Montesquieu, Charles de Secondat de. Quelques remarques sur la Chine [ID D20162].
Montesquieu schreibt : "P. Couplet ne veut pas que l'on puisse révoquer en doute l'histoire des tems qui ont suivi Yao, à cause de l'exactitude avec laquelle les événements sont rapportés à leur date et les années disposées par les cycles de soixante ans, en sorte que l'on a une histoire suivie de 4073 ans depuis le règne d'Yao jusqu'à la présente année 1713."
"Ces lettres sont pleines de faits très curieux il faut qu'ils disent la vérité lorsqu'ils n'ont pas d'intérêt de la cacher pour être crus lorsqu'ils veulent mentir." "Ces lttres sont très curieuses ce sont des gens qui restent plus long temps dans le pays que les faiseurs de relations ordinaires."
"Après le plan du temple du ciel et le temple de la terre ou vomme il dit du Seigneur de la terre il y a des massifs dédiés aux genies tutelaires des montagnes des rivierres [sic] que gagnent donc les jesuites à prouver que les Chinois ne sont pas athées puisqu'ils sont manifestement idolâtres."
"A mesure que le christianisme se dépouillait des superstititons juives, il se chargeait des païennes, de la même manière que les liqueurs perdent l'odeur qu'elles avaient conractées dans le vase où elles ne sont plus, pour prendre celles du vase où elles sont. Si la religion s'établit jamais à la Chine, la religion chrétienne orientale sera bien différente de l'occidentale."
"Toutes les religions introduites à la Chine ne sont point reçues comme religions nouvelles, mais comme suppléments à l'ancienne : Confucius, en laissant le culte des Esprits, a laissé une porte ouverte à ces suppléments."
"Inconvénients arrivés à la Chine par l'introduction des sectes de Foë et de Lao-chium : les guerres et les exécutions sanglantes qui en naquirent. Un empereur de la Chine fut obligé de faire mourir à la fois cent mille bonzes. Le peuple chinois vivait sous une morale, la plus parfaite et la plus pratique qu'aucun peuple qu'il y eût dans cette partie de la Terre. On l'alla entêter, lui et ses empereurs, des illusions d'un quiétisme et d'une méempsycose qui défendait de faire mourir jusqu'aux criminels mêmes et faisait consister tous les devoirs de la morale à nourrir des bonzes."
Louis Desgraves : Les Quelques remarques sur la Chine sont suivies de notes sur la Chine et les Indes prises par Montesquieu dans les ouvrages de Philippe Couplet et Athanasius Kircher. Montesquieu a lu attentivement l'oeuvre de Philippe Couplet écrite dans un latin difficile ; il en donne l'essentiel et intervient par des remqrques personnelles pour marquer son désaccord avec la pensée de l'auteur ou le manque de rigueur de son raisonnement.
Jacques Pereira : Les jésuites ayant décidément mauvaise réputation, Montesquieu est sans doute enclin à penser qu'ils ont souvent 'intérêt à cacher la vérité'. Toujours est-il qu'il pécherait plutôt par excès de méfiance et qu'il rejette des données qu'il aurait été mieux insprié de retenir, d'autant qu'elles étaient assez fidèlement consignées dans les Geographica. Pourtant, il arrive de saluer le travail des missionnaires et de reconnaître exactement ce qui fait la qualité de leur information.
Montesquieu semble s'être fixé pour tâche de rompre définitvement avec cette problématique biaisée de l'idolâtrie et de la superstititon pour des raisons qui sont à la foix de conviction, de prudence et de méthode. Sans perdre de vue qu'il tient compte du pluralisme religieux qui règne en Chine, il réserve à ce rite officiel qu'est le confucianisme. Montesquieu dit assez peu de choses sur Confucius qu'il intègre la plupart du temps dans le collectif 'les législateurs de la Chine' : son nom n'est cité qu'une fois dans L'esprit des lois, il ne lui consacre qu'une pensée et deux fragments du Spicilège. Il ne paraît pas s'attacher à la distinction entre confucianisme et néo-confucianisme, considérant que c'est dès ses origines, c'est-à-dire dans les textes canonique du maître lui-même, que s'affirment le dogme de la matérialité de l'âme et le refus de toute référence précise à la divinité. Il semble que Montesquieu a voulu mettre son ouvrage à l'abri de toute implication intempestive dans la querelle chinoise, jugeant sans doute qu'il ne valait pas la peine d'exposer le contenu politique et moral d'une entreprise, dont il sentait la richesse et la nouveauté, aux humeurs de disputeurs qui s'affrontaient sur une question ressortissant à un domaine religieux étroit, que l'esprit de sa démarche reléguait déjà sur les marges. La question qu'il se posait était de savoir comment la religion s'intègre dans le système politico-social chinois, et rien ne devait un tant soit peu le faire sortir de ce cadre de recherche, dans la fermeté duquel il engageait la cohérence de sa méthode. Aussi s'en tient-il prudemment à la thèse d'un matérialisme doctrinal et philosophique. Confucius est pour lui le chef d'une secte dont il n'a cessé de proclamer la supériorité morale.
Philosophy : Europe : France