut-être pas la plus décisive. La question politique chinoise pose trois problèmes principaux à Montesquieu : Elle remet en cause sa typologie des gouvernements reprise de la tradition philosophique, et notamment le profond réaménagement qu'il lui impose en introduisant une pré-classification qui distingue entre 'régimes modérés' et 'gouvernement despotique'. Le modèle chinois apparaît de plus en plus clairement comme une alternative au modèle monarchique français qui ne satisfait presque personne. Pour tout ce qu'il demeure de conservateur et de féodal, le discours complaisant sur la Chine ne peut apparaître que produit ou exploité par des hommes attachés à remettre en cause la pairie, les parlements et les privilèges. Montesquieu fait partie des auteurs qui ont tiré la bonne leçon de la Querelle des rites et retourné sur le christianisme les avantages acquis sur la religiosité chinoise : tandis que l'âpre débot se soldait par une prise de conscience collective de ce que la religion, dans sa dimension mystique, est irréductiblement une affaire personnelle, il finit par imposer cette conclusion qu'appréhendée comme fait collectif elle ne peut plus prétendre à l'absolu. La justice constitute pour Montesquieu un élément décisif qui va lui permettre de se positionner de manière extrêmement critique à l'égard du gouvernement chinois. Ses critiques portaient plus sur la nature du rapport qu'entretient l'empereur avec son administration que sur la constitution même de ce corps administratif. En Chine les artefacts sont climatiques : c'est la rizière qui enclenche les catastrophes. La tragédie chinoise, et Montesquieu est persuadé qu'elle existe bien, se joue non pas dans un cadre naturel, mais dans un décor, celui de ces paysages verdoyants dont les bon Pères nous disent qu'ils se déroulent hamonieusement à l'infini et montent à l'assaut des montagnes. Montesquieu n'ignore pas que la Chine n'es pas une immense rizière, que si le riz est la nourriture de base de tous les Chinois, il ne se cultive que dans le Sud et que ce pays offre une grande variété de produits. Si le niveau de mise en valeur des terres peut expliquer la forte démographie chinoise, par contre le gigantisme du territire doit avoir un effet contrariant pour Montesquieu qui comte pour rien l'inidence de l'organisation administrative. Il réunit tous les facteurs susceptibles de réduire le paradox chinois. Il mentionne donc l'absence des eunuques, le rôle du dogme religieux, le riz, l'abondance de subsistance (premier facteur régulateur de toute démographie), l'absence de guerre (qui réduit le nombre de morts viventes). L'abondance de la population est un signe de paix sociale et de relative prospérité. Montesquieu explique qu'à la Chine, les lois somptuaires ne sont pas liées à la nature despotique du gouvernement mais à la pression alimentaire. Il tient la Chine pour un pays pauvre au sens à la fois matériel et économique (ou moral) du terme. La pauvreté se marque par la pression alimentaire considérable qu'elle ne parvient pas à maîtriser et se traduit à travers des lois somptuaires qui ont pour fonction de rediriger l'activité générale vers la production agricole. |
|
6 | 1750 |
Rousseau, Jean-Jacques. Si le rétablissement des sciences et des arts a contribué à épurer les moeurs [ID D20010]. Rousseau schreibt : "Il est en Asie une contrée immense où les lettres honorées conduisent aux premières dignités de l'Etat. Si les sciences épuraient les moeurs, si elles apprenaient aux hommes à verser leur sang pour la patrie, si elles animaient le courage, les peuples de la Chine devraient être sages, libres et invincibles. Mais s'il n'y a point de vice qui ne les domine, point de crime qui ne leur soit familier ; si les lumières des ministres, ni la prétendue sagesse des lois, ni la multitude des habitants de ce vaste empire n'ont pu le garantir du joug du Tartare ignorant et grossier, de quoi lui ont servi tous ses savants ? Quel fruit a-t-il retiré des honneurs dont ils sont comblés ? Serait-ce d'être peuplé d'esclaves et de méchants ?" Willy Richard Berger : Als Beispiel für den Niedergang der Sitten in einer hochentwickelten Zivilisation dient Rousseau neben dem Verfall und Untergang des antiken Rom auch die chinesische Kultur, und sein Urteil ist vernichtend. Er leugnet keineswegs wie andere Kritiker den hohen Stand der Wissenschaften und Künste in China, nur bewertet er ihn anders. Weder die wissenschaftlichen Leistungen noch die Aufgeklärtheit der Minister noch die angebliche Mustergültigkeit der Gesetzgebung haben das Land vor Lastern und Verbrechen schützen können, vor allem nicht vor der Unterwerfung durch die Tataren. Dies ist der Hauptvorwurf, den Rousseau dem chinesischen Reich macht. Das Hervorkehren militärischer Stärke läuft seinem Ideal von einer friedlichen und im Übereinklang mit der Natur lebenden Gesellschaft geradewegs zuwider. Indes ist bei ihm der beklagte mangelnde kriegerische Charakter der Chinesen eingebettet in das Ensemble all der anderen kritischen Ausstellungen, in denen sich insgesamt sein 'Unbehagen in der Kultur' artikuliert. Das Fehlen des heroischen Sinns ist Zeichen und Produkt der Dekadenz : die direkte Folge der Verweichlichung der Sitten durch den Luxus, und dieser wiederum steht in einem verhängnisvollen Zusammenhang mit dem Fortschritt von Kunst und Wissenschaft, den die Aufklärung optimistisch gepriesen hat und den Rousseau als das eigentliche Erzübel der Menschheit anprangert. Lee Eun-jeung : Mit diesen Schriften schloß sich auch Rousseau den Chinakritikern an. Rousseau hob sich jedoch von diesen insofern ab, als er den hohen Stand der Wissenschaften und Künste in China, wie sie es häufig taten, nicht leugnete, sondern ihn nur anders bewertete. Es ging ihm nicht so sehr um Degradierung der chinesischen Kultur, sondern vielmehr um Beispiele für seine These, daß alles Flend des Menschen aus seiner zivilisatorischen Übersättigung stamme. Dies konnte er nur an einer hochentwickelten Kultur zeigen. Für diesen Zweck bot China neben dem antiken Rom und der französischen Hof- und Salonkultur des Rokoko bestes Anschauungsmaterial. Dass China keineswegs so mustergültig war. wie es die Jesuiten glauben machen wollten, daß es vielmehr der Inbegriff aller möglichen Verbrechen und Laster war, habe er in Ansons Reisebericht lesen können. Dies war genau der Beweis seiner These. Seiner Ansicht nach war die Niederlage Chinas gegen die Tartaren Folge des Mangels an Tapferkeit. Das Fehlen des heroischen Sinns sei Zeichen und Produkt der Dekadenz, also die direkte Folge der Verweichlichung der Sitten durch den Luxus, die wiederum in einem unmittelbaren Zusammenhang mit dem Fortschritt von Kunst und Wissenschaft stehe, welche er aber als das eigentliche Erzübel der Menschheit anprangerte. Für Rousseau war Zivilisation überhaupt eine Alterserscheinung der Menschheitsentwicklung, der kränkelnde Endzustand. auf den die jugendliche Gesundheit des Naturmenschen zuletzt hinabgekommen war. Und China war ein Land mit einer uralten Zivilisation. Dies stand für ihn nicht in Frage. Gerade seine Anciennität, welche viele Chinakritiker bis dahin heftig bestritten hatten, war bei ihm selbstverständliche Voraussetzung für die von ihm diagnostizierte Degeneration. Mit seiner Kulturkritik läutete Rousseau die europäische Gegenaufklärung ein. Und die ideologische Abwertung Chinas in den folgenden Epochen erfolgte vor allem im Zeichen Rousseaus und auch Montesquieus. Sie ging einher mit der Frontstellung gegen die Ideale der Aufklärung. Jacques Pereira : Rousseau trouve dans le mandarinat un argument de choix au service de sa thèse de la corruption des moeurs par la culture des arts puisque voilà un pays, la Chine, qui depuis si longtemps cultive les lettres et qui est au dernier degré de corruption. Song Shun-ching : Rousseau a émis des critiques sur l’ensemble du peuple chinois et de ses moeurs. Il cite l’invasion de l'empire chinois par les Tartares afin de défendre sa thèse, notamment qu’un pays gouverné par des lettrés ne peut être que 'peuplé d’esclaves et de méchants'. |
|
7 | 1751 |
Rousseau, Jean Jacques. Réponse de J.J. Rousseau au roi de Pologne, duc de Lorraine, sur le réfutation faite par ce prince de son discours [Si le rétablissement des sciences et des arts]. Rousseau schreibt : "La doctrine intérieure n'a point été portée d’Europe à la Chine ; mais elle y est née aussi avec la philosophie ; et c'est à celle que les Chinois sont redevables de cette foule d'athées ou de philosophes qu'ils ont parmi eux." |
|
8 | 1753.8 |
Encyclopédie, ou dictonnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers. Mis en ordre et publié par [Denis] Diderot [ID D 20381]. Sekundärliteratur Die Encyclopédie enthält ca. 548 Eintragungen über China. Ca. 221 Artikel sind von Louis de Jaucourt, ca. 85 von Denis Diderot und ca. 44 von Paul Henri Thiry d'Holbach. Quellen : Brucker, Johann Jakob. Historia critica philosophiae [ID D20049]. Chambers, Ephraïm. Cyclopaedia or an Universal dictionary of arts and sciences (1728). DesBruslons, Jacques Savary. Dictionnaire universel de commerce, d’histoire naturelle, et des arts et métiers (1730). Du Halde, Jean-Baptiste. Description géographique... de la Chine [ID D1819]. Gaubil, Antoine. Le Comte, Louis. Nouveaux mémoires sur l'état de la Chine [ID D1771]. Longobardo, Niccolò. Lettres édifiantes et curieuses [ID D1793]. Martini, Martino. Novus atlas sinensis [ID D1698]. Navarrete, Domingo Fernandez de. Tratados historicos, politicos, y religiosos de la monarchia de China [ID D1747]. Song Shun-ching : Ainsi que Voltaire s'appuie sur l'ancienneté de la civilisation chinoise, Diderot sème le doute sur ce même propos. Diderot présente les 'Cinq classiques' et 'Les quatre livres' avec beaucoup de réserve et dit qu'il y a beaucoup de 'commentaires' sur la valeur et l'autorité de ces livres. Diderot considère que le règne de Fuxi ne peut être considéré 'comme une époque certaine', malgré le témoignage unanime d'une nation. Quant à la religion ou philosophie chinoise, Diderot a bien discerné la complexité du problème ; il décrit uniformément les trois grandes religions ou philosophies de la Chine : confucianisme, bouddhisme et taoîsme comme trois 'sectes'. Il s'est aperçu de la diversité des interprétations philosophiques émises sur la Chine mais, conduit par sa croyance en l'universalité de l'homme, il refuse de croire que les Chinois possèdent une vertu et une morale meilleures que celles des Européens ; il est persuadé que vices et vertus sont partout présent. Basil Guy : With the publication of his article 'Bibliothèque', we have proof of Diderot's more serious interest in China, when he dealt in an interesting and favourable fashion with that aspect of Chinese civilization. Diderot's appraisal of the examination system, outlining its relation to those in force throughout European universities should not be taken as characteristic of his attitude. He tended to view things in a much more thoroughgoing light, and so, was not content with mere factual reporting. And in as apt a manner as elsewhere, he was not long in attempting to deepen his acquaintance with China, and especially with the morality practiced there. Huguette Cohen : Diderot is generally considered as a sinophobe. Derogatory remarks about the Chinese are scattered throughout his works, with a mounting degree of criticism after the expulsion of the Jesuits in the 1760s. His attitude is not so surprising, however, if we keep in mind that the Jesuit missionaries to China were the main proponents of the Chinese example, and also happened to be his arch-enemies during the launching of the Encyclopédie. Diderot showed a decided lack of enthusiasm for Chinese art forms. Chinese antiquity and religion were bound to come under Diderot's scrutiny in his articles on philosophy and religion for the Encyclopédie. His early orientation can best be described as a shift from deism to Spinozism, ending in atheism. He is on treacherous ground when he brings up the topic of Chinese chronology, which claims to antedate the Deluge and casts doubts on chronological calculations affecting the Old Testament. In a tongue-in-cheek approach, he throws in a bewildering array of dates and names of Chinese emperoros, concluding with an orthodox views. In line with the attacks on superstitition, he makes no effort in 'Chinois' to conceal the Chinese cult for idols. Diderot's treatment of the Chinese code of morals is laudatory, following the practice of the Encyclopédie to state the superiority of humaistic morality over the morality of the Christian religion. Confucius, whose metaphysics were ridiculed by him, is praised for his practical ethics 'plus en action qu'en discours'. As a way of offsetting his positive judgement, Diderot concludes the article with negative views of Chinese arts and sciences. He repeatedly deplored the difficulties of the Chinese language as a source of misinterpretation, and complained about the disappearance of records and archives. Jacques Pereira : L'article 'Chinois (philosophie des)' n'évoque partiquement pas la question politique et s'en tient essentiellement au débat largement dépassé, à l'époque, sur l’antiquité de la Chine, la nature de sa religion, la qualité de sa philosophie. L'article, qui d'un point de vue documentaire et argumentif, n'est pas d’un grand intérêt est très nettement teinté de sinophilie. |
|
9 | 1762 |
Rousseau, Jean-Jacques. Du contrat social [ID D20390]. Jacques Pereira : Le chapitre 8 du livre III fait une référence explicite à la théorie des climats et se place d'ailleurs sous l’autorité de Montesquieu. Il convient de l'influence générale du climat sur la forme que prennent l'état civil et politique des sociétés : "par l'effet du climat, le despotisme convient aux pays chauds, la barbarie aux pays froids, et la bonne politie aux régions intermédiaires." |
|
10 | 1773 |
Helvétius, [Claude-Adrien]. De l'homme [ID D20026]. Helvétius schreibt : "Le despotisme de la Chine est dit-on fort modéreé. L'abondance de ses récoltes en est la preuve. En Chine comme partout ailleurs, on sait que pour féconder la terre, il ne suffit pas de faire de bons livres d'agriculture ; qu'il faut encore que nulle loi ne s'oppose à la bonne culture. Aussi les impôts à la Chine ne sont portés sur les terres médiocres qu'au trentième du produit. Les Chinois jouissent donc presque en entier de la propriété de leurs biens. Leur gouvernement à cet égard est donc bon. Mais jouit-on de la propriété de sa personne ? L'habituelle et prodigieuse distribution qui s'y fait de coups de bambou prouve le contraire. C'est l'arbitraire des punitions qui sans doute y avilit les âmes et fait de presque tout Chinois un négociant fripon, un soldat poltron, et un citoyen sans honneur." "La Chine est presque le seul empire où l'on ait reconnu l'abuse de [l'ingérence de l'état dans les questions religieuses]. Pour être historien juste et véridique il faut, disent les Chinois, être indifférent à la religion ; pour régir équitablement les hommes, pour être magistrat intègre, mandarin sans prévention, il faut donc n'être pareillement d'aucune secte.". Basil Guy : Helvétius is led to expatiate upon the example of China. Thus, when attempting to prove that intolerance is fatal to rulers, he quotes a brief exemplum 'drawn from Confucius' in which the Sage and the Emperor converse on the reputation and rule of a prince who would heed only advice prompted by flattery, and so go to his ruin. The moral, however, is quite succinct and useful, in that it shows how Helvétius doubted not at all the efficacy of education, but despaired that it might ever prove the salvation of the Chinese, a people [chez lui] "l'intérêt présent de l'orgueil l'emporte presque toujours sur tout intérêt à venir". Already, when treating of the difference between 'l'esprit' and 'l'âme', when noting the variability of human judgment where self-interest is concerned, Helvétius is quick to select other examples from China. Yet even as he underlines their appositeness he introduces such a note of scepticism, or even of disbelief, that we cannot help but wonder if this man's view of the Middle kingdom were not itself prejudiced by his reading of merchant relations like Anson's. Helvétius, like many of his contemporaries, was led to believe that potential stultified and wasted through the tyranny of religion. The use to which he puts the Chinese example in an untoward chapter on the Jansenist controversy esplains better than aught else how his view of that far kingdom was perverted and why, despite this fact, Helvétius was unsuccessful when treating of religion. Helvétius must be accounted a factor in diminishing the force and popularity of the Chinese example because of the vast audience he rached and influenced. Jacques Pereira : Ouvert à toutes les influences de son temps, Helvétius a su garder une certaine indépendance d'esprit qui lui a valu l'estime de ses contemporains, amis ou adversaires. S'agissant de la Chine, il apparaît qu'il n'a pas été inscensible au discours de Montesquieu. Helvétius, à l'évidence tout sensible aux analyses de Voltaire et des physiocrates, se met un peu en retrait par rapport à la sinophobie modérée de Montesquieu et, au nom de son refus du fatalisme climatique, admet chez la nation chinoise une force de caractère politique digne de l'esprit républicain. Il produit finalement un discours sur la Chine qui trahit les difficulté à trouver la cohérence. Il ne se sentait pas libre de remettre réellement en question la sentence 'la Chine est un gouvernement despotique'. Ce n'est pas qu'on le sente tenu par une dévotion particulière puisqu'il est capable d'avoir la dent très dure lorsqu'il s'agit de l'attaquer sur la question du climat ou de la typologie des gouvernements, mais il semble que le despotisme de la Chine soit un fait acquis à l'opinion publique et sur lequel il devient de plus en plus difficile de revenir. |
|
11 | 1791 |
Volney, C[onstantin] F[rançois]. Les ruines [ID D20223]. Volney schreibt : "L'Asie entière est ensevelie dans les plus profondes ténèbres. Le chinois, régi par un 'despotisme insolent', par des coups de bambou, par le sort des fiches ; entravé par un code immuable de gestes, par le vice radical d'une langue mal construite, ne m'offre dans sa civilisation avortée, qu'un peuple automate." Jacques Pereira : L'orientisme de Volney s'inscrit dans l'esprit de la méthode philologique et il est persuadé que l'on peut dégager le génie d'un peuple de la seule étude du fonctionnement de sa langue. Et, manifestement, le génie de la nation chinoise ne le satisfait pas. |
|
12 | 1795 |
Condorcet, Jean Antoine Nicolas de. Esquisse d'un tableau historique des progrès de l'esprit humain [ID D20222]. Condorcet schreibt : "Ces castes s'emparèrent de l'éducation, pour façonner l'homme à supporter plus patiemment des chaînes identifiées pour ainsi dire avec son existence, pour écarter de lui jusqu'à la possibilité du désir de les briser. Mais, si l'on veut connaître jusqu'à quel point, même sans le secours des terreurs superstitieuses, ces institutions peuvent porter leur pouvoir destructeur des facultés humaines, c'est sur la Chine qu'il faut un moment arrêter ses regards ; sur ce peuple, qui semble n'avoir précédé les autres dans les sciences et les arts, que pour se voir successivement effacé par eux tous ; ce peuple, que la connaissance de l'artillerie n'a point empêché d'être conquis par des nations barbares ; où les sciences, dont les nombreuses écoles sont ouvertes à tous les citoyens, conduisent seules à toutes les dignités, et où cependant, soumises à d'absurdes préjugés, les sciences sont contamnées à une éternelle médiocrité ; où enfin l'invention même de l'imprimerie est demeurée entièrement inutile aux progrès de l'esprit humain." "J'esposerai comment la religion de Mahomet, la plus simple dans ses dogmes, la moins absurde dans ses pratiques, la plus tolérante dans ses principes, semble condamner à un esclavage éternel, à une incurable stupidité, toute cette vaste portion de la terre où elle a étendu son empire ; tandis que nous allons voir briller le génie des sciences et de la libarté sous les superstitions les plus absurdes, au milieu de la plus barbare intolérance. La Chine nous offre le même phénomène, quoique les effets de ce poision abruitissant y aient été moins funestes." |
|
13 | 1808 |
Fourier, Charles. Théorie des quatre mouvemens et des destinées générales [ID D20225]. Fourier schreibt : "Le philosophe Raynal, dans son histoire des deux Indes, débute par un éloge pompeux des Chinois, et les représente comme la plus parfaite des nations, parce qu'ils ont conservé les mœurs patriarcales. Analysons leur perfection : la Chine dont on vante les belles cultures, est si pauvre, qu'on y voit le peuple manger à poignée la vermine dont ses habits sont remplis. La Chine est le seul pays où la fourberie soit légalisée et honorée ; tout marchand y jouit du droit de vendre à faux poids, et d'exercer d'autres friponneries qui sont punies même chez les barbares. Le Chinois s'honore de cette corruption ; et quand il a trompé quelqu'un, il appelle ses voisins pour recevoir leurs éloges et rire avec eux de celui qu'il a dupé [sans que la loi admette aucune réclamation]. Cette nation est la plus processive qu'il y ait au monde ; nulle part on ne plaide avec autant d'acharnement qu'en Chine. La bassesse y est si grande, les idées d'honneur si inconnues, que le bourreau est un des intimes, un des grands officiers du souverain, qui fait administrer sous ses yeux des coups de gaule à ses courtisans. Le Chinois est le seul peuple qui méprise publiquement ses Dieux, et qui traîne ses idoles dans la boue quand il n'en obtient pas ce qu'il désire. C'est la nation qui a poussé l'infanticide au plus haut degré : on sait que les Chinois pauvres exposent leurs enfants sur des fumiers, où ils sont dévorés tout vivants par les pourceaux ; ou bien ils les font flotter au courant de l'eau, attachés à une courge vide. Les Chinois sont la nation la plus jalouse, la plus persécutrice envers les femmes, à qui l'on serre les pieds dès l'enfance, afin qu'elles deviennent incapables de marcher. Quant aux enfants, le père a le droit de les jouer aux dés et les vendre comme esclaves. Enfin, les Chinois sont le plus lâche peuple qu'il y ait sur la terre ; et pour ne pas les épouvanter, l'on est dans l'usage de relever les fusils de rempart, lors même qu'ils ne sont pas chargés. Avec de telles mœurs dont je ne donne qu'une esquisse bien imparfaite, le Chinois se moque des civilisés, parce qu'ils sont moins fourbes. Il dit que les Européens sont tous aveugles en affaires de commerce ; que les Hollandais seuls ont un œil, mais que les Chinois en ont deux. (La distinction est flatteuse pour les Hollandais [et pour l'esprit de commerce.]). Voilà les hommes que prône la philosophie, et que Raynal nous donne pour modèles : et certes, Raynal savait mieux que personne que la Chine est un réceptacle de tous les vices sociaux, qu'elle est l'égout moral et politique du globe ; mais il a vanté ses mœurs, parce qu'elles se rattachent à l'esprit des philosophes, à leurs sophismes sur la vie de ménage et sur l'isolement industriel qu'ils veulent propager. Telle est la véritable raison pour laquelle ils vantent la vie patriarcale, malgré les résultats odieux qu'elle présente ; car les Chinois et les Juifs qui sont les nations les plus fidèles aux mœurs patriarcales, sont aussi les plus fourbes et les plus vicieuses du globe. Pour écarter ces témoignages de l'expérience, les philosophes peindront la Chine en beau, sans parler de sa corruption ni de l'horrible misère de son peuple. Et si l'on veut rendre la civilisation pire encore, il faudra y ajouter des caractères de patriarcat qui sont très compatibles avec elle ; par exemple, l'émancipation commerciale, ou la liberté de vendre à faux poids, à fausse mesure, de donner de fausses denrées, comme des pierres glissées dans le corps d'une balle. Toutes ces friponneries sont légalement permises en Chine ; là, tout marchand vend à faux poids, vend de fausses denrées impunément. Vous achèterez à Canton un jambon de belle apparence, et en l'ouvrant vous n'y trouverez qu'une masse de terre artificiellement recouverte de tranches de chair. Tout marchand a trois balances : une trop légère pour tromper les acheteurs, une trop lourde pour tromper les vendeurs, et une juste pour son usage particulier. Si vous vous laissez prendre à toutes ces friponneries, le magistrat et le public riront de vous ; ils vous apprendront que l'émancipation commerciale existe en Chine, et qu'avec ce prétendu vice, le vaste empire Chinois se soutient depuis 4000 ans, mieux qu'aucun empire d'Europe. D'où l'on peut conclure que le patriarcat et la civilisation n'ont aucun rapport avec la justice ni la vérité, et peuvent fort bien se soutenir sans donner accès à la justice ni à la vérité, dont l'exercice est incompatible avec les caractères de ces deux sociétés." Jacques Pereira : Fourier nous offre le triste spectacle d'un mythe chinois en voie de cristallisation, qui n'est pas loin d'égaler en force évocatrice le mythe du Tartare qui fit frémir l'Europe de la fin du Moyen Âge. Il importe grandement de voir dans quel état de délabrement intellectuel est tombée la question chinoise à l'aube du XIX sièvle. Nous retrouvons pêle-mêle des références clandestines à Anson, Lange et Du Halde. |
|
14 | 1817 |
Destutt de Tracy, Antoine Louis Claude. Commentaire sur L'esprit des lois de Montesquieu [ID D20224]. Destutt schreibt : "Est-il donc 'très-singulier', comme le dit l'auteur, qu'un peuple comme les Chinois, asservi jusque dans ses manières, et toujours occupé de démonstrations cérémonieuses, soit 'très-fourbe' ? et pour expliquer un fait si simple, peut-on se permettre d'affirmer qu'à 'la Chine il est permis de tromper' ? Pour moi, j'ose assurer qu'on a trompé par-tout, et que jamais les lois n'y ont autorisé nulle part, pas même à Lacédémone, malgré les prétendus vols permis. J'ose encore affirmer que ce n'est pas la détestable manière d'écrire des Chinois qui a pu établir parmi eux 'l'émulation, la fuite de l'oisiveté, et l'estime pour le savoir'. Elle a sans doute contribué à leur respect pour les rites, en les rendant incapables d'apprendre rien autre chose, c'est-à-dire, qu'elle a aidé à les asservir en les abrutissant. Mais si c'est en cela 'que le gouvernement chinois triompha', comme le dit notre auteur, ce n'était pas à lui à chanter ce triomphe. Un philosophe doit accorder ses éloges avec plus le discernement." |
|
15 | 1841-1857 |
[Auguste Comte und China]. Comte schreibt : "Malgré les déclarations classiques sur le prétendu despotisme oriental, la soumission trop prolongée résulte surtout de la difficulté d’obtenir une meilleure domination". "Beaucoup ont considéré les Chinois comme un peuple soumis à une domination arbitraire en assimilant sous ce rapport leur régime au gouvernement islamique en décrépitude. C'est une grave erreur. Une profonde soumission se combine chez eux avec un sentiment rès réel d'indépendance." Georges-Marie Schmutz : Comte ne crut jamais au 'despotisme oriental', à l'idée de la Chine stagnante ni à celle d'un état stationnaire. Dans le Système de politique positive [ID D20372]. et la Synthèse subjective [ID D20373], Comte ne mentionne pas toutes ses sources. Compte propose une sociologie de la hiérarchie, et la relie au rôle de famille, deux thèmes qui simposèrent naturellement dans le cadre dun appréciation sociologique de la société chinoise. Il met à jour lélément de continuité qui sous-tend la société occidentale et lélément de progrès continu qui caractérise la civilisation chinoise. Lempire chinois va servir aux positivistes de modèle pour envisager la société française sous le Second empire. Comte se résume à trois principes : progression nécessaire, accumulation, changement par soumission. La société est synonyme dunité, une unité qui contien le progrès. Ppour cette partie de sa doctrine sociologique, Comte trouvera une illustration dans lhistoire de la civilisation chinoise. Comte eut lintuition que la civilisation chinoise offrait un exemple surprenant de sa propre vision de la société. Il définit le religieux chinois depuis son expression la plus simple (le culte des ancètres) jusqu'à son expression la plus englobante (le culte de l'espace). La Chine partage en effet un même objet de culte avec la société positiviste : l'espace. Pour les Chinois, le ciel est l'objet de vénération. Le culte des ancêtres, avec son insistance sur le passé, sur la famille et sur l'ordre social et le gouvernement, est un élément indispensable de progrès, quand celui-ci se comprend en relation avec la continuité. La position centrale de la famille dans le modèle positiviste ainsi qu'en Chine découle naturellement du culte des ancêtres. Il fut le principal élément unificateur en Chine et a directement influencé le cours de son histoire en donnand à la famille chinoise une position centrale et en favorisant une certaine conception de l'ordre. L’institution de la famille rend possible une Chine des petits propriétaires ; la société chinoise n'est pas organisée en castes, elle n'a même pas d'aristocratie ; au contraire, elle est formée d'une multitude active de petits propriétaires indépendants, comme on peu le lire dans le Mengzi. L'esprit d'entreprise est naturel chez les Chinois est découle du système familial. Comte les appelait 'la race active'. Selon Comte, la société fonctionne grâce à son organisation, d'où l’importance de la hiérarchie. La Chine peut servir d'illustration. Oscar A. Haac : Auguste Comte appartient au grand mouvement de la 'renaissance orientale', car à partir de 1842, aux leçons 56 et 57 du Cours, il cherche à élargir sa conception de la culture européenne en la nommant 'occidentale' : ce qui l'induit à son pendant, l'Orient ; et en effet, il annonce que le positivisme 'ralliera dignement l'Orient à l'Occident pour le développement des attributs humains'. "[Le positivisme] comportera bientôt une efficacité croissante, soit pour la préparation directe des populations retardées, soit surtout en confirmant la famille d'élite dans sa nouvelle foi, ainsi appelée à manifester son universalité caractéristique." La France et l'Angleterre et trois autres pays d'Europe forment l'élite; la Chine est une de ces 'populations retardée', mais elle passera à l'état positif sans attendre, n'ayant jamais accepté la suzeraineté des prêtres, et évité le 'théologisme' polythéiste ou mono-théiste. L'humanisme de Confucius l'a mise en bonne voie. Nous trouvons chez Comte une forte sympathie pour l'Orient et pour la Chine en particulier. Confucius et Comte postulent que l'individu en société n'a aucun droit, uniquement des devoirs. Le pouvoir de l'Etat est absolu, mais en même temps altruiste et paternel, de sorte que le peuple ne sera pas exploité. Comme l'affirme le Catéchisme positiviste : 'Le positivisme ne reconnaît à personne d'autre droit que celui de toujours faire son devoir'. Comte propose la 'dictature républicaine' qui garantit 'Ordre et progrès'. Tandis que Confucius tire ses conclusions de la réalité chinoise. Comte les dérive de sa vision de la société positive, mais, l'un et l'autre, ils honorent l'humanité et la tradition dans laquelle l'homme n'a aucun droit, seulement quantité de devoirs. Auguste Comte prévoit qu'à l'état positif, l'Occident, l'Europe unifiée, va se réconcilier avec l'Orient asiatique et qu'alors la paix sera perpétuelle ! Il définit la qualité caractéristique de l'Occident, de l'Orient et de sa propre philosophie. Heureusement, il est moins rigide qu'il ne semble ; il admet des décalages importants entre les pays. Quant à la Chine retardataire, elle pourrait sauter le second des trois états historiques, qui sont désormais fétichisme, théologisme, positivisme. Comte conçoit qu'il existe une différence essentielle en philosophie entre l'Ouest qui systématise et l'Est qui ne pratique pas l'abstraction. Ainsi il considère qu'en Chine, les objets de la foi, la Terre et le Ciel, sont deux fétiches; en Occident, ce sont les bases d'une pensée universelle. Ils le seront également en Chine quand elle sera positiviste. Pour illustrer la différence entre les deux civilisations. Comte donne l'exemple frappant de trois découvertes : la boussole, les armes à feu et l'imprimerie: inventées en Orient, elles n'y produisent pas l'essor industriel qui suivra leur redécouverte en Europe. La Chine n'a pas su les exploiter, 'si, comme on a tant répété, l'ébauche directe de ces trois arts fut réellement beaucoup plus ancienne chez certaines populations de l'Orient asiatique, sans y avoir cependant déterminé aucun des immenses résultats sociaux qu'une irrationnelle appréciation attribue vulgairement à leur unique influence'. C'est l'époque où le Système de philosophie positive (1851-1854) introduit l'élément féminin et sensible, aspect que le Cours avait négligé. Sous l'égide de la religion positive le Système revient à la Chine et à sa double perspective du passé et de l'avenir, «accord universel » qui rapprochera l'Orient de l'Occident et garantira la paix ! Une page consacrée au bouddhisme montre pourtant que souvent l'Orient échappe à Comte. Il dit qu'ayant rejeté les castes et quitté l'Inde. "Le bouddhisme prévalut surtout en Chine, où l'institution des examens tendit à transformer la théocratie en pédantocratie : réalisant, autant que possible, le rêve des lettres grecques et de leurs modernes imitateurs." Or Comte confond le bouddhisme et le néo-confucianisme qui, 1800 ans après Confucius, installe les examens de fonctionnaires: de 1313 à 1905, ces examens forcent l'élite chinoise à apprendre par cœur les 'quatre livres sacrés' de Confucius! Il y mêle encore l'idéal de la pensée grecque qui marque la supériorité de l'esprit occidental. Tout s'explique par le 'système' de Comte, qui lie la philosophie et l'histoire. Quant à la 'pédantocratie', il l'applique ici à 'la dégradation pédantocratique essentiellement propre aux Chinois'. On connaît les abus qui, au bout des siècles, avaient pénétré dans le système du recrutement chinois, mais cela n'a rien à voir avec le bouddhisme ou avec le rêve grec, qui reparaît dans le texte suivant, le seul du Système a nommer Confucius. Comte est en train d'établir la supériorité de Pythagore : "Entouré d'influences monothéiques au temps où Bouddha, Confucius, et Zoroastre, s'efforçaient de réorganiser les trois grandes théocraties, Pythagore résista constamment à la vulgaire ambition de figurer parmi les rénovateurs apparents, qui troublaient l'avenir pour améliorer le présent." La priorité qu'accorde Comte à la pensée occidentale explique ce texte fort négatif à l'égard de Confucius, qui pourtant a son respect. La place de Confucius dans le Calendrier positiviste montre qu'il est, pour Comte, le sage de l'ancienne «théocratie» ; mais là encore il y a erreur: l'époque de Confucius n'est pas une «théocratie» ! Quant au 'dévergondage monothéique', il sert à choquer les contemporains. Au Calendrier positiviste (1849), Confucius paraît en majuscules au premier mois, celui de Moïse (de la théocratie); Confucius a sa place après Numa (première semaine consacrée aux personnages 'fabuleux') et après Bouddha (deuxième semaine), mais avant Mahomet. La symétrie du calendrier donne une grande importance à Confucius, mais les explications de Comte prouvent qu'il attache une gloire plus ample à l'Occident: il accorde trois semaines entières à 21 penseurs de la Grèce, une seule aux représentants de l'Orient. Comte accueille les trois philosophies religieuses de la Chine, celles de Confucius, du Tao et du Bouddha, mais il les range au-dessous de l'Occident qui dérive de la Grèce. En 1856, dans la Synthèse subjective, Comte revient à l'Orient. Il affirme que la Chine est prête à passer directement à l'époque positive, car le fétichisme y est 'mieux systématisé qu’aucun autre cas» et «prévalut sur le théologisme'. Il veut dire qu'après l'époque des fétiches primitifs, objets doués de pouvoirs magiques , aucune caste de prêtres ne s'est établie en Chine pour ralentir ses progrès ; c'est pourquoi la Chine pourra sauter l'étape 'astrolâtrique' (où surviennent les prêtres pour expliquer les étoiles), ainsi que l'étape 'théologique' (du polythéisme et du monothéisme). Ciel et Terre, les conceptions essentielles de la religion, se transformeront de fétiches en symboles, à mesure que la Chine s'approchera de la pensée positive. Comte dit que la Chine peut, comme lui-même, faire un bond intellectuel et moral : préservée du monothéisme, elle peut s'engager dans la route de l'avenir ! Comte et Laffitte ont discuté de la Chine et qu'ils étaient d'accord sur le fait que son fétichisme particulier la ferait passer rapidement à l'état positif . Sans doute se sont-ils documentés tous les deux dans les Nouveaux mélanges d'Abel Rémusat où ils ont lu la description [ID D22425]. Un grand nombre des principes politiques de Comte et Confucius s'accordent de près ; l'humanisme positiviste et son but, 'Ordre et progrès', ne sont pas en principe étrangers à Confucius. D'autre part, l'utopie de Comte se concilie mal avec le réalisme de Confucius qui dit qu'il n’a jamais trouvé la perfection, ni en lui-même, ni dans les autres. Jacques Pereira : Lorsque Comte recherche des paradigmes historiques des différents états de l'histoire spirituelle de l'humanité, il en vient à poser l'Egypte et la Chine comme modèles du stade fétichiste. Et c'est parce que, précisément, la Chine est le seul exemple de grande civilisation qui a perduré dans ces assises fétichistes qu'elle intéresse le positivisme. L'originalité de la chivilisation chinoise tient à un parachèvement précoce de ses structures sociales qui devrait lui permettre, sans trop de difficultés, d'accéder à la modernité en faisant l'économie du passage par les étapes intermédiaires et les révolutions que l'Europe a pu connaître. Cela suppose que l'Occident se tienne dans la contiunité des contacts et des échanges que les missionnaires avaient inaugurés, et s'il sait s'en tenir à cette sage politique dont il pourrait tirer parti lui-même, nul doute que nous verrions la Chine trouver dans sa propre culture les éléments propres à conduire ses réformes et sa modernisation. |
|
# | Year | Bibliographical Data | Type / Abbreviation | Linked Data |
---|---|---|---|---|
1 | 2000- | Asien-Orient-Institut Universität Zürich | Organisation / AOI |
|