2009
Web
# | Year | Text | Linked Data |
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1 | 1974 |
Reise von Roland Barthes mit François Wahl, der Delegation von Tel Quel mit Philippe Sollers, Julia Kristeva und Marcelin Pleynet von Beijing nach Shanghai und von Nanjing nach Xian auf Einladung der chinesischen Botschaft. Rachel Pollack : Les historiens ont débattu de l'impact que ce voyage a eu sur la position de Tel Quel face à la Révolution culturelle. Alors que Tel Quel ne désavoue la Révolution culturelle qu'après la mort de Mao, il y a certaines indications, même dans les premières oeuvres, des désillusions politiques de ses rédacteurs. A l'exception notable de François Wahl, toutefois, les voyageurs sont tous revenus avec des récits admiratifs de ce qu'ils ont vu en Chine. Roland Barthes décrit même la Chine comme un pays « sans hystérie ». Les mémoires des voyageurs, y compris les notes de Roland Barthes révèlent le désarroi frappant que les Telqueliens ont expérimenté dans leurs tentatives d'interpréter leur voyage. Maoïstes en France, ils sont confrontés en Chine à une campagne qu'ils ne peuvent comprendre et à un peuple qui les traite comme des étrangers. En outre, ils sont conscients des limites de leur visite et tentent de surmonter leur propre subjectivité. Leur étonnement, leur frustration et leur conscience de soi, qui sont tous exprimés dans leurs écrits, les amènent à affirmer que la Chine est impénétrable à l'analyse de l'Ouest, toujours méconnaissable pour les étrangers. Roland Barthes et Marcelin Pleynet, en particulier, sont plus intéressés par la civilisation chinoise et la culture chinoise que par la situation politique. Ils ne cherchent pas seulement une utopie politique, mais également une utopie artistique. Pour les Telqueliens, la Chine offre « une sorte de référence nouvelle dans le savoir »; sa découverte est comparable à la découverte, pendant la Renaissance, de la Grèce antique. Lors des événements de Mai 68, Tel Quel a soutenu le PCF contre les militants étudiants, et plusieurs chercheurs ont suggéré que leur tournant maoïste était un moyen de recadrer leur position à l Lors des événements de Mai 68, Tel Quel a soutenu le PCF contre les militants étudiants, et plusieurs chercheurs ont suggéré que leur tournant maoïste était un moyen de recadrer leur position à l'égard de 68. Une des attractions de la Révolution culturelle pour les Telqueliens est sa combinaison apparente du langage et de l'action comme outils de la révolution. Malgré l'enthousiasme du groupe pour la Révolution culturelle de Mao, leurs journaux intimes révèlent qu’ils sont conscients que l'agence de voyage tente de les manipuler. « Il est clair que les Chinois souhaitent nous prouver que la politique commande tous les aspects de la vie chinoise. C’est sur ce fond que se déroulent nos visites » écrit Pleynet après que le groupe ait visité un immeuble d'habitation à Shanghai et ait été accueilli par le représentant local du Parti.12 Il ajoute quelques jours plus tard que ce que la délégation avait vu était fondé sur un « grand écart des expériences » et que le tour était « coupé de toute expérience concrète ». Sa déception est claire après que le groupe se soit vu refuser la visite d’un temple antique à Xi'an, sous prétexte qu'il était fermé : « Bref tout ce qui ne relève pas de la plus stéréotypée des fictions (de culture ou d’histoire) est ou caché ou interdit », déplore-t-il. La plainte n'est pas entièrement exagérée; les deux guides sont des représentants des Luxingshe, le service touristique officiel de l'État chinois, et agissent comme agents du gouvernement ainsi que comme traducteurs13. La délégation a suivi l'itinéraire officiel de l'agence et s'est vu refuser plusieurs demandes pour visiter une « École du 7 Mai », camp de rééducation pour les intellectuels et les cadres du Parti dénoncés. Beaucoup d'éléments de la réalité chinoise sont passés sous silence, leur sont cachés, comme le révèle le fait que lors d'une rencontre avec des étudiants de l'Université de Pékin, Pleynet se soit plaint en disant : « Nous n'avons rien appris et rien vu ». A l'opéra à Xi'an, il se demande alors s'il est « vraiment possible de tirer quelque conclusion que ce soit des fictions qu'on nous propose ». Sollers dit que ces spectacles « n'ont à l'évidence rien à voir avec ce qui se joue aujourd'hui en Chine » et Barthes compare les figures de danse aux postures des mannequins de cire dans les vitrines des grands magasins. Les stéréotypes dont on les bombarde de toutes les directions ne sont « rien de fondamentalement différent de la guimauve morale de certains dessins animés, ou des bandes dessinées américaines », observe cyniquement Pleynet. De nombreux textes de Telqueliens expriment le sentiment d'aliénation en Chine. 'Des chinoises' commence avec une description de la marche à travers le village provincial de Huxian, à quarante kilomètres de l'ancienne capital de Xi'an. Kristeva décrit une distance incommensurable entre elle et les paysans chinois. Kristeva et les autres Telqueliens expriment le désir de se perdre en Chine, de 'devenir' chinois. Les notions de sexualité – et de frustration avec sa suppression en Chine – apparaissent plusieurs fois dans les écrits du groupe. Dans un entretien 1981, Sollers rappelle son ancien intérêt pour la Chine, à travers le taoïsme, et en parle comme d' « une expérience érotique ». Le groupe tient, tout au long du voyage, des discussions sur la sexualité chinoise et sa séparation de la vie sociale. Pendant le voyage, le groupe passe plusieurs soirées à discuter le rôle des intellectuels dans la révolution. Croyant que les intellectuels pourraient transformer la situation en France, ils se sont abstenus de critique la nature du tour ou de rejeter la Révolution culturelle. Ils font plutôt l'éloge du progrès qu'on leur a présenté en Chine et attribuent leur perplexité à des barrières épistémologiques plus larges. Dans le cas de Tel Quel, les voyageurs arrivent sans aucun doute en Chine avec des idées préconçues, mais ils ne sont pas aveuglés par elles. Le prisme à travers lequel ils voient la Chine est façonné par des questions épistémologiques, pratiques et politiques, ainsi que par des engagements politiques. En Chine, ce prisme vole en éclats parce que les voyageurs se rendent compte qu'ils ne sont pas capables de saisir entièrement ce qui se joue dans la Révolution culturelle. Leur vision est troublée par les contrôles de l'agence touristique et les barrières culturelles qui les mettent à l'écart comme étrangers. En fin de compte, les voyageurs de Tel Quel n'ont pas pu réellement voir la Révolution culturelle, mais ils n'ont pas « suspendu » l'analyse de cet événement, ils ont continué à le questionner et à l'interpréter minutieusement. La complexité de leur approche montre qu’ils sont allés bien au-delà de la simple acceptation de l'idéologie maoïste. |
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