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Chronology Entries

# Year Text
1 1933
Giuglielmo Marconi besucht Wissenschaftler in China.
2 1933
Gründung des Istituto italiano per il medio ed Estremo Oriente in Rom durch Giovanni Gentile und Giuseppe Tucci.
3 1933
Hugh Edward Richardson reist nach Sikkim und Phari, Tibet.
4 1933-1948
Giuseppe Tucci macht Expeditionen in Tibet. (1933, 1935, 1937, 1939, 1948).
5 1933 ca.-1941
Walther Heissig studiert Urgeschichte, Ethnologie, Sinologie und Mongolistik an der Universität Wien.
6 1933
Zhu Shenghao erhält den B.A. der Zhijiang-Universität.
7 1933-1944
Zhu Shenghao arbeitet als Herausgeber englischer Literatur und Shakespeare-Übersetzer des Verlages Shanghai shu ju.
8 1933
André Malraux erhält den Prix Goncourt für La condition humaine.
9 1933.2
Malraux, André. La condition humaine [ID D13269]. (2)
Sekundärliteratur
1991
Alain Meyer : Le texte de La condition humaine s'inscrit dans un triple contexte : crise générale des valeurs au tournant des années vingt et des années trente quand à l'Absolu se substitue l'intensité ; crise de l'art romanesque qui, après s'être donné la griserie souvent heureuse du jeu, de l'aventure et de l'exaltation de l'individu, va vers le sérieux, le témoignage, l'insertion dramatique et tendue dans une époque à travers des romans d'apprentissage politique à sujet collectif ; mutation de Malraux lui-même qui élargit le territoire de sa fiction, multiplie les personnages et l'entrecroisement de leurs points de vue, parle peu à peu à la troisième personne et passe de ce « livre d'adolescent » que fu, selon lui, Les conquérants à un roman juvénile.
Quant à Shanghai, Malraux ne découvrira le cadre de La condition humaine qu'en septembre 1931. Ce bref séjour de quelques jours n'est qu'une étape d'un tour du monde de sept mois. Il prendra de Shanghai un rapide aperçu, écrivant quelques rares notes ; ses pas ne semblent guère s'écarter des concessions européennes et de cette avenue des Deux-Républiques qui est le seul nom de lieu shanghaien prudemment cité dans La condition humaine. Bref, sa connaissance de la Chine est, à l'époque, extrêmement ténue et son expérience de ce pays se limite à quelques sensations de voyage d'un « homme pressé ».
Les Chinois de Malraux ne sont pas plus chinois que ne sont romains les Romains de Corneille ; la révolution chinoise de Malraux est élevée à la tragédie comme la Révolution française l'est à la grandeur épique de Hugo. La Chine a été choisie comme « théâtre des opérations » parce que c'est, à la fin des années vingt, l'un des pays où se manifestent avec le plus d'intensité l'effervescence et le trouble de la planète, et c'est en même temps un lieu abstrait.
Malraux qui refuse, à l'époque, toute réponse religieuse à ses questions, laisse, sans probablement en avoir conscience, une fenêtre ouverte sur une transcendance, c'est-à-dire sur une réalité supérieure irréductible à l'expérience et absolue. Gisors, à travers l'opium, ne cherche pas seulement à fuir l'angloisse, il prend de lui-même une conscience qui ne doit rien aux sens. Il se fond avec les objets et les lieux qui l'entourent et qui cessent d'être distincts de lui « au fond d'un monde plus vrai que l'autre parce que plus constant, plus semblable à lui-même formes, souvenirs, idées, tout plongeait lentement vers un univers délibré ».
L'histoire des interprétations du roman est inséparable de l'histoire des époques où ces interprétations ont été proposées. L'ombre portée des années trente jusqu'à nos jours recouvre largement cette oeuvre. Cette histoire est indissociable aussi de l'évolution de Malraux lui-même.
Gisors et Clappique ont ceci de commun qu'ils ont abaissé les digues élevées avec tant de constance par l'Occident entre le conscient et l'inconscient, entre le songe et la veille. En cinq boulettes d'opium, la dose à laquelle il se tient depuis des années, Gisors ne cherche pas une fuite, mais une délivrance. Tout l'effort obstiné de sa civilisation tendait à la destruction, à la séparation. Les personnages sont ainsi dispersés plus que confrontés. Comment construire un roman à partir de personnages solitaires, murés dans leur nihilisme comme Tchen, leur volonté de puissance et leur érotisme comme Ferral, leur mythomanie comme Clappique, leurs songes comme Gisors, leur humilation comme Hemmelrich ou König ?
Malraux a réussi à unifier une oeuvre qui, de prime abord, menaçait de s'éparpiller. Entre les scènes ou les séquences de son roman, il a tissé des liens multiples et nous avons vu toute l'attention qu'il portait aux procédé de liaison. Mais surtout dex avancées dans sa technique romanesque témoignent d'une maturité artistique conquise : l'emploi des temps et le passage au récit à la troisième personne. Malraux relate aussi des événements qui, dans leur perpétuel surgissement, ne laissent aux personnages comme au lecteur presque aucun répit. Pour ce faire, il emploie désormais ces temps par excellence de la distance et du recul que sont l'imparfait et le passé simple. C'est un paradoxe apparent : ils supposent l'évolution d'un passé classé, révolu, alors que tout le propos de Malraux consite à nous plonger et à nous entraîner dans un mouvement qui se déroule, inéluctable.
Malraux affirme encore avoir assisté à la répression à Shanghai en 1927. Mais il se fabrique moins systématiquement une biographie fictive. La mythomanie qui est en lui, il la projette maintenant sur Clappique, comme pour la tenir à distance, à un moment où, pour sa part, il est plus impliqué dans la vie de la cité et se sent plus de prise sur les événements. Ce qui l'amène à passer de la mythomanie à l'élaboration d'un mythe qui lui serait personnel et qui intégrerait à la fois son expérience propre et sa création.
Les révolutionnaires de La condition humaine consacrent leur vie et courent le risque de mort pour réaliser des valeurs absolues. Dans le contexte de la situation chinoise de 1927, dans celui, plus largement, de la stratégie d'ensemble de l'Internationale Communiste élaborée à Moscou et imposée par l'URSS, leurs aspirations malheureusement se révèlent irréalisables. Ils ne peuvent y renoncer et se rendent bien compte de leur échec. Telle est leur tragédie. Ce n'est qu'un des éléments, du tragique, mais c'est celui qui accable et écrase Kyo et ses compagnons. Aspirations à des valeurs absolues qui ne peuvent prendre forme dans une réalité historique donnée et souffrance indépassable de cette impossibilité, c'est ainsi que, dans ses écrits de jeunesse. Les relations entre les hommes sont insatisfaisantes, fondées sur le malentendu, l'oppression, la violence, parce que les circonstances ne sont pas mûres, parce qu'elles ne permettent pas de dépasser cette situation. Les conditions, de leur côté, sont défavorables, parce que les rapports sociaux sont gelés. Pour sortir de ce cercle, pour que l'Homme réalisé, il faut à la fois une appréciation lucide des rapports de forces et l'énergie d'en tirer parti. Le grand art en politique est de savoir tirer parti des circonstances. Il faut faire l'apprentissage de la révolution comme l'apprentissage de la vie.
Lorsque Kyo refuse l'idée de participer aux côtés de l'armée à une répression contre les paysans qui prennent leurs terres, Possoz, pour sa part, se contente d'affirmer qu'il tirerait en l'air et qu'il aime mieux que cela n'arrive pas. Déja dans leur débat, se préfigure la divergence fondamentale qui opposera plus tard le parti communist chinois de Mao Zedong au parti soviétique : celle qui porte sur le rôle des masses paysannes.
Dans l'épilogue du roman, l'espoir d'une transformation de la condition humaine allait de pair avec la constatation tragique que rien ne vaut une vie que toute mort est insoutenable et injustifiable. Les deux affirmations se répondaient et s'enchevêtraient.
Ce qui caractérise Ferral, c'est qu'il considère l'Extrême-Orient non seulement comme un empire à conquérir, mais encore comme un terrain vague à aménager. De même les habitants de la Chine, qu'ils soient du reste européens aussi bien qu'asiatiques, représentent pour lui une matière première à pétrir et à recréer.
Presque tous les événements importants à Shanghai, du meurtre commis par Tchen à la mort de Kyo et de Katow, en passant par les préparatifs de l'insurrection, le grand échange d'idées entre Gisors et Ferral, l'attentat manqué contre Chang-kaï-Shek et la mort de Tchen, le jeu de Clappique à la roulette, la dernière marche commune de Kyo et de May le long des rues désertes, l'attestation de Kyo, l'attente, le lendemain, du supplice par les militants voués au massacre, se situent entre six heures du soir et six heures du matin. Il sagit des faits les plus intenses, les plus dramatiques et les plus tragiques. La nuit est le lieu de la solitude, de l'échec et de la mort. En revanche, le jour est plus propice aux événements épiques et positifs.
Le pessimisme de l'oeuvre - l'accent mis sur la séparation, la solitude, la souffrance – est loin aussi de l'optimisme marxiste, dans la mesure où celui-ci prolonge l'esprit de la Renaissance et celui des Lumières. Malraux voit dans la Révolution une remise en question du monde plutôt que son accomplissement. En fait, « la résistance au communisme dans Malraux, c'est un fond de religiosité ». Il se pose avec intensité le problème du Mal. Les personnages sont confrontés à des situations limites, c'est-à-dire des situations que chaque homme rencontre un jour ou l'autre sans pouvoir les éluder – la solitude, la souffrance et la mort.
En 1932, un an avant sa publication, il presentait déjà comment il allait y parvenir : « Mes voeux sont de pousser très loin le tragique. La sérénité deviendra alors plus poignante que la tragédie elle-même ».

1999
Michel Dye : When he was awarded the Prix Goncourt for La condition humaine in 1933, Malraux said that he had written it « pour soutenir la lutte des communistes chinois [qui avaient] toute sa sympathie ». Malraux had absorbed Oriental culture due to his many trips to the Far East, and he does indeed use this work to make an indictment of the bourgeois society which had humiliated him in Indochina.
La Condition humaine clearly indicates the author's convictions. It also presents Oriental culture, which he must have got to know better thanks to the world trip he made in 1931 as a representative of the Gallimard publishing house. It was during this trip that he discovered China, especially Shanghai, and Japan, where the story is set.
In La Condition humaine, Malraux focuses on an episode of the Chinese revolution, the 1927 uprising in Shanghai which was organized by the communists and repressed by the nationalist General Tchang-Kai-Shek. He called his book a report, but it is in fact largely a work of fiction. Newspaper cuttings, and pieces of information taken from his friend Georges Manue, a reporter who had covered the communist militant uprising in China, form the basis of a storyline which goes far beyond the scope of a chronicle. Malraux's objectives in La Condition humaine are the following: to reflect the tribulations of a developing world, to shape people who express the aspirations of a tormented time and to depict man's combat with Destiny. Indeed, in the title itself La Condition humaine makes reference to Pascal and to metaphysics. Malraux rejects pleasant picturesque images, because he aims to put the emphasis on the relationship between the individual and collective action, and he portrays in his novel the conflict between man and fatality. The author plunges us straight away into the midst of revolutionary violence, by relating the terrorist action carried out by Tchen at the beginning of the novel. The presentation of the environment is reduced to its simplest description, the protagonist's field of vision. Thus we as readers discover with Tchen, who is about to murder his victim, the city lights in the shadows, but the novelist does not dwell on the description of the city. Like Tchen's, our eyes focus on the mosquito net covering the sleeping man whose life is to be sacrificed to the revolution. The Asian city is not really described afterwards. In the sketchy description Malraux makes of it a few pages later, the writer's talent lies in the ability to indicate that the uprising is imminent.
Taking care to avoid writing a long-winded novel, Malraux eliminates superfluous description. The atmosphere of Shanghai is essentially conveyed through the consciousness of Kyo, the main organizer of the uprising against the 'governmentals', who are supported by the West:
« Les concessions, les quartiers riches, avec leurs grilles lavees par la pluie a rextremite des rues, n'existaient plus que comme des menaces, des barrieres, de longs murs de prison sans fenêtres: ces quartiers atroces, au contraire - ceux ou les troupes de choc etaient les plus nombreuses - palpitaient du fremissement d'une multitude a l'affût. »
The scene at Han-Keou, a former communist stronghold, is presented at the beginning of the third part in a similar way, through Kyo's critical perspective. It has become a ghost town, and the port now houses only torpedo boats and junk. In this 'chronicle' of the Chinese revolution, the working class in fact only has an insignificant role. Malraux only gives limited attention to the plight of the exploited Chinese. Moreover, he sheds little light on the motives of the Shangai workers. The revolution he shows us is largely the action of intellectuals, from various walks of life, whom he apprehends for their ideology more than their social background. He avoids writing a report on China, and instead makes his novel the arena for a political and metaphysical debate. This debate was unavoidable for a Westerner between the wars, but because he was fascinated by the Far East, his account has a strong Oriental colouring.
Malraux depicts the triumphant revolt organized by the militant communists in Shanghai, and instigated by Chou-En-Lai, in order to beat the nationalist General Tchang-Kai-Shek. This historical figure is represented by Kyo Gisors in the novel, but the latter is very different from the real-life politician, and is not a literary transposition of him. As the son of a Frenchman and an Asian woman, Kyo represents the fusion of two cultures. His son is influenced by Western civilization, and suffers from a kind of existential solitude. He is aware of his own vulnerability in the face of destiny, and feels that the revolution gives meaning to his life. From his Japanese upbringing Kyo has retained enthusiasm for action, which is also a Western trait, and he is shown to be a practical man who aims for efficiency. His commitment to the Chinese working class, far from being merely intellectual, is concrete and is shown to be indissociable from his altruism.
Influenced by Japan, where he spent his youth, Kyo believes that it is important to act on ideas, and therefore he deliberately risks his life. Just as Mao-Zedong will do later, he concerns himself with China's national interests. In his strategy for the cause of rural populations, he expresses the individual character of the Chinese revolutionary movement. He is opposed to Vologuine, a Komintern bureaucrat and supporter of Stalin's theory which states that it is necessary to first establish the basis of communism in the USSR before extending it to other countries, especially China. Kyo represents the individual initiative which Chou-En-Lai embodied in real life. Through these two characters, Malraux raises the question of the conflict between Marxist orthodoxy and Trotskyist ideology, but he gives it an Asian dimension by emphasizing the close relationship between Kyo's ideas and those of Ho-Chi-Minh or Mao Zedong. The Shanghai revolutionaries like Kyo and Tchen are against the cold Vologuine, who wishes to maintain the alliance with Tchang-Kai-Shek's conservative forces. Refusing to make any compromises with the nationalist general, they intend to continue the revolution. In the Komintern directives ordering the halt of the farmers' action, Kuo sees a betrayal of the Chinese revolutionary movement, and he would like Vologuine to acknowledge the particular nature of the Chinese revolution. By planning the farmers' action and organizing a march from town to town, Kyo expresses ideas which are similar to those of Ho-Chi-Minh, which Malraux must have been aware of, being the chief editor of L'lndochine in Pnom-Penh. The character of Ferral is a big businessman inspired by the brother of the diplomat Philippe Berthelot, who was the director of the Franco-Chinese bank in the Twenties. He clearly understands the danger that the Chinese rural movement represents for the current banking system. Hence, he fully commits himself in favour of Tchang-Kai-Shek, against the communists, by contributing to his break from them and to his alliance with Shanghai's bourgeois business people. Ferral is, of course, condemned to failure at the end of the novel, because he represents imperialism as opposed to the movement for the liberation of the working classes. However, through Kyo and Tchen, Malraux also denounces the policy of co-operation with the Kuomintang imposed on the communist party by Stalin, because it refuses to take into account China's individual economic and social characteristics. Malraux puts the emphasis on the problems inevitably caused by cooperation with the communist Internationale which, refusing to go along with Chinese socialism, intends to maintain a policy of cooperation with the bourgeoisie. In this way, he goes beyond the specific debate on the internal ideology of the revolutionary community. He presents a new perspective based on his personal experience of the Far East. The Internationale's release of Shanghai revolutionaries, who decide to maintain their campaign in spite of everything, results in the repression of which Kyo and his friends are victims. By highlighting this abandonment and dwelling on the cruel fate which befalls these Chinese revolutionaries all at once, Malraux reveals his support for Trotskyist doctrine, and underlines the specific conditions of the Chinese revolution.
Kyo's tragic death gives the author of La Condition humaine the opportunity to praise commitment which gives man the feeling of participating in the evolution of humanity. Through this death, Malraux also extols the unusual strength of character that he had probably observed among the Asian people and which he had also seen in his father, who commited suicide just before Malraux wrote La Condition humaine. Stoically, Kyo kills himself in order to escape torture and takes the poison 'comme s'il eût commandé. Kyo's fierce determination can also be found in the character of Tchen, who is inspired by Hin. He was an Annamese who had also worked for L'Indochine, and Malraux was well aware of his violence. In addition, both Tchen and Kyo have a mixture of Western and Oriental influences. Although Tchen is Chinese, he is initially influenced by a Lutheran pastor, and has been taught to detach himself from the world 'au lieu de se soumettre a lui' as the Orientals do. Dominated by his ideas, he shows extreme individualism which also links him to the Western mentality. He is much more of an ally of the Shanghai revolutionaries than a real fighter for revolution. He finds that action is a way of relieving the metaphysical anxiety that his first tutor has passed on to him. For this kind of Nietzschean hero, the suicide bombing attack carried out against General Tchang-Kai-Shek is a moment of supreme joy, because Tchen believes that it enables him to regain the unity of his divided persona and gain total control of himself. Indeed, in death, he hopes to overcome his loneliness and find total peace. At the supreme moment, Tchen communes with his death; in this way, he converges with Kama, a painter, for whom communion with death also seems to be a way of giving meaning to his life. At this point Tchen, who illustrates the mysticism of terrorism as killing has become a source of fascination for him, approaches Oriental mysticism. This seems to have fascinated Malraux just as much as revolutionary conviction, as can be seen by Gisors's development at the end of the novel.
Gisors is a French philosopher who teaches Marxism. He has elements of Andre Gide as well as Bernard Groethuysen, a half-German, half-Dutch Marxist thinker who worked for the N.R.F. Gisors has a strong influence on his followers, be they his own son, Tchen of whom he was the second tutor, or Pei. The young Pei shows unshakeable faith in the heroic action of the Shanghai revolutionaries, and he writes a letter to May at the end of the novel, quoting Gisors's lyrical words from the past.
However, unlike the terrorist in Tchen's group, Gisors has lost this great optimism, since the death of his son Kyo. He who used to interpret the world according to the laws of Marxist philosophy, breaks away from this doctrine and goes back to his first job, teaching Western art. Deeply shaken by his death, Gisors refuses to follow Kyo's lady friend to the USSR, and to take up the post to which he has been appointed, as she urges him to do when she visits him at the painter Kama's home, in Japan.
A complete change takes place in the mind of this man who, having lived an Oriental lifestyle for a long time, now tends towards traditional Chinese wisdom. Gisors is a heavy opium smoker, and has always found it to be a form of escapism which allows him to free himself from the absurd and unbearable human condition. For him, opium has the same function as the woman in the Western world. It gives him an artificial but effective sensation of calm, and an form of peacefulness which, although short-lived, is nonetheless deep, since for the opium addict in a drug-induced illusion, death itself is glorified. In front of his dead son's body, Gisors suddenly realizes how much Kyo admired him. Although at this point he refuses to take refuge in the safety that the drug affords him, he does go back to it some time later in Kobe, convinced that it is better to think with opium than with the mind. Gisors also finds the peace he longs for in art. He is a great connoisseur of Chinese art, and unusually perceptive to Oriental paintings. He also looks to music for solace.
By taking refuge in music, which allows communion with death, Gisors agrees with Kama's theory that communion with death gives meaning to life. Far from aiming for action, now he longs only to live in harmony with the universe, in accordance with traditional Chinese culture. Indifferent to the transformation of the world, Gisors says that he is in some way 'delivré de la mort et de la vie' and all he wants now is to live in harmony with the rhythm of the universe.
Joining Chinese humanism, which Malraux mentions in La tentation de l'Occident, Gisors now believes that it is not necessary to act in order to exist; the former Marxist philosopher now thinks only of surrendering himself to the forces of the universe, and offers his compatriots an ideal of contemplation.
Whereas May finds a reason to live in the fight that she now plans to carry out in the USSR within rebel groups, the elderly Gisors finds stability in communion with nature. Gazing through Kama's window at the port of Kobe, in 'l'éblouissement du printemps japonais', he in a sense blends in with the universe, and is thus able to transcend the human condition.
Gisors is the opposite of May, who is indifferent to the beauty of the world. Of her environment, she sees only people's activity and thinks of its transformation. Gisors, however, takes the path of traditional Chinese humanism. In 1933 Malraux was strongly influenced by Bernard Groethuysen, and went back to the Marxist theory of the transformation of society. However, he is fascinated by the Far East which he had discovered during his successive trips, and in La condition humaine contrasts this theory with a conception of man and of the universe taken from ancient Chinese wisdom. He depicts individual human fortunes which are an integral part of the convulsions of history. The characters working for the transformation of Chinese society, which he shows us in this work, are mostly apostles of a religion based on a blind belief in work, in which God has no place. At this point Malraux shows himself to be unequivocally anti-colonial. In La Condition humaine he reveals his leftism, which indicates a Trotskyist tendency allowing for the characteristics of the Chinese revolutionary movement, particulary concerning land ownership. However, using China's historical situation in 1927 Malraux expresses the tragedy of the human condition. He develops a theory about man versus destiny which reveals the indecision of a system of thought which is attracted by both Marxist philosophy and Oriental mysticism. In the Western conception of man put forward by Pei at the end of the novel, man is deified, in accordance with Marxist theory, being the basis for the control of the universe. The Oriental philosophy that Gisors believes in after Kyo's death, however, attaches little importance to man per se. By dispersing human consciousness in the Great Whole of the universe, Chinese mysticism allows Gisors to reach the calm and serenity he longs for. Torn between the Western philosophy of success achieved through action on one hand, and the Oriental perspective which surrenders man to the will of the universe on the other, Malraux seeks direction. May's thoughts expressed at the end of the novel betray a certain departure from official Marxist theory. Malraux's Marxism is tainted with anxiety because he remains haunted by death which destroys everything in its path. This can be seen by the attitude that Malraux ascribes to Gisors, who is attracted to the comfort offered by Oriental wisdom. The author of La Condition humaine is curious about the Other. In the last pages of the novel, he puts in literary form some elements of traditional Chinese philosophy, having already drawn the reader's atttention to it in 1926 through the letters exchanged by Ling and A.D.

2001
Christian Morzewski : En ce qui concerne les personnages historiques, et à la différence très remarqualbe là aussi des Conquérants dont le texte est saturé de patronymes politiques et miliaries chinois plus ou moins illustres, Malraux se révèle particulièrement parcimonieux dans La condition humaine. Tchang Kaï-chek, dont la menace est omniprésent, n'apparaît explicitement nommé qu'en quelques occasions dans le roman ; d'autres « seigneurs de la guerre » n'ont droit quant à eux qu'à une seule nomination, comme Tchang Tso-lin, chef militaire du Nord, ou Feng Yu-shiang, autre 'toukioun'. Et Sun Yat-sen lui-même n'est qu'un 'hapax' tardif dans ce roman où Malraux ne force décidément pas plus la couleur historique que l'exotisme anthroponymique chinois.
La même édulcoration va se retrouver dans les toponymes chinois, quxquels le romancier sacrifie le moins possible semble-t-il. En dehors de Shanghaï, la ville de Han-k'eou, berceau de l'insurrection communiste, sera la seule à être régulièrement citée ; Canton, Tient-sin, Chant'eou ou Pékin n'aparaissent qu'une fois, tout comme Hong Kong ou Nankin, pour ne citer que les villes les plus importantes. Le fleuve Yang-tseu n'est qu'une fois nommé, malgré son importance symbolique dans les méditations des personnages et dans le « climat » du roman. Une seule allusion enfin à une province du centre de la Chine, le Hou-pei.
Les seules facilités que Malraux s'accorde avec l'exotisme linguistique de ses personnages, les rendant ainsi encore plus chinois à des oreilles françaises. On ajoutera seulement que ces particularités linguistiques ou phonétiques, si elles contribuent assez efficacement à cet effet de « chinoiserie », relèvent aussi chez Malraux d'une concetpion plus intéressante de l'idiolexie, liée à sa poétique des personnages.
Dans son évocation du cadre de l'action, des personnages et des « moeurs et coutumes » chinoises, il va arriver aussi à Malraux de sacrifier ici ou là à queulques chromos – concessions du romancier au « folklore » imposé par l'horizon d'attente du lecteur français, en droit d'espérer qu'un roman censé de passer dans un pays aussi étranger pour lui que la Chine lui apporte la dose convenue d'exotisme. Le décor fournit quelques inévitables cartes postales, spectacles des rues grouillantes de Dhanghaï ou intimité d'un intérieur chinois « plus vrai que vrai » décrits par Malraux sans grande originalité. Ainsi de la foule de Shanghaï qui se prépare à l'exode juste avant le déclenchement de la grève générale.
Si l'on s'intéresse aux personnages de Chinois présents dans La condition humaine, on sera contraint de constater là aussi la pauvreté et le caractère ultra-conventionnel de leur représentation. Du petit peuple de la rue évoqué dans ses mille occupations, Malraux ne nous restitue que des inventaires très faiblement descriptifs. Portraitiste très conventionnel, Malraux ne manifeste pas vraiment plus d'originalité en qualité d'éthologue, et sacrifie trop volontiers là aussi aux clichés occidentaux sur les « moeurs et coutumes » chinoises.
A défaut d'une connaissance directe et approfondie de la Chine, il faut rappeler que Malraux était depuis longtemps en relation de familiarité intime et de fascination profonde avec l'Asie. La Chine de La condition humaine est largement allégorique et une analogie très éclairante, Shanghaï n'y jouera pas un rôle plus important que Saint-Pétersbourg dans Crime et châtiment. D'où cette impression curieuse, pour le lecteur français, d'une Chine à la fois très proche, très semblable, très familière – et en même temps très lointaine, très différente, très étrangères (bien que conforme aux représentations stéréotypées et fantasmatiques qui forment et saturent l'imaginaire occidental sur la Chine et les Chinois.
La Condition humaine a peu à faire d'une reconstitution réaliste de la Chine de 1927. Les quelques images fortes que le jeune Malraux avait glanées lors de ses deux passages en Chine lui suffisaient largement, avec quelques souvenirs de lectures : Loti, Segalen, Claudel, et au besoin de renfort de différents matériaux importés d'Indochine.

2001
Liu Chengfu : Malraux nous a montré tous le processus d'une autre insurrection que dans Les conquérants, celle des ouvriers de Shanghaï : les communistes ont mobilisé une grève générale, en profitant de la situation favorable à l'Armée d'Expédition du Nord. Mais celle-ci n'a pas pu s'emparer immédiatement de la ville, et Jiang Jieshi s'allie avec de grands capitalistes et des impérialistes européens. Il veut obliger les groupes de combat communistes à livrer leurs armes, mais ceux-ci, surtout le noyau directeur du Parti, mènent courageusement une lutte acharnée contre la politique de réconciliation de la troisième Internationale. Leur résistence est cruellement réprimée par Jiang Jieshi. Dans la deuxième partie du roman, l'auteur nous a montré de manière très réussie la scène extrêmement touchante de la mort héroïque des communistes et des insurgés dans ce mouvement révolutionnaire.
La révolution chinoise qu'il a décrite, ou le cadre de la Chine qu'il a emprunté, neu peuvent pas être considérés, à nos yeux, comme le but principal ou final de sa création littéraire. Nous pouvons bien sentir l'atmosphère de l'époque. D'un côté, dans les années vingt, tout est noir en Chine, mais beaucoup d'intellectuels chinois se lèvent, cherchent à réveiller le « lion » dormant depuis cent ans. Avec une volonté ferme et opiniâtre, ils organisent des mouvements révolutionnaires de grande envergure qui bouleversent le monde entier. Les années vingt constitutent une page-clé de l'histoire de la Chine. D'un autre côté, à travers sa description de tous les personnages de différentes nationalités, nous pouvons percevoir aussi l'humanité : la Chine est plutôt le présage de l'Europe.
Les valeurs humaines manifestées chez ces héros sont étroitement liées aux valeurs européennes d'alors, et dans une perspective plus large, elles sont transculturelles ou universelles. Pour chercher la dignité de l'homme et la valeur de l'homme, ces héros livrent un défi violent à leur destin, à travers leurs activité conscientes et à travers leurs actes héroïques dans une collectivité très unie. C'est avec une sorte d'héroïsme et d'audace qu'ils engagent leur vie. Ils représentent en quelque sorte la sagesse, la volonté, le refus et l'opposition à l'arrangement du destin et à la mort absurde.
Sous la plume de Malraux, l'existence de l'homme s'est transformée en recherche de l'origine et du sens de la vie. Pour lui, la Chine est un décor, un cadre ou une référence pour sa création. La révolution chinoise a provoqué voire approfondi les réflexions philosophiques sur la vie. A ses yeux, la révolution chinoise est un mythe, elle permet à ceux qui refusent l'arrangement du destin de créer sans grande difficulté la meilleure atmosphère de communication, de propager ou de chanter une sorte de volonté ferme, persistante et active, ce qui n'est issu que d'une vie très malheureuse et d'une réalité horrible. Face à ce qui est incompréhensible, Garine trouve tout absurde, surtout quand il est gravement malade, il sent que l'absurdité a retrouvé ses droits. Aux yeux de Gisors, puisque Dieu est mort, et que le superpuissant Dieu qui décide du sort de l'humanité n'existe plus, comment va-t-on traiter l'âme de l'homme ? Le monde est absurde. C'est pourquoi, il cherche toujours par la violence à chasser la tristesse, la solitude et la mélancolie qui l'obsèdent terriblement durant toute sa vie.
On dit souvent que Malraux a beaucoup été influencé par la pensée pessimiste de Pascal, de Nietzsche, ou de Schopenhauer, mais en réalité, il a accepté en même temps l'humanisme traditionnel. Malraux a bien lié la vie à la mort, le destin à la révolte, ainsi que la dignité de l'homme à l'humiliation de l'homme. C'est en prenant l'homme pour le centre ou le noyau de ses réflextions qu'il a fondé sa philosophie de vie dans ses deux romans. Aux yeux de Malraux, le destin de l'homme est cruel, absurde et tragique, mais absolument pas invincible. Dans les années vingt, la révolution chinoise manifeste exactement la philosophie que Malraux voulait exploiter d'une manière très approfondie : donner de la lumière et de l'espoire à ceux qui vivent désespérés en Europe. La révolution chinoise est devenue un instrument pour atteindre son but artistique, qui est de chercher à faire connaître à tous les hommes de bonne volonté le sublime de sa propre activité. Il espère, par sa création littéraire, changer la tragique condition humaine et le destin malheureux de l'homme. Pour Malraux, l'histoire cherche à transformer le destin en conscience alors que l'art permet en effet de transformer le destin en liberté ; la révolution n'est pas le but de la vie, mais un moyen pour se débarrasser de l'absurdité surtout de la mort.

2005
Che, Jinshan. La condition humaine : quel intérêt particulier pour un lecteur chinois ?
Dans la lecture de La condition humaine, ce qui attire d'abord l'attention du lecteur chinois, c'est l'aspect chronologique du roman : l'histoire est composée de courtes séquences non seulement datées, mais aussi marquées d'une heure précise, et le roman s'apparente ainsi à une sorte de reportage minutieusement rédigé. Cela produi un efficace effet de réel. Le drame se joue en quelques jours, l'action y gagne en densité et en intensité.
Le style d'écriture du roman, avec les référents chinois semés ça et là dans la fiction, invite quand même, naturellement, immanquablement et presque légitimement, un lecteur chinois à prendre le jeu au sérieux, en essayant de reconstruire les événements et les sentiments vécus ou connus. D'autant plus que cette forme romanesque lui est assez familière, car elle s'accorde parfaitement avec la longue et riche tradition chinoise de la chronique, officiellement établi dans toutes les anciennes dynasties, qui a abouti finalement à un résultat monumental qu'on appelle 'Les 25 histoires', y compirs celle de la dynastie des Qing. De plus, le roman chinois, sous sa forme développée, provient précisément de ce genre de la chronique, à la différence du roman occidental qui trouve son origine plutôt dans l'épopée : s'est ainsi fondée dans la littérature chinoise une importante tradition romanesque nommée Shizhuan, soit une tradition d'histoire et de biographie. Elle est à la fois une conception du roman, une norme esthétique et une valeur idéologique. Mais elle exige avant tout, avec une nostalgie de sa naissance, une reconstruction de la vérité historique. Un lecteur chinois, consciemment ou inconsciemment formé dans cette culture, lors de sa lecture d'un roman ayant pour thème la révolution chinoise, ne peut éviter de référer les événements narratifs à l'Histoire, avec 'sa grande hache', et de prononcer un jugement de valeur principalement en fonction d'une fidélité présupposée.
En Chine, on peut saisir et comprendre la dimension métaphysique qui se trouve à l'intérieur de La condition humaine, mais devant une exigence plus primordiale et plus urgente de la tradition romanesque chinoise, la réflexion sur le destin de l'homme, où l'on voit souvent en Chine une sorte d'existentialisme sartrien avant la lettre, est négligeable et négligée. A cause de cela, le roman traduit en chinois n'a eu aucun succèes et le nom de l'auteur n'a jamais atteint le grand public chinois.

2005
Loehr, Joël. La Chine ou la révélation du signe.
Le roman de La condition humaine est orienté par la question qui se pose à Tchen au point de départ : « Que faire d'une âme s'il n'y a ni Dieu ni Christ ? » Cette question relance en fait un débat inquiet que Malraux avait d'abord exposé dans La tentation de l'Occident, où se signait la fin d'un théotropisme du sens. Il en expose les termes dans la formule d'un échange épistolaire. La valeur et la fonction du signe est reprise à l'épicentre de La condition humaine, dans la formule d'un échange dialogué. Il exige la médiation d'un interprète (Gisors), et se produit non plus autour d'un masque antique, mais au milieu de lavis épars. Deux personnages y sont confrontés. On a d'un côté un Polichinelle occidental et borgne : Clappique porte sur son oeil droit 'un carré de soie noire'. De l'autre, c'est Kama, un artiste japonais, qui déclare que, sans l'antenne sensible de son pinceau, il serait parfaitement aveugle. A travers ces deux personnages, Malraux oppose précisément deux points de vue. En Occident, l'oeuvre d'art serait un reflet quasi narcissique de l'identité de l'artiste. En Orient, en effet, la création artistique établit une relation fusionnelle entre l'homme et le monde, une communion par laquelle s'approfondit l'approche de son énigme.
Selon Kama : « Le monde st comme les caractères de notre écriture. Ce que le signe est à la fleur, la fleur elle-même, cell-ci l'est à quelque chose. Tout est signe. Aller du signe à la chose signifiée, c'est approfondir le monde, c'est aller vers Dieu. » On a là une occurrence du mot 'Dieu' qui donne à entendre cette sentence d'ascète oriental comme une réponse différée à la question angoissée posée à Tchen, et qui est en réalité celle de tout l'Occident déchristianisé. Mais c'est une réponse que Tchen ne peut entendre. L'échange avec Kama est implanté au centre d'une partie qui s'ouvre avec le terroriste, mis en marche vers son destin, et se referme sur une séquence où cette marche s'accélère en un course suicidaire.
Dans sa traversée nocturne de Shanghai, Tchen suit pour sa part la voie d'une mystique sacrificielle, où il pense trouver la réponse à la question initiale. L'attentat terroriste par lequel il accomplit sa vocation débouche cependant non sur une épiphanie, mais sur le vide du non-sens.

2005
Moraud, Yves. La Chine dans La condition humaine : une esthétique du mystère.
De ce mystère, Malraux a fait une catégorie non moins esthétique que métaphysique, dont sa conception du roman et sa conception de l'homme sont profondément révélatrices, comme en témoigne la fréquence de mots tels que 'secret', 'inconnaissable', 'inconnu', 'insaisissable', 'enigme', 'mystérieux', 'infini', 'silence', 'nuit', 'brume' etc. Qui nous conduisent à penser que Malraux n'écrit qu'aux abords de cette zone mystérieuse dans l'homme et dans ses rapports avec le monde où le dire n'est jamais que défi à l'indicible qui est langue silencieuse du sacré. Mais ce mystère qui tient aux paysages, aux personnages, à la nature du discours romanesque, et plus largement à ce que Malraux appelle 'l'optique du roman' fait de La condition humaine, comme roman, non seulement 'une dépendance de la poésie', mais aussi l'expression de l'exotisme au sens où l'entendait Victor Segalen.
A parcourir toute son oeuvre, nous constations que le mystère qui l'obsède et qu'il ne cesse d'interroger, comme s'il voulait élargir l'espace propre de la réflexion à l'infini de l'indicible et de l'impensé, le mystère donc, André Malraux, tout au long de sa vie le voit sous diverses occurrences surgir partout : au coeur de la civilisation occidentale en crise, 'première civilisation consciente d'ignorer, dit-il, la signification de l'homme', et qui ne connaît pas sa raison d'être, bref une civilisation inquiète où le sens s'est perdu ; au coeur de l'homme dont les fondements métaphysiques et religieux se sont effondrés et qui se demande, à l'instar de Tchen 'que faire dûne âme, s'il n'y a ni Dieu ni Christ'.
Malraux, fasciné par la peinture et défenseur de l'esthétique cubiste, fait de l'univers de ses romans un univers plastique où les sons et les lumières ont une valeur dramatique, psychologique, symbolique, et contribuent à transformer la réalité. Dans La condition humaine, le décor sonore et les éclairages sont sans doute moins accordées à la Chine révolutionnaire, même si elle en a été l'incomparable occasion, qu'à une voix dont Malraux est obsédé comme poète. Sans doute cette atmosphère nocturne qu'il a inventée et dans laquelle il plonge Shanghai, cette atmosphère mystérieuse est bien celle de la vie souterraine de ces hommes à l'afflût, pris entre l'angoisse et l'espoir, qui se préparent d'abord à combattre pour l'insurrection, puis un peu plus tard à disparaître, vaincus, traqués, assassinés ou exécutés par les troupes de Tchang Kaï-chek.
Chine ancienne et traditionnelle dont le confucianisme et le taoïsme ont sculpté l'image du bonheur en supprimant l'individualisme et en inscrivant les Chinois dans des rythmes fondamentaux et universels d'un côté, Chine nouvelle fascinée par les valeurs européennes de l'autre côté. C'est peut-être moins aux contenus respectifs de ces cultures contradictoires que Malraux est sensible qu'à ce vide identitaire d'une Chine où « rien de ce qui fut détruit n'a été remplacé ».
Si, dans La condition humaine, le mystère, comme on l'a suggéré, est au fond moins une caractéristique du paysage urbain, nocturne et silencieux, de la Chine, que le paysage lui-même, qui se trouve ainsi placé sous le signe de l'indéterminé et de l'insaisissable d'une mise à l'épreuve de la raison, d'une interrogation inquiète de l'être sur lui-même.
A l'instar des grandes oeuvres de son Musée imaginaire, La condition humaine confirme que, pour Malraux, le salut de l'homme, s'il dépend du combat au'il mène contre l'histoire au nom de sa dignité et de son sens de la fraternité, rpose davantage encore sur le mystère de la création poétique en laquelle il voit un exorcisme hallucinatoire du réel et de la mort.

Zhang, Yinde. La tentation de Shanghai : espace malrucien et hétérotopie chinoise.
La topographie de Shanghai, dans La condition humaine, revêt un caractère imprécis et fragmentaire, que l'on attribue souvent à la volonté de l'auteur de gommer les marques d'un exotisme xomplaisant et de la concevoir selon son projet pascalien, révélateur de la condition universelle de l'homme.
Le renoncement au plan d'ensemble chez Malraux se traduit d'abord par l'imprécision topographique, attestée par l'absence d'esquisses en marge de ses manuscrits. Elle est confirmée par les rues sans nom excepté l'avenue de Nankin et celle des Deux-Républiques et par un balisage inexistant dans les itinéraires de personnages hormis celui de Ferral et de Kyo, qui par l'avenue des Deux-Républiques, quittent la Concession pour entrer dans la cité chinoise, où la première rue est celle des marchands d'animaux. Cette parcimonie est compensée plus ou moins par des notations toponymiques sur des lieux concrets, que l'on découvre cependant de loin.
La Condition humaine se construit sur une structure « alvéolaire » de la géographie shanghaienne : cité cosmopolite par son histoire et par l'imaginaire collectif, Shanghai se divise en une ville chinoise et en concessions internationales et française. La juxtaposition référentielle de ces deux domaines chinois et extraterritorial, sources de confrontations politiques, économiques et culturelles reçoit sa transfiguration textuelle pour devenir « le lieu géométrique d'un système binaire d'oppositions symboliques ». L'antagonisme, au niveau narratif, entre l'Europe du Consortium symbolisée par Ferrai et celle de la décadence incarnée par Clappique d'une part, et l'Asie des révolutionnaires et celle de la multitude chinoise aliénée, d'autre part, s'appuie sur une configuration spatiale dichotomique, nettement dessinée par la démarcation géographique et sociale.
L'opposition des deux mondes est clairement signalée par une frontière matérialisée par cette avenue des Deux-Républiques. Sans qu'il s'agisse d'étanchéité, le passage ville chinoise-concession ne fait que souligner davantage les obstacles, dressés avec les barrières, grilles et barbelés, qui portent les stigmates concrets de la division. Ces dispositifs de protection, dont témoignent Tchen après l'assassinat, Kyo dans ses activités clandestines ou encore Ferrai, se répercutent dans les espaces de socialité. « Les concessions, les quartiers riches, avec leurs grilles lavées par la pluie à l'extrémité des rues, n'existaient plus que comme des menaces, des barrières, de longs murs de prison sans fenêtres : ces quartiers atroces, au contraire ... palpitaient du frémissement d'une multitude à l'affût. » La perception et l'analyse antinomique de Kyo, qui justifie son action militante, renvoient à ces deux réalités en effet diamétralement opposées. Les intérêts économiques des Occidentaux se cachent, dans les concessions, dans ces résidences patriciennes dont l'intérieur, épuré et stylisé, s'organise autour d'oeuvres d'art, comme chez Ferrai. Ils s'exhibent surtout dans les lieux publics fréquentés par les Européens, tel le Black Cat, éclairé à deux heures du matin par 1' « enseigne lumineuse », où le «jazz était à bout de nerfs », où la musique maintenait les invités dans une « ivresse sauvage ». Le cercle français offre à Ferrai un havre où il vient se dégriser des nuits erotiques et cauchemardesques, pour, dans une conversation éveillée, « rétablir des rapports avec un être » ou pour collecter au bar les « rumeurs de la journée ». Au casino, le jardin dégage le « parfum amer » des « buis et des fusains mouillés » qui rappelle l'Europe ; au grand salon « dans une brume de tabac où brillaient confusément les rocailles du mur, des taches alternées - noir des smokings, blanc des épaules - se penchaient sur la table verte. »
Les concessions n'abritent pas seulement cette exterritorialité luxurieuse et étrange. Elles dressent en leur sein des barrières sociales entre les financiers et les « petits Européens » comme Hemmelrich. Les magasins chinois, avec leurs arrière-boutiques encombrées et obscures, lieux de complot et de préparation de l'insurrection, se rapprochent déjà de l'atmosphère de la ville chinoise.
La représentation de la cité chinoise, comme les concessions, emprunte sans doute au reportage d'André Viollis sur la bataille sino-japonaise de 1932, en dégageant des notes conformes aux chromos de l'époque : l'immense et bourdonnante cité chinoise étale ses hôtels et ses parfums capiteux, ses trottoirs luisants et ses boîtes de nuit, mais aussi son fleuve et ses coolies vêtus de toile bleue, Arsenal et filature, pousses, marchands à balance, bars et bordels. Rien d'exceptionnel quand on voit Clappique parcourir « une rue de petits bars, bordels minuscules aux enseignes rédigées dans les langues de toutes les nations maritimes », dans cette ville portuaire de marins et de prostituées. Malraux remotive pourtant le lieu en le transformant en topos révolutionnaire. Au balcon de son hôtel, Tchen observe cette ville en bas où sommeillent « des millions de vies ». Si « les lumières de minuit reflétées à travers une brume jaune par le macadam mouillé » lui renvoient une ville des opprimés, artisans « imbéciles » de leur propre aliénation, en revanche, Kyo et Katow voient dans ces lieux un « bon quartier » pour préparer des insurrections. Ils observent le même prolétariat besogneux : « un demi-million d'hommes : ceux des filatures, ceux qui travaillent seize heures par jour depuis l'enfance, le peuple de l'ulcère, de la scoliose, de la famine ». Ils perçoivent aussi les mêmes lumières « misérables allumées au fond de l'impasse et de ruelles ». Mais un orage à tout moment peut éclater pour percer ces « nuages très bas lourdement massés » au-dessus de ce sommeil apparent : « Les verres qui protégeaient les ampoules se brouillèrent et, en quelques minutes, la grande pluie de Chine, furieuse, précipitée, prit possession de la ville. »
La ville de Shanghai se confine ainsi chez Malraux dans l'image matricielle du cachot, de la prison, qui hante toutes les représentations spatiales du texte, intérieures et extérieures. Les barreaux de fenêtre de la chambre d'hôtel, les maison chinoises sans fenêtre, la succession des champs clos de la ville s'associent à la métaphore obsédante de la cage pour dessiner une géographie carcérale générale.
Si la ville de Shanghai est enveloppée des ténèbres de la solitude et de l'angoisse devant la mort, elle porte aussi une lumière révélatrice qui la transfigure en un lieu initiatique conduisant à l'Absolu. La célébration malrucienne de cette ville contraste avec sa condamnation, par les romancier chinois qui, révoltés contre les tares de la société, en font un lieu diabolique et apocalyptique.
10 1933
Zhang, Yuanchang. Sha xue. In : Wen zhe xue ji kan (1933). 莎学
Zhang Yuanchang introduced the William Shakespearen criticism of the Romantics in England, such as Charles Lamb, William Hazlitt, Samuel Taylor Coleridge, which "changed Shakespeare's literal reputation and established him once and for all as the head of English drama or even as the leading dramatist of the world".
11 1933.1
Michaux, Henri. Un barbare en Asie [ID D21734].
Er schreibt : "Quand je vis l'Inde, et quand je vis la Chine, pour la première fois, des peuples sur cette terre me parurent mériter d'être réels."
Henri Michaux a écrit pour l'édition d'Un barbare en Asie : « J'aurais voulu que l'Inde au moins et la Chine trouvent le moyen de s'accomplir nouvellement, de devenir d'une nouvelle façon de grands peuples, des sociétés harmonieuses et des civilisations générées sans passer par l'occidentalisation. »

Le peuple chinois est artisan-né.
Tout ce qu'on peut trouver en bricolant, le Chinois l'a trouvé.
La brouette, l'imprimerie, la gravure, la poudre à canon, le cerf-volant, le taximètre, le moulin à eau, l'anthropométrie, l'acupuncture, la circulation du sang, peut-être la boussole et quantité d’autres choses.
L'écriture chinoise semble être une langue d’entrepreneurs, un ensemble de signes d'atelier.
Le Chinois est artisan et artisan habile. Il a des doigts de violoniste.
Sans être habile, on ne peut être Chinois, c’est impossible.
Même pour manger, comme il fait avec deux bâtonnets, il faut une certaine habileté. Et cette habileté, il l'a recherchée. Le Chinois pouvait inventer la fourchette, que cent peuples ont trouvée et s'en servir. Mais cet instrument, dont le maniement ne demande aucune adresse, lui répugne.
En Chine, l'unskilled worker n'existe pas.
Quoi de plus simple que d'être crieur de journaux ? Un crieur de journaux européen est un gamin braillard et romantique, qui se démène et crie à tue-tête: "Matin! Intran! 4e édition", et vient se jeter dans vos pieds.
Un crieur de journaux chinois est un expert. Il examine la rue qu’il va parcourir, observe où se trouvent les gens et, mettant la main en écran sur la bouche, chasse la voix, ici vers une fenêtre, là dans un groupe, plus loin à gauche, enfin, où il faut, calmement.
A quoi bon ruer de la voix, et la lancer là où il n'y a personne ?
En Chine, pas une chose qui ne soit d'habileté.
La politesse n'y est pas un simple raffinement plus ou moins laissé à l'appréciation et au bon goût de chacun.
Le chronomètre n'est pas un simple raffinement laissé à l'appréciation de chacun. C'est un ouvrage qui a demandé des années d'application.
Même le bandit chinois est un bandit qualifié, il a une technique. Il n'est pas bandit par rage sociale. Il ne tue jamais inutilement. Il ne cherche pas la mort des gens, mais la rançon. Il ne leur endommage que juste ce qu'il faut, leur retirant doigt après doigt qu'il expédie à la famille avec demande d'argent et sobres menaces.
D'autre part la ruse en Chine n'est nullement alliée au mal, mais à tout.
La vertu, « c'est ce qu'il y a de mieux combiné ». Citons une corporation, souvent méprisée : les porteurs.
Les porteurs, dans le monde, entassent généralement sur leur tête et sur leur dos ou leurs épaules, tout ce qu'ils peuvent. Leur intelligence ne brille pas sous les meubles. Oh non ! Le Chinois, lui, est arrivé à faire du portage une opération de précision. Ce que le Chinois aime par-dessus tout, c'est l'équilibre savant. Dans une armoire, un tiroir qui s'oppose à trois ou deux à sept. Le Chinois, qui a un meuble à transporter, le divise de telle façon, que la partie qu'il accroche derrière fera équilibre à la partie qu'il accrochera devant. Un morceau de viande même, il le porte attaché à une ficelle. A une grosse tige de bambou qu'il porte sur l'épaule ces choses sont accrochées. On voit souvent, d'un côté, une énorme marmite soupirante ou un poêle fumant, et de l'autre, des Boîtes et des assiettes, des tiroirs. Il est aisé de voir adresse cela demande. Et ce défilé a lieu dans toute l'Extrême Asie.

Types chinois.
Modeste, et plutôt enfoui, étouffé, dirait-on, glaireux, des yeux de détective, et aux pieds, des pantoufles de feutre, comme il se doit, et les usant du bout, les mains dans les manches, jésuite, avec une innocence cousue de fil blanc, mais prêt à tout.
Visage de gélatine, et tout à coup la gélatine se démasque et il en sort une précipitation de rat.
Avec quelque chose d’ivre et de mou ; une sorte de couenne entre le monde et lui, et il déteste l'eau (exellent pour la personnalité d'ailleurs, la salteté).
Pas jaune, la Chinoise, mais chlorotique, pâle, lunaire.
Au théâtre, les hommes chantent avec des voix de châtrés, accompagnés par un violon qui leur est bien pareil.
Pas d'élan ; une langue faite de monosyllabes, et les plus courtes, et c'est déjà de trop.
Modéré, ayant le vin doucement triste, et reposant, et souriant.
Si petits que soient les yeux de Chinois, son nez, ses oreilles et ses mains, son être ne les remplit pas. Il se tapit loin derrière. Non pas par concentration. Non, le Chinois a l'âme concave.
Des gestes vifs, petits, mais pas durs, ni même précis. Rien d'appuyé, de décoratif. Raffolant des pétards, il en jette à tout propos, et leur son bref, sec, sans conséquences et sans résonance lui plaît, (comme le bruit des claquettes que leurs femmes ont aux pieds).
Il aime beaucoup aussi le coassement abrupt de la grenouille.
La lune lui plaît, à laquelle la femme chinoise ressemble étonnamment. Cette clarté discrète, ce contour précis lui parle en frère. D'ailleurs, beaucoup sont sous le signe de la lune. Ils ne font aucun cas du soleil, ce gros vantard, ils aiment beaucoup la lumière artificielle, les lanternes huilées, qui, comme la lune, n'éclairent bien qu'elles-mêmes, et ne projettent aucun rayon brutal.
Des visages étonnamment huilés de sagesse, auprès desquels les Européens ont l'air en tout point excessifs, véritables groins de sangliers.
Aucun type avachi ni d’arriéré mental, les mendiants, d'ailleurs rares, ayant encore l'air fort spirituels et de bonne compagnie, et intellectuels, beaucoup de ‘fins Parisiens’, avec une impression de justesse frèle, comme ont parfois les rejetons de vieilles familles aristocratiques, affaiblies par des mariages consanguins.
Les femmes chinoises d'un corps admirable, d'un jet comme un végétal, jamais l'allure grace comme l'Européenne l'est si facilement, et les vieilles comme les vieux, des têtes si agréables, pas exténuées, mais alertes et éveillées, un corps qui fait toujours son travail, et une tendresse entre eux et avec leurs enfants qui est un charme.

Le Chinois n'a pas précisément, comme on l'entend ailleurs, l'esprit religieux. Il est trop modeste pour cela.
'Rechercher les principes des choses qui sont dérobées à l'intelligence humaine, faire des actions extraordinaires qui paraissent en dehors de la nature de l'homme, voilà ce que je ne voudrait pas faire. (Extrait d'un philosophie chinois, cité par Confucius, on devine avec quelle satisfaction).
Oh ! non, il serait honteux. Il ne voudrait pas exagérer. Pensez donc ! Et puis, il est pratique. S'il s'occupe de quelqu'un, c'est des démons, des mauvais seulement, et encore quand ils font du mal. Sinon, à quoi bon ?
C'est cependant par cet effacement même, que le Divin uni à l'illusion s'est glissé en eux.
Bouddha au sourire qui efface toute réalité devait régner en Chine. Mais sa gravité indienne a parfois disparu.
J'ai visité, entre autres temples, le 'temple des Cinq cents Bouddhas', à Canton.
Cinq cents ! s'il y en avait seulement un de bon ! un vrai de vrai. Cinq cents parmi lesquels Marco-Polo, avec un chapeau fourni probablement par le Vice-Consul d'Italie. Cinq cents, mais pas un sur le chemin, au petit commencement du chemin de la Sainteté.
Finies les positions hiératiques favorables à la contemplation. Les uns tiennent deux ou trois enfants sur les bras, ou jouent avec. D'autres, agacés, se grattent la cuisse, ou ont une jambe levée, comme pressés de s'en aller, impatients d'aller faire un petit tour, presque tous avec des figures de petits malins, de juges d'instruction, d'examinateurs, ou d'abbés du XVIIIe siècle, plusieurs, visiblement, se paient la tête des naïfs, enfin, en nombre dominant, les Bouddhas négligents, et évasifs. « Oh, voux savez, nous autres... »
Faut-il étouffer de rire, de rage, de pleurs ou tout simplement penser que, plus forte que la personnalité d'un saint, d'un demi-dieu, est la force nivelante et vivante de la petitesse humaine ?
Dans un temple, le Chinois est parfaitement à l'aise. Il fume, il parle, il rit. Aux deux côtés de l'autel, les diseurs de bonne aventure lisent l'avenir dans des formules tout imprimées. On fait rouler des petits bâtonnets dans une boîte, il y en a toujours un qui s'avance un peu plus que les autres, vous le retirez. Il porte un numéro. On cherche la feuille d’avenir correspondant à ce numéro, on lit... et il ne reste qu'à y croire.

Peu d'Européens aiment la musique chinoise. Cependant, Confucius, qui n'était pas un homme porté à l'exagération, tant s'en faut, fut tellement pris par le charme d'une mélodie qu'il resta trois mois sans pouvoir manger.
Je serai plus modéré, mais sauf certaines mélodies bengali, je dois dire que c'est la musique chinoise qui me touche le plus. Elle m'attendrit. Ce qui gêne surtout les Européens, c'est l'orchestre fait de fracas, qui souligne et interrompt la mélodie. Cela, c'est proprement chinois. Comme le goût des pétards et des détonations. Il faut s'y habituer. D'ailleurs, chose curieuse, malgré ce formidable bruit, la musique chinoise est tout ce qu'il y a de plus pacifique, pas endormie, pas lente, mais pacifique, exempte du désir de faire la guerre, de contraindre, de commander, exempte même de souffrance, affectueuse.
Comme cette mélodie est bonne, agréable, sociable. Elle n'a rien de fanfaron, d'idiot, ni d'exalté, elle est tout humaine et bon enfant, et enfantine et populaire, joyeuse et « réunion de famille ».
(A ce propos, les Chinois disent que la musique européenne est monotone. « Ce ne sont que des marches », disent-ils. En effet, ce qu'on trotte et ce qu'on claironne chez les Blancs.)
Et de même que certaines personnes n'ont qu'à ouvrir un livre de tel auteur et se mettent à pleurer sans savoir pourquoi, de même quand j'entends une mélodie chinoise, je me sens soulagé des erreurs et des mauvaises tendances qu'il y a en moi et d'une espèce d'excédent dont chaque jour m'afflige.
Mais il y a un charme, non pas plus grand, mais plus constant peut-être, c'est la langue chinoise parlée.
Comparées à cette langue, les autres sont pédantes, affligées de mille ridicules, d'une cocasserie monotone à faire pouffer, des langues de militaires. Voilà ce qu'elles sont.
La langue chinoise elle, n'a pas été faite comme les autres, forcée par une syntaxe bousculante et ordonnatrice. Les mots n'en ont pas été construits durement, avec autorité, méthode, redondance, par l'agglomération de retentissantes syllabes, ni par voie d'étymologie. Non, des mots d'une seule syllabe, et cette syllabe résonne avec incertitude. La phrase chinoise ressemble à de faibles exclamations. Un mot ne contient guère plus de trois lettres. Souvent une consonne noyante (le n ou le g) l'enveloppe d'un son de gong.
Enfin, pour être encore plus près de la nature, cette langue est chantée. Il y a quatre tons en langue mandarine, huit dans les dialectes du Sud de la Chine. Rien de la monotonie des autres langues. Avec le chinois, on monte, on descend, on remonte, on est à mi-chemin, on s'élance.
Elle reste, elle joue encore en pleine Natur.

L'amour chinois n’est pas l'amour européen.
L’Européenne vous aime avec transport, puis tout d'un coup, elle vous oublie au bord du lit, songeant à la gravité de la vie, à elle-même, ou à rien, ou bien tout simplement reprise par « l'anxiété blanche ».
La femme arabe se comporte comme une vague.
La danse du ventre, souvenez-vous-en, n'est pas une simple exhibition pour les yeux ; non, le remous s'installe sur vous, vous êtes emporté et vous vous retrouvez un peu après béat, sans savoir exactement ce qui vous est arrivé, ni comment.
Et elle aussi se met à rêver, l'Arabie se dresse entre vous. Tout est fini.
La femme chinoise, pas du tout. La femme chinoise est comme la racine du 'banian', qui se retrouve partout, jusque parmi les feuilles. Telle, et quand vous l’avez introduite dans votre lit, il vous faut des jours pour vous en dégager.
La femme chinoise s'occupe de vous. Elle vous considère comme en traitement. A aucun moment, elle ne se tourne de son côté. Toujours enlacée à vous, comme le lierre qui ne sait pas s'isoler.
Et l’homme le plus remuant la retrouve proche et aisée comme le drap.
La femme chinoise se met à votre service, dans bassesse, il ne s'agit pas de cela, mais avec tact, avec intelligence.
Et elle est si affectueuse.
Il y a un moment, après d'autres moments, où presque tout le monde a envie de se reposer.
Vous peut-être, pas elle. Cette fourmi cherche aussitôt du travail et la voilà qui procède à la mise en ordre de votre valise.
Véritable leçon d'art chinois. On la regarde stupéfait. Pas une épingle de sûreté, pas un curedent qu'elle ne tourne et ne déplace et ne mette dans une position parfaite et telle que des siècles et des millénaires de savante expérience sembleraient l'avoir enseignée.
Pas un objet dont elle ne s'informe par gestes, qu'elle n'essaie et n'expérimente et juge, et avant de le placer, et elle joue avec. Puis, quand vous regardez toute cette ordonnance, il semble que le contenu de votre valise a maintenant quelque chose de poupin, de poupin et de dur aussi, et en quelque sorte d'indéréglable.
Quand la Chinoise parle d'amour, elle peut parler indéfiniment, on ne s'en lasse pas, elle peut même parler d'autre chose, comme elle fait probablement, elle a le langage de l'amour, l'amour est fait de monosyllables (dès qu’un mot s'allonge, il a l'air de s'en aller et de tirer à lui, dès qu'une phrase paraît, la phrase vous sépare).
La langue chinoise est faite de monosyllabes, et des plus courts, des plus incosistants, et avec quatre tons chantés. Et le chant est discret. Une sorte de brise, de langue d'oiseaux. Langage si modéré et affectueux qu'on l'entendrait toute sa vie, sans s'énerver, même ne le comprenant pas.
Telle est la femme chinoise. Et cependant, tout cela ne serait rien si elle ne remplissait cette admirable condition du mot 'mitschlafen', dormir avec. Il y a des hommes tellement remuants que même leur oreiller, ils le jettent par terre sans s'en douter.
Comment fait la femme chinoise ? je ne sais ; une sorte de sens de l'harmonie, subsistant dans son sommeil, la fait, par des mouvements appropriés, ne jamais se détacher, toujours se subordonner à ce qui serait tout de même si beau : être harmonieusement deux.

En Europe, tout finit en tragique. Il n'y a jamais eu de philosophie en Europe (tout au moins après les Grecs... déjà bien discutables).
Le tragique de société des Français, l'Oedipe des Grecs, le goût du malheur des Russes, le tragique vantard des Italiens, l'obsession du tragique des Espagnols, l'hamlétisme, etc., etc.
Si le Christ n'avait pas été crucifié, il n'aurait pas fait cent disciples en Europe.
Sur sa 'Passion', on s'est excité.
Qu'est-ce que les Espagnols feraient s'ils ne voyaient pas les plaies du Christ ? Et toute la littérature européenne est de souffrance, jamais de sagesse. Il faut attendre les Américains Walt Whitman et l'auteur de 'Walden' pour entendre un autre accent.
Aussi, le Chinois, qui fait peu de poésie crèvele-coeur, qui ne se plaint pas, n'exerce-t-il aucun attrait sur l'Européen, si l'on excepte une centaine de bibliothécaires qui, à force de lire, ne savent d'ailleurs plus rien de rien.

Le Chinois regarde la Mort sans aucun tragique.
Un philosophe chinois déclare très simplement : « Un vieillard qui ne sait pas mourir, je l'appelle un vaurien. » Voilà qui est entendu.
D'ailleurs, le tiers de la Chine est un cimetière. Mais quel cimetière !
La campagne chinoise, quand je la vis pour la première fois, m'a été droit au coeur. Des tombes, des montagnes entières, (ou plutôt le flanc de l'une, le côté Est d'une autre), couvertes de tombes, mais pas de tombes dures et droites, non, d'hémicycles de pierres, qui invitent. Il n'y a pas d'erreur, elles invitent. D'ailleurs, elles n'effraient personne. Tout Chinois a son cercueil de son vivant. Il est à l'aise avec la mort.
Quand un homme meurt dans une province éloignée, on lui prépare, en attendant qu'on puisse le transporter dans son pays, une chambre, où les membres de la famille, le fils, la fille, etc., viennent de temps à autre, se retrouver là, méditer un peu, manger, parler, jouer au majong.

La peinture, le théâtre et l'écriture chinoise, plus que toute autre chose, montrent cette extrême réserve, cette concavité intérieure, ce manque d'aura dont je parlais. La peinture chinoise est principalement de paysage. Le mouvement des choses est indiqué, non leur épaisseur, et leur poids, mais leur linéarité si l'on peut dire. Le Chinois possède la faculté de réduire l'être à l'être signifié (quelque chose comme la faculté mathématique ou algébrique). Si un combat doit prendre place, il ne livre pas le combat, il ne le simule même pas. Il le signifie. Cela seul l'intérese, le combat lui-même lui paraîtrait grossier. Et cette signification est établie par un tel rien, qu'un simple Européen ne peut espérer déchiffrer la pièce. D'autant qu'il y en a des centaines. Par-dessus cela, quantité d’éléments sont décomposés et ensuite recomposés par fragments, comme on ferait en algèbre.
S'il s'agit d'une fuite, tout sera représenté sauf la fuite, - la sueur, les regards de droite et de gauche, mais pas la fuite. Si l'on vous représente la vieillesse, vous aurez tout là, sauf l'expression de vieillesse, et l'allure de la vieillesse, mais vous aurez, par exemple, la barbe et le mal au genou.
Dans la création des caractères chinois, ce manque de don pour l'ensemble massif, et pour le spontané, et ce goût de prendre un détail pour signifier l'ensemble est beaucoup plus frappant encore et fait que le chinois, qui aurait pu être une langue universelle, n'a jamais, sauf le cas de la Corée et du Japon, franchi la frontière de Chine et passe même pour la plus difficile des langues.
C'est qu'il n'y a pas cinq caractères sur les vint mille qu'on puisse deviner au premier coup d'oeil. Pas cent caractères simples même dans l'écriture primitive. Le Chinois veut des ensembles.
Prenons une chose qui a l'air bien simple à représenter : une chaise. Elle est formée des caractères suivants (eux-mêmes méconnaissables) : 1) l'arbre ; 2) grand ; 3) soupirer d'aise avec admiration, le tout fait 'chaise', et qui se recompose vraisemblablement comme ceci : 'homme' (assis sur les talons ou debout). 'Soupirant d'aise près d'un objet fait du bois d'un arbre'. Si encore on voyait les différents éléments ! Mais si on ne les connaît pas d'avance, on ne les trouvera pas.
L'idée de représenter la chaise elle-même avec son siège et ses pieds ne lui vient pas.
Mais la chaise qui lui convenait, il l'a trouvée, non apparente, discrète, aimablement suggérée par des éléments de paysage, déduite par l'esprit plutôt que désignée, et cependant incertaine et comme 'jouée'.
Ce caractère, qui est un des caractères composés les plus faciles, montre assez combien il répugne au Chinois de voir tel quel un objet, et d'autre part, son goût délicieux pour les ensembles, pour le paysage figuré. Même si le Chinois représente tel quel l'objet, au bout de peu de temps, il le déforme et le simplifie. Exemple : L'éléphant, a, au cours des siècles, pris huit formes.
D'abord, il avait une trompe. Quelques siècles après, il l'a encore. Mais on a dressé l'animal comme un homme. Quelque temps après, il perd l'oeil et la tête, plus tard le corps, ne gardant que les pattes, la colonne vertébrale et les épaules. Ensuite il récupère la tête, perd dout le reste, sauf les pattes, ensuite il se tord en forme de serpent. Pour finir, il est tout ce que vous voulez ; il a deux cornes et une tétine qui sort d'une patte.

La poésie chinoise est tellement délicate, qu'elle ne rencontre jamais une 'idée' (au sens européen du mot).
Un poème chinois ne se peut traduire. Ni en peinture, ni en poésie, ni au théâtre, il n'a cette volupté chaude, épaisse, des Européens. Dans un poème, il indique, et les traits qu'il indique ne sont même pas les plus importants, ils n’ont pas une évidence hallucinante, ils la fuient, ils ne suggèrent même pas, comme on dit souvent, mais plutôt, on 'déduit' d'eux le paysage et son atmosphère.
Quand Li Po [Li Bo] nous dit de ces choses apparemment faciles comme ceci et c'est le tiera du poème :
« Bleue est l'eau et claire la lune d'automne.
Nous cueillons dans le lac du Sud des lis blancs.
Ils paraissent soupirer d'amour
remplissant de mélancolie le coeur de l'homme dans la barque. »
Il faut dire d'abord que le coup d'oeil du peintre est si répandu en Chine que, sans autre indication, le lecteur voit de façon satisfaisante, s'en réjouit, et tout naturellement peut vous dessiner au pinceau le tableau en question. De cette faculté, un exemple ancien :
Vers le XVIe siècle, je ne sais sous quel empereur, la police chinoise faisait faire à la dérobée, par ses inspecteurs, le portrait de chaque étranger entrant en Chine. Dix ans après avoir vu le portrait seulement, un poicier vous reconnaissait. Mieux, si un crime était commis et que l'assassin disparût, il se trouvait toujours quelqu'un dans les environs pour faire 'de mémoire' le portrait de l'assassin, lequel, tiré à plusieurs exemplaires, était envoyé, ventre à terre, sur les grandes routes de l'Empire. Cerné de tous côtés par ses portraits, l'assassin devait se livrer au juge.
Malgré ce don de voir, l'intérêt que prendrait un Chinois à la traduction française ou anglaise du poème, serait médiocre.
Après tout, que contiennent ces quatre verse de Li Po en français ? Une scène.
Mais en chinois, ils en contiennent une trentaine ; c'est un bazar, c'est un cinéma, c'est un grand tableau. Chaque mot est un paysage, un ensemble de signes dont les éléments, même dans le poème le plus bref, concourent à des allusions sans fin. Un poème chinois est toujours trop long, tant il est surabondant, véritablement chatouillant et chevelu de comparaisons.
Dans le 'bleue' (Spirit of Chinese poetry, de V.W.W.S. Purcell), il y a le signe de casser du bois et celui de l'eau, sans compter la soie. Dans le 'clair', il y a la lune, et le soleil à la fois. Dans 'l'automne', le feu, et le blé, et ainsi de suite.
Si bien qu’après trois vers seulement, il y a une telle affluence de rapprochements et de raffinements, qu'on est inensément ravi.
Ce ravissement est obtenu par 'équilibre et harmonie', état que le Chinois goûte par-dessus tout, et qui lui est une sorte de 'paradis'. (Le Chinois a toujours désiré un 'accord universel' où le ciel et la terre 'soient dans un état de tranquillité parfaite' et où tous les êtres 'reçoivent leur complet développement'.)
Ce sentiment, plus opposé encore à la paix exaltée hindou qu'à l'énervement et à l'action européenne, ne se retrouve nulle part ailleurs que dans les races jaunes.

Ce que le Chinois sait le mieux, c'est l'art de s'esquiver.
Peuple profondément 'Pilate'. Vous demandez un renseignement dans la rue à un Chinois, aussi-tôt il prend la poudre d'escampette « C'est plus prudent », pense-t-il. « Ne pas se mêler des affaires d'autrui. On commence par des renseignements. Ca finit par des coups ».
Peuple que tout met en fuite et ses petits yeux détalent dans les coins, quand vous le regardez en face.
Un général chinois qui fait dans ses culottes, qui supplie le colonel d'aller au combat à sa place, n'étonne personne. Personne ne demande à voir les culottes. Tout le monde trouve ça naturel.
Un jour, je vis cinq officiers qui juraient d'exterminer je ne sais plus qui. Ils avaient l'air de lapins (et pourtant, les Chinois furent et redeviennent les meilleurs soldats du monde).
Vieux, vieux peuple d'enfants qui ne veut savoir le fond de rien, qui n'a pas de principes, mais des 'cas' ; pas de droit, mais des 'cas' ; pas de morale, mais des 'cas'.
Le mensonge est une création d'esprits excessivement droits, militairement droits, comme l'impudicité est une invention de gens éloignés de la nature.
Le Chinois s'adapte, marchande, calcule, échange.
Il accompagne la vague. Le paysan chinois croit avoir 'trois cents âmes'.
Tout ce qui est tortueux dans la nature lui est une douce caresse.
Il considère la racine comme plus 'nature' que le tronc.
S'il trouve une grosse pierre, trouée, crevassée, il la recueille comme son enfant sur un socle dans son jardin.
Lorsque vous apercevez à vingt mètres de vous un monument ou une maison, ne vous figurez pas que quelques secondes vous en rapprocheront. Rien n'est droit, d'infinis détours vous conduiront et peu-être perdrez-vous votre chemin, et jamais n'arriverez à ce qui était presque au bout de votre nez.
Cela pour contrarier la marche des 'démons' qui ne peuvent que marcher droit, mais surtout parce que tout ce qui est droit met le Chinois mal à l'aise et lui donne l'impression pénible du faux.
Peuple à la morale d'anémiques, ou de drogués.
(Est-ce par hasard que les femmes ont toutes l'air de pensionnaires vicieuses, avec leurs cheveux coupés sur le front ?)
Philosophie pour petits enfants. « Dites bien merci. Saluez, enlevez votre couvre-chef, ne passez pas le premier. Ne criez pas. Ne tenez pas le milieu de la rue. Songez à votre avenir, à vos parents. Ne pincez pas vos camarades, etc. »
« Quand vous sortez avec un supérieur, appli la règle 72 du manuel ; avec un professeur, la règle 18, pour rentrer chez vous, la règle no 44, ensuite appliquez le rite C et, si un Mandarin se trouve en visite avec le bonnet B 4, saluez-le avec le cérémonial 422, en disant les paroles 4007. »
Ainsi il ne 'perdra pas la face'. Depuis le dernier coolie jusqu'au premier Mandarin, il s'agit de ne pas perdre la face, leur face de bois, mais ils y tiennent et en effet, n'y ayant pas de principes, c'est la face qui comte.
Sagesse de bambins, mais ayant sur toutes les autres civilisations des avantages stupéfiants et inattendus et provenant sans doute du sens de 'l'efficacité' que possède le Chinois (il est l'inventeur du jiu-jitsu).
La 'gracieuseté', la douceur sont, huit cents ans avant Confucius, indiquées comme qualités essentielles dans les 'livres historiques'.

Obéir à la sagesse, une sagesse raisonnée politico-boutiquière, discutée et pratique, a toujours été la préoccupation des Chinois.
Les Chinois ont toujours exigé de leurs empereurs la sagesse. Leurs philosophes leur parlaient comme parlent des gens qui tiennent le bon bout. L'empereur craignait d'avoir 'à rougir'... devant eux.
Le bandit échappe aux lois de l'empire, mais pas à cette loi.
Un bandit inconsidéré jamais ne trouverait à enrôler un homme.
Au contraire, le bandit avisé recueille beaucoup d'appuis.
En Chine, rien n'est absolu. Aucun principe, aucun 'a priori'. Et rien ne choque la victime. Le bandit est considéré comme un élément de la nature.
Cet élément est de ceux avec lesquels on peut faire du petit commerce. On ne le supprime pas, on s'en arrange. On traite avec lui.
Pratiquement, on ne peut, en Chine, sortir d'une ville ; a vingt minutes de là, on vous attrape. Cependant au coeur de la Chine peut-être on ne vous attrapera pas. Mais la 'sécurité' n'existe nulle part. Il y a des pirates à deux heures de Macao, à deux heures de Hong-Kong, qui s'emparent des bateaux.
Or le Chinois, le commerçant chinois en est la première victime.
N'importe. Pour que le Chinois voie clair, il faut d'abord que les affaires soient compliquées. Pour qu'il voie clair dans sa maison, il lui faut au moins dix enfants et une concubine. Pour qu'il voie clair dans les rues, il faut que ce soient des labyrinthes. Pour que la ville soie gaie, il la lui faut kermesse.
Pour qu'il aille au théâtre, il faut qu'il y ait, dans le même bâtiment, 'hui à dix théâtres' de drames, de comédies, des cinémas, plus une galerie pour prostitutées, accompagnées de leur mères, quelques jeux d'adresse et de hasard, et, dans un coin, un lion ou une panthère.
Une rue commerçante chinoise est bourrée d'affiches. Il en pend de tous côtés. On ne sait quoi regarder.
Que la ville européenne est vide, à côté, vide, propre, oui ! et terreuse. (On croit que les Chinois grouillent parce qu'ils ont beaucoup d'enfants. Mais non, ils ont beaucoup d'enfants parce qu'ils aiment grouiller... et occuper le terrain. Ils aiment l'ensemble, non l'individu ; le panorama, non une chose).
Pour que le Chinois se sente dispos, il lui faut sur le corps la crasse de quatre-vingts jours.

Le Chinois n'est ni honnête ni malhonnête.
S'il s'agit d'être honnête, il adoptera l'honnêteté comme on adopte une langue.
Quand, faisant des affaires avec des Anglais, vous avez été amené à faire votre correspondance en anglais, toutes vos lettres seront en anglais, et non pas toutes moins cinq ou six par mois ; ainsi le Chinois qui adopte l'honnêteté du type rigide est parfaitement honnête. Il ne s'écarte plus du type rigide, il y est plus fidèle que l'Européen.
Mais si honnête qu'il soit, la malhonnêteté ne le choque pas. En effet, dans la nature, il n'y a pas de malhonnêteté. Une chenille qui prélève une tranche de parenchyme dans une feuille de cerisier est-elle malhonnête ? Et pourtant, le Chinois, avant l'arrivée de l'Européen, était, dans le commerce, d'une honnêteté remarquable, célèbre dans toute l'Asie.

Les Européens (Germains, Gaulois, Anglo-Saxons) sont de fameux Chinois. On dit souvent que les Chinois ont tout inventé... hum !
La chose curieuse, c'est que les Européens ont précisément réinventé et 'recherché' ce que les Chinois ont inventé et recherché.
Quand les Chinois se vantent d'avoir trouvé le diabolo, le polo, le tir à l'arc, le football, le jiu-jitsu, le papier, etc. Eh bien, que voulez-vous, ça n'élève pas le Chinois. Ca n'élève pas non plus l'Européen. Ca élève l'Hindou qui, intensément cultivé, n'iventa pas le diabolo, le football, etc.
Je serais une civilisation, je ne me vanterais pas d'avoir inventé le diabolo. On non, j'en aurais honte plutôt, et je me cacherais à mois-même. Je prendrais de meilleures résolutions pour l'avanir.
Les Chinois et les Blancs souffrent de la même maladie.
Dans la journée, ils bricolent, puis il leur faut des jeux.
Sans le théâtre, le Chinois des villes ne trouve pas la vie supportable. Il lui faut mille jeux.
Là, dans le jeu, il vit. A Macao, dans les tripots, ils s'animent légèrement, mais craignant le ridicule, ils sortent bientôt prendre une pipe d'opium, et s'étant refait une tête de bois, rentrent dans la salle.
A chaque instant, dans la rue, on entend des sous qui tombent, des 'pile ou face !' et aussitôt un concours de têtes qui regardent et prient.
Malgré tous ces jeux, une maladie guette les Chinois : il arrive qu'ils ne sachent plus rire. A force de dissimuler, de faire des plans, de se faire une tête, ils ne savent plus rire. Maladie terrible. On a vu un enfant dévoué qui, par amour filial, butait et tombait sur des seaux d'eau pour dérider ses parents atteints de 'la Maladie'. Or quand on sait comme le Chinois : « 1° a horreur de l'eau, 2° craint le ridicule, on comprend la gravité de la maladie à guérir, et les devoirs formidables de l'amour filial en Chine.

On ne saurait assez considérer les Chinois comme des animaux. Les Hindous, comme d'autres animaus, les Japonais, idem, et les Russes et les Allemands, et ainsi de suite. Et dans chaque race, ces trois variétés : l'homme adulte, l'enfant, et la femme. Trois mondes. Un homme est un être qui ne comprend rien à l'enfant, rien à la femme.
Et ni eux, ni nous n'avons raison. Nous avons évidemment tous tort.
Aussi, la question de savoir si Confucius est un grand 'homme' ne doit pas se poser. La question est de savoir s'il fut un grand Chinois, et comprit bien les Chinois, ce qui semble vrai, et les orienta pour le mieux, ce qui est incertain.
Et idem Bouddha, pour l'Inde, etc., etc.
Dans ces différentes espèces humaines, la philosophie rapproche en général du type de la race, mais parfaois aussi s'en éloigne.
C'est pourquoi il est difficile de savoir jusqu'où Confucius, Lao-Tzeu ont chinoisé les Chinois, ou les ont déchinoisés et jusqu'où Mencius, mettant la guerre et le militaire au ban de l'empire, a aidé la lâcheté chinoise ou combattu l'élan guerrier chinois. Se rappeler que le Chinois qui s'y met est un démon que plus rien ne retient et auprès duquel un Malais 'amok' est un homme doux, et que les traits de courage furent au moins aussi abondants en Chine qu'ailleurs et que leur indifférence à la mort et aux privations est incomparable.

Pour faire combattre entre elles les fourmis, il est recommandé de leur arracher une patte et ainsi blessées, de les rouler pêle-mêle sur le sol, en appuyant, mais pas trop fort.
Il est rare que cela n'existe pas leur rage, quelque chose d'ivre qui les prend et elles oublient tout des lois de la race et de l'entr'aide-fourmi.
Bientôt des championnes se distinguent.
On peut alors observer une loi bien curieuse.
Une championne de 1er catégorie, imbattue jusque-là, sera renversée et malmenée par une petite bousculée et dominée, et qui, remise en présence d'autres, sera presque toujours vaincue.
Ainsi, parmi les peuples blancs, l'Américain en ce moment, malgré les critiques qu'on lui adresse d'un air protecteur (comme les Chinois à l'Europe), des critiques de vieux, l'Américain fait figure de solide gaillard qui va tout manger.
Cette idée, en tout cas, est balayée en ce moment de mon esprit et pour quelque temps. J'ai vu les soldats japonais à Chapei. Des hommes trapus, carrés, prêts à sauter, meute qu’il faut retenir avec la joie et peut-être une sorte de férocité dans la figure, en tout cas la santé et l'exubérance dans le sacrifice de soi.
Des patrouilles en moto-mitrailleuses plus menaçantes que des corps d'armées.
Quand un peu plus loin, on voyait des camions chargés de soldats américains, ces camions pleine de grands enfants, bons bébés à faire de l'argent, on se regardait stupides : Ils n'existaient pas à côté des Japonais.
L'Anglais n'est peut-être pas un peuple qui mérite l'admiration universelle. Il est tout de même arrivé (comme le Phénicien, autre commerçant, fit adopter son alphabet) à faire parler sa langue à la moitié du monde. Tous les peuples à son exemple se rasent, prennent un bain le matin, font des affaires, poussent un ballon ou frappent des balles aux moments perdus.
Il faut toute fois reconnaître que sa petite-fille, l'Amérique, lui a donné un sérieux coup de main et qu'ils ont, plus que les Anglais, attiré l'attention du monde sur ces exercices et sports et jeux où on ne 'risque rien'. Certes, je ne suis pas militariste, je n'aime peut-être pas les dogues. Mais quand je vois un dogue près d'un épagneul, tout naturellement je pense qu'un épagneul seul est bien, mais que les deux chiens étant réunis, le dogue est celui qui fera belle figure. Dans les sports, on se démène beaucoup. Mais à côté de gens prêts à risquer leur vie, les sportifs on l'air futiles. Comme les gens qui ont fait la noce, qui ont participé à un tas d'actions de crapules et de bandits, quand on les rencontre, on baisse les yeux. Car le cran, tout de même, c'est quelque chose.
Quant aux Chinois, ils n'avaient pas l'air idiots, ils avaient l'air sages, lents, réfléchissants, retournant des trucs dans leurs sacs, pas du tout vaincus, avec peut-être un rien de réprobation d'aïeul.

Dans les derniers taudis chinois, il se trouve des tableaux aux larges horizons, aux montagnes superbes.

Un ancien philosophe chinois prononce cet encouragement à la vertu, un peu bébête, « que si le gouvernement d'un petit Etat est bon, tout le monde (tout le monde chinois, cela va de soi) y affluera », et en augmentera la puissance et la prospérité.
Il connaissait ses Chinois, vieux Chinois lui-même.
La chose se vérifie encore de nos jours. La Malaisie a un gouvernement stable et sûr. Les Chinois y affluent. Ils y sont deux millions. Singapour est une ville chinoise. La Malaisie, me disait un ami, est une colonie chinoise administrée par les Anglais.
Le commerce de Java est aux main des Chinois. Dans les moindres villages, ils ont leur boutique.
A Bornéo, ou même à Bali, où les habitants vivent entre eux et n'ont besoin de personne, quelques Chinois sont arrivés à s'installer et faire du commerce.
On raconte que Confucius et ses disciples rencontrèrent un jour une bonne femme (je donne l'histoire en gros). Ils apprennent que son père a été emporté par une inondation, son mari tué par un tigre, son frère piqué par un serpent, et un de ses fils saisi dans une mauvaise aventure de même type.
Alors Confucius déconcerté : « Et vous restez dans un pays pareil ? » (c'était un petit Etat de Chine qu'elle pouvait aisément quitter pour un autre).
La bonne femme donne alors cette réponse adorablement chinoise : « Le gouvernement n'y est pas trop mauvais ! »
Ce qui veut dire, en bon français, que le commerce marchait, que les impôts étaient modérés.
Ces choses-là vous clouent sur place, Confucius lui-même sentit ses yeux s'arrondir.

Les Chinois voient-ils jamais grand ?
Ils sont particulièrement grands travailleurs à de petites besognes.
Ils ont pu paraître profonds en politique à cause de ce sympathique principe de « laissez faire, tout s'arrangera », qu'ils réservent pour les grandes choses.
Mais on remarque que c'est tout le contraire qu'ils appliquent aux petites, où il n'est rient qu'ils ne remuent pour arriver à placer leurs marchandieses petites ou grandes, le plus souvent petites.
Ils font des projets, plantent des jalons, se ménagent des appuis, dressent des embûches, et l'ont toujours fait, car ils ont toujours aimé combiner.
Chaque être naît avec une évidence, un principe qui n'a pas besoin d'être démontré, généralement loin d'être transcendantal, et autour duquel il assemble ses notions... On croit généralement que l'idée centrale intime de Confucius était les obligations envers la famille, envers le prince et la sagesse. Qu'en savons-nous ?
Une idée trop essentielle, trop intime, pour qu'il pût, pour que les Chinois pussent s'en apercevoir, lui servait constamment de base. C'était peu-être que l'homme est fait pour trafiquer. (Le Chinois peut tout négocier : une insulte, une armée, une ville, un sentiment et même sa mort. Il vend sa conversion entre une montre, et sa mort contre un cercueil pour un cercueil de bon bois, on a vu des coolies se faire exécuter à la place de condamnés plus riches. Aux premiers Portugais catholiques avides de convertir des païens, les Chinois offraient douze cents baptêmes contre un canon. Un bon mortier en valait trois mille).
Au XVIIIe siècle, un grand auteur chinois se creusa la tête. Il voulait un récit absolument fantastique, brisant les lois du monde. Que trouva-t-il ? Ceci : Son héros, sorte de Gulliver, arrive dans un pays où les 'marchands essayaient de vendre à des prix ridiculement bas, et où les clients insistaient pour payer des prix exorbitants'. Après ça, l'auteur crut avoir secoué les bases de l'Univers et des mondes étoilés. Une imagination aussi formidable, pense ce Chinois, n'existe nulle part ailleurs.

Parmi les caractéristiques communes à tous les peuples de race jaune, il y a leur penchant à s'intoxiquer.
On croit volontiers que c'est l'opium qui a fait le mal, qu'il aurait bien pu ne pas se trouver en Chine de pavot fournissant de l'opium, et que par conséquent...
L'opium n'y est pour rien.
Il y a quinze siècles, le Chinois ne fumait pas. Il était seulement ivrogne. Il buvait du vin et de l'alcool de riz.
L'opium ne suffit pas au Chinois. Il fume du tabac. Les femmes fument. Dans les magasins, dans la rue et elles ne jettent leur cigarette que pour en prendre une autre. Sans cigarettes, elles ne pourraient évidemment pas choisir une étoffe.
Le Japon est plein d'ivrognes. Ils zigzaguent partout dans la rue.
Les Birmans, à l'âge de quatre ans, fument déjà, les petites filles comme les petits garçons, et non pas des cigarettes, mais de gros, sales, et forts cigares, des 'cheroots'.
Les Inochinois prennent de l'opium et de la morphine.
Le Chinois et le Japonais ont le goût des jouets, de l'artificiel, du bien-être, des lanternes, de la lumière artificielle, des arbres nains ou en carton. Ce sont des noctambules. Leurs villes vivent la nuit.
Il a une paix de drogué. Le goût d'aucun mouvement, sauf de l'hystérique, le goût du miaulement.

Le Chinois a le génie du signe. A côté de l'écriture chinoise, l'écriture égyptienne est bestiale, elle est surtout bête. L'ancienne écriture chinoise, celle des sceaux, ne contenait déjà plus ni volupté dans la présentation ni tracé, et à peine des signes ; l'écriture qui lui a succédé a perdu ses cercles, courbes et tout enveloppement. Dégagée de l'imitation, elle est devenue toute cérébrale, maigre et 'inenveloppante' (envelopper : volupté).
Et seul le théâtre chinois est un théâtre pour l'esprit.
Seuls les Chinois savent ce que c'est qu'une représentation théâtrale. Les Européens, depuis longtemps, ne représentent plus rien. Les Européens présentent tout. Tout est là, sur scène. Toute chose, rien ne manque, même pas la vue qu'on a de la fenêtre.
Le Chinois, au contraire, place ce qui va signifier la plaine, les arbres, l'échelle, à mesure qu'on en a besoin. Comme la scène change toutes les trois minutes, on n'en finirait pas d'installer des meubles. Son théâtre est extrêmement rapide, comme du cinéma.
Il peut représenter beaucoup plus d'objets et d'extérieurs que nous.
La musique indique le genre d'action ou de sentiment.
Chaque acteur arrive sur scène avec un costume et une figure peinte qui disent bien tout de suite qui il est. Pas de tricherie possible. Il peut dire tout ce qu'il veut. Nous savons à quoi nous en tenir.
Sur sa figure le caractère est peint. Rouge, il est courageux, blanc avec raie noire, il est traître, et on sait jusqu'à quel point ; s'il n'a qu'un peu de blanc sur le nez, c'est un personnage comique, etc.
S'il a besoin d'un grand espace, il regarde au loin, tout simplement ; et qui regarderait au loin s'il n'y avait pas d'horizon ? Quand une femme doit coudre un vêtement, elle se met à coudre aussitôt. L'air pur seul erre entre ses doigts : néanmoins (car qui voudrait de l'air pur ?) le spectateur éprouve la sensation de la couture, de l'aiguille qui entre, qui sort péniblement de l'autre côté, et même on a en plus la sensation que dans la réalité, on sent le froid, et tout. Pourquoi ? Parce que l'acteur se représente la chose. Une sorte de magnétisme apparaît chez lui, fait du désir de sentir l'absente.
Quand on lui voit verser, avec le plus grand soin, d'un broc inexistant, de l'eau inexistante, sur un linge inexistant et s'en frotter la figure et tordre le linge inexistant comme il se doit faire, l'existance de cette eau, non apparue, et pourtant évidente, devient en quelque sorte hallucinatoire et si l'acteur laisse tomber le broc (inexistant) et qu'on est au premier rang, on se sent éclaboussé avec lui.
Il y a des pièces d'un mouvement terrible, où l'on gravit des murs inexistants, en s'aidant d'échelles inexistantes, pour voler des coffres inexistants.
Il y a souvent, dans des pièces comiques, des vingt minutes et plus de mimique presque ininterrompue.
La mimique, le langage d'amoureux est quelque chose d'exquis, c'est mieux que des mots, plus tangible, plus impérieux, plus spontané, et central, c'est plus frais que l'amour, moins exagéré que la danse, moins extra-familial, et chose vraiment remarquable, on peut représenter tout sans que ce soit choquant.
J'ai vu, par exemple, un prince qui voyageait incognito, demander à une fille d'auberge par gestes de coucher avec elle.
Elle réondait, dans le même genre, par un tas d'impossibilités.
Les propositions de coucheries paraissent toujours difficilement séparables d'une certaine sensualité. Or, c'est curieux, il n'y en avait pas. Mais pas l'ombre, et cela dura bien un grand quart d'heure. C'était une obsession chez ce petit jeune homme. Toute la salle était amusée. Mais jamais cette obsession n'était génante. Elle n'était pas 'en chair', mais à l'état 'de traceé', comme certaines figures vues en rêve, dépourvues de tout débordement.

Le style chinois, surtout le très ancien style des Ming, des Six dynasties, des Tang, est extraordinaire. Pas de développement lyrique, pas de progression unilinéaire.
Tout à coup, on bute, on ne passe plus. Un ancien écrit chinois paraît toujours sans liaison. Il a des moignons. Il est courtaud. Un écrit à nous, à côté, a l'air plein de trucs et d'ailleurs la grammaire la plus riche, la phrase la plus mobile n'est autre qu'un truquage des éléments de la pensée.
La pensée, la phrase chinoise se plante là. Et elle reste calée, comme un coffre, et si les phrases coulent et s'enchaînent, c'est le traducteur qui les a fait couler.
Une grandeur pot-eu-feu en émane.
Lao-Tzeu [Laozi], Chuang-Tzu [Zhuangzi] dans leur philosophie ; Kao-ti (le paysan devenu empereur) dans ses proclamations aux Chinois, Wu-ti dans sa lettre au capitaine des Huns, ont ce style extraordinaire. Ce style où l'on épargne les mots.

Le paysn, le petit commerçant se voit trois fois ruiné, spolié, ou même dix fois spolié. Cependant, après dix fois, il lui reste encore un peu de patience en réserve.
Cette incertitude de l'intérieur de la Chine, où l'on risque ses biens et sa vie, et qui est si insupportable et angoissante pour l'Européen, le Chinois vit au milieu de cela. Joueur, il sait se comporter comme jouet.

C'est à Péking que j'ai compris le saule, pas le saule pleureur, mais le saule droit, l'arbre chinois par excellence.
Le saule a quelque chose d'évasif. Son feuillage est impalpable, son mouvement ressemble à un confluent de courants. Il y en a plus qu'on n'en voit, qu'il n'en montre. L'arbre le moins ostentatoire. Et quoique toujours frissonnant (pas le frisonnement bref et inquiet des bouleaux et des peupliers), il n'a pas l'air en lui-même, ni attaché, mais toujours voguant et nageant pour se maintenir sur place dans le vent, comme le poisson dans le courant de la rivière.
C'est petit à petit que le saule vous forme, chaque matin vous donnant sa leçon. Et un repos fait de vibrations vous saisit, si bien que pour finir, on ne peut plus ouvrir la fenêtre sans avoir envie de pleurer.

Dans les choses qui semblent d'abord presque neutres, mais qui se révèlent à lui tout de suite (à nous à la longue) comme d'une douveur déchirante, mystique, le Chinois a mis son infini, un infini de justesse et de saveur.
Le jade, les pierres polies et comme humides, mais pas brillantes, troubles et pas transparentes, l'ivoire, la lune, une fleur seule dans son pot de fleur, les petites branches aux ramilles multiples, aux feuilles minuscules, maigres, vibrantes, les paysages lointains et pris par un brouillard naissant, les pierres percées et comme torturées, le chant d'une femme affaibli par la distance, les plantes immergées, le lotus, le court sifflet flûté du crapaud dans le silence, les mets fades, un oeuf légèrement avarié, un macaroni gluant, l'aileron de requin, une pluie fine qui tombe, un fils qui remplit ses devoirs filiaux en suivant les rites de façon trop juste, d'une justesse crispante à vous faire évanouir, l'imitation sous toutes ses formes, des plantes en pierre, aux fleurs crémeuses, aux corolles, aux pétales et sépales d'une perfection agaçante, faire jouer des pièces de théâtre à la Cour par des prisonniers politiques, les y obliger, des délicieuses cruautés et à demi distraites, voilà ce que le Chinois a toujours aimé.

Le Chinois, entre tous les peuples de race jaune, a quelque chose de puissant, de pesant surtout, lui-même un peu tonneau aux formes cylindriques, quand il prend de l'âge.
Auprès de la grande porte Chien Meng à Péking, l'Arc de triomphe de l'Etoile paraît léger et amovible. Une baignoire chinoise dans le Sud est souvent un grand pot de terre, rien de plus (dont on retire l'eau par petites cruchées qu'on se jette sur le corps), un grand pot, mais lourd, et il semble qu'on déplacerait plus facilement un piano à queue. Il y a dans le Chinois quelque chose d'accroupi. Ses lions sculptés sont comme des crapauds qui grimacent. Ses grues en bronze, ses oies pèsent sur terre comme des hommes, oiseaux humains qui ne comptent plus que sur la terre ferme. Ses meubles sont trapus. Ses lanternes, grosses et ventrues, et chaque maison a deux ou trois de ces tonneaux suspendus en l'air, qui oscillent lentement.
Dans des intérieurs misérables et absolument nus, parfois une grosse aiguière rouge, patriarche qui trône.
Les caractères chinois sur les affiches japonaises sont maigres et déliés. Sur les affiches chinoises, les caractères sont pansus, véritables poussahs, en culs d'hippopotames, et se tiennent les uns sur les autres écrasés, avec un aplomb burlesque et bas comme les notes les plus graves et les plus troublantes des contrebasses.
Aucune ville n'a des portes aussi massives que Péking.

Mettez-vous bien en tête que le Chinois est un être tout ce qu'il y a de plus sensible. Il a toujours son coeur de gosse. Depuis 4.000 ans, il a toujours son coeur de gosse.
L'enfant est-il bon ? Pas spécialement. Mais il est impressionnable. Le Chinois, une feuille qui tremble lui chavire le coeur, un poisson qui vogue lentement le fait presque évanouir. Qui n'a pas entendu Mei-Lan-fang, ne sait pas ce que c'est que la douceur, la douceur déchirante, décomposante, le goût des larmes, le raffinement douloureux de la grâce.
Et même un traité de peinture, comme celui de Wang-Wei, ou celui de Ly-Yu intitulé : 'Le jardin du grain de moutarde', est fait avec une telle dévotion et un tel attendrissement qu'il fait venir les larmes aux yeux.
Un rien froisse le Chinois.
Un gosse a affreusement peur des humilitations.
Qui n'a pas été 'Poil de Carotte' ? La peur des humilitations est tellement chinoise qu'elle domine leur civilisation. Ils sont polis pour cela. Pour ne pas humilier l'autre. Ils s'humilient pour ne pas être humiliés.
La politesse, c'est un procédé contre l'humiliation. Ils sourient.
Ils n'ont pas tant peur de perdre la face, que de faire perdre aux autres. Cette sensibilité, véritablement maladive aux yeux de l'Européen, donne un aspect spécial à toute leur civilisation. Ils onte le sens et l'appréhension du 'on dit'. Ils se sentent toujours regardés... « Quant tu traverses un verger, garde-toi, s'il y a des pommes, de porter la main à ta culotte et s'il y a des melons de toucher à tes chaussures. » Ils n'ont pas conscience d'eux, mais de leur apparence, comme s'ils étaient eux-mêmes à l'extérieur et s'observant de là. De tout temps exista dans l'armée chinoise ce commandement : « Et maintenant prenez un air terrible ! »
Même les empereurs, quand il y en avait, avaient peur d'être humiliés. Parlant des barbares, des Coréens, ils disaient à leur messager : Faites en sorte qu'ils 'ne rient' pas de nous. – Etre la risée ! Les Chinois savent se froisser comme personne et leur littérature contient, comme il fallait s'y attendre de la part d'hommes polis et aisément blessés, les plus cruelles et infernales insolences.

Est-ce la Chine qui m'a changé ? J'ai toujours eu un faible pour le tigre. Quand j'en voyais un, quelque chose remuait en moi, et tout de suite je faisais un avec lui.
Mais j'ai été hier au 'Great World'. Je vis le tigre qui est près de l'entrée (un bau tigre), et je m'aperçus qu'il m'était étranger. Je m'aperçus que le tigre a une tête d'idiot passionné et monomane. Mais les chemins que suit chaque être sont si peu connus, qu'il se pourrait tout de même que le tigre arrive à la Sagesse. On lui voit en effet un air parfaitement à l'aise.

Aujourd'hui, pour la millième fois peut-être, j'ai regardé jouer des enfants (de Blancs). Le premier plaisir qu'en général les enfants ont de l'exercice de l'intelligence est loin d'être le jugement ou la mémoire.
Non, c'est l'idéographie.
Ils mettent une planche sur la terre, et cette planche devient un bateau, ils conviennent que c'est un bateau, ils en mettent une autre plus petite, qui devient passerelle, ou pont.
Puis s'entendant là-dessus à plusieurs, une ligne irrégulière ou fortuite d'ombre et de lumière devient pour eux le rivage, et manoeuvrant en conséquence, d'accord avec leurs signes embarquent, débarquent, prennent le large, sans qu'une personne non avertie puisse connaître de quoi il s'agit et qu'il y a là un bateau, ici le pont, que le pont est levé… et toutes les complications (et elles sont considérables) dans lesquelles ils entrent au fur et à mesure.
Mais le signe est là, évident pour ceux qui l'ont accepté, et qu'il soit le signe et non la chose, c'est ça qui les ravit.
Sa maniabilité séduit leur intelligence, car les choses mêmes sont beaucoup plus embarrassantes. Dans le cas présent, c'était tout à fait démonstratif. Ces enfants jouaient sur le pont d'un bateau.
Il est curieux que ce plaisir du signe ait été pendant des siècles le grand plaisir des Chinois et le noyau même de leur développement.
12 1933.2
Michaux, Henri. Un barbare en Asie [ID D21734].
Sekundärliteratur
Liu Yang : C'est un compte rendu, non plus sous forme de journal, mais sous forme d'essais ou de reportages. Michaux s'intéresse moins aux paysages, aux moeurs, à la vie sociale, économique et politique des peuples d'Asie qu'à leur spiritualité et à leur culture. Aux Indes et en Chine, il découvre avec émerveillement (mais sans jamais renoncer à exercer son esprit critique) des modes de penser et d'être plus riches et plus efficaces que les nôtres, et surtout radicalement différents. Il trace, avec sympathie et amusement, un portrait pittoresque des Hindous et des Chinois. Toutes ses impressions sont notées avec bonne humeur et désinvolture, et avec un extraordinaire bonheur dans l'expression. C'est sans doute le livre le plus « objectif » et en même temps le plus détendu d’Henri Michaux ; on y retrouve tout de même les thèmes essentiels de son oeuvre poétique et ses préoccupations habituelles.
Il a donné son opinion sur la philosophie, l’écriture, le théâtre, la musique, la calligraphie et la peinture de la Chine.
Son voyage est lié à ses expériences personnelles, à sa famille et au milieu social dont il est issu. En même temps, c'est une révolte non seulement contre la famille mais aussi contre la société. Selon Henri Michaux, la civilisation occidentale n'a plus d'oxygène pour personne. Il voulait parcourir le monde, c'est justement pour s'échapper de la société et d'une certaine civilisation. Il a jeté son regard sur l'Orient et la Chine. En fait, le voyage d'Henri Michaux constitue une manière de révolte contre la tradition. Partir pour l'Orient, c'était, pour lui, une manière de résister à la tradition et à la civilisation occidentale. De ce fait, il voulait aller en Orient chercher la sagesse dans la civilisation orientale. Le voyage en Chine marque un tournant de la création littéraire et artistique d'Henri Michaux et lui laisse un souvenir qui ne s'effacera jamais.
Le voyage de Michaux en Asie lui permet de jouer un rôle important dans sa vie et sa création littéraire et artistique.
Le contact avec Laozi a exercé une grande influence sur lui et lui a laissé une impression ineffaçable. L'observation faite en place lui a donné une impression nouvelle sur la Chine. En Chine, il a observé des Chinois: femmes au travail, enfants qui font leur jeu de signe, vieillards, marchands de journaux, porteurs, etc. Il a vu les saules et la porte de Pékin, le temple des cinq cents bouddhistes de Canton, Grande World de Shanghai. Tout cela lui a laissé de profondes impressions. La Chine a ouvert un nouveau monde aux yeux d'Henri Michaux. Le poète a pu décrire la Chine réelle. Le grain de son voyage en Asie a germé, fleuri et porté des fruits dans ses oeuvres. Sous la plume d’Henri Michaux, la Chine n'est plus un pays imaginaire, mais un pays réel. Deuxièmement, le voyage d'Henri Michaux en Chine a enrichi sa création littéraire. Dès le début des années trente du XXe siècle, de la création d'Un barbare en Asie jusqu'au moment où il a écrit la préface en 1967, son attachement pour la Chine n'a pas du tout changé. Henri Michaux se considère comme un barbare. Il exprime son attitude humble envers la culture chinoise. En tant que poète et peintre, Henri Michaux fait l'exploration de l'art chinois. Son voyage en Chine le fait entrer en contact direct avec la culture chinoise. Ce qui constitue un tournant de sa création littéraire et artistique.
Henri Michaux a décrit la Chine et les Chinois dans les années trente du XXe siècle et fait des commentaires sur les caractères des chinois. Cela constitue une référence tant pour les Occidentaux que pour nous les Orientaux. Nous analyserons l'image chinoise sous la plume d'Henri Michaux. Premièrement, Henri Michaux considère le Chinois comme un peuple laborieux et créatif. Aux yeux d'Henri Michaux, le Chinois a « de la créativité » ; il est « artisanné», « artisan habile ». Il a « intérêt de l'imitation », « génie de symbole » « des doigts de violoniste ». Tout comme ses prédécesseurs, Henri Michaux pense que les Chinois créent tout. Sous la plume d'Henri Michaux, les Chinois expriment leur habileté dans tous les domaines. Henri Michaux a cité une dizaine de techniques pour dire que les Chinois sont ingénieux : utilisateur de bâtonnets, crieur de journaux, porteur, etc. Ce sont des techniques nouvelles pour les Occidentaux.
L'anecdote tirée du Li ji nous raconte que la tyrannie est plus violente que le tigre. Ce qu'Henri Michaus admire, c'est la vertu confucéenne dans l'administration.
Henri Michaux a découvert le goût du Chinois qui a mis son infini, un infini de justesse et de saveur. Dans les choses qui semblent d'abord presque neutres, mais qui se révèlent à lui tout de suite (à nous à la longue) comme d'une douceur déchirante, mystique, le Chinois a mis son infini, un infini de justesse et de saveur. Le jade, les pierres polies et comme humides, mais pas brillantes, troubles et pas transparentes, l'ivoire, la lune, une fleur seule dans son pot de fleur, les petites branches aux ramilles multiples aux feuilles minuscules, maigres, vibrantes, les paysages lointains et pris par un brouillard naissant, les pierres percées et comme torturées, le chant d'une femme affaibli par la distance, les plantes immergées, le lotus, le court sifflet flûté du crapaud dans le silence, les mets fades, un oeuf légèrement avarié, un macaroni gluant, l'aileron de requin, une pluie fine qui tombe, un fils qui remplit ses devoirs filiaux en suivant les rites de façon trop juste, d'une justesse crispante à vous faire évanouir, l'imitation sous routes ses formes des plantes en pierre, aux fleurs crémeuses, aux corolles, aux pétales et sépales d'une perfection agaçante, faire jouer des pièces de théâtre à la Cour par des prisonniers politiques, les y obliger, les délicieuses cruautés et à demi distraites, voilà ce que le Chinois autrefois a tant aimé. Henri Michaux indique la faiblesse des Chinois qui veulent toujours se protéger. Selon Henri Michaux, les Chinois ont des caractères typiques. Ils ont peur de perdre la face. Ils cherchent la protection. Ils n'ont pas tant peur de perdre la face que de la faire perdre aux autres.
Le Chinois n'a pas un élan fou. Une ville chinoise se distingue par ses formidables portes. Ce qu'il faut avant tout, c'est être protégé. Pas trop à l'intérieur de monuments orgueilleux, mais plutôt des portes importantes, fortement assises, destinées à effrayer, où entre aussi du bluff. L'empire chinois se distingue de tous les autres par la Muraille de Chine. Ce qu'il faut avant tout, c'est être protégé. Les édifices chinois se distinguent par leur toit. Ce qu'il faut avant tout, c'est être protégé. Partout, il y a de grands écrans, puis il y a encore des paravents et naturellement les triples labyrinthes. Ce qu'il faut avant tout, c'est être convenablement protégé. Le Chinois n'est jamais abandonné, mais toujours sur ses gardes, il a toujours l'air d'un affilié de société secrète. […].
Ils n'ont pas tant peur de perdre la face, que de la faire perdre aux autres. cette sensibilité, véritablement maladive aux yeux de l'Européen, donne un aspect spécial à toute leur civilisation. Ils ont le sens et l'appréhension du 'on dit'. Ils se sentent toujours regardés… « Quand tu traverses un verger, garde-toi, s'il y a des pommes, de porter la main à ta culotte et, s'il y a des melons, de toucher à tes chaussures. » Ils n'ont pas conscience d'eux, mais de leur apparence, comme s'ils étaient eux-mêmes à l'extérieur et s'observant de là. Le Chinois a une tendance pour la paix et se conforme à la loi du ciel. Henri Michaux a dit ainsi : Quoique guerrière quand ce fut absolument nécessaire, la Chine a été une nation pacifique. « Avec le bon acier, on ne fabrique pas des clous. D'un jeune homme de valeur, ne faites pas un militaire. » Telle est l'opinion publique. Toute l'éducation chinoise pousse tellement au pacifique, que les Chinois étaient devenus lâches (pour quelque temps) et avec le plus grand sans-gêne. […]. L'ardeur naturelle, le sang piquant et la combativité naturelle échappent au Chinois. La Chine est si essentiellement pacifique qu’elle est pleine de bandits. Si le peuple chinois n'était pas tellement pacifique, il prendrait les armes, coûte que coûte il mettrait de l'ordre. Mais non. Sous la plume d'Henri Michaux, le Chinois aime beaucoup la lumière artificielle, les lanternes huilées, qui, comme la lune, n'éclairent bien qu'elles-mêmes, et ne projettent aucun rayon brutal. « Un rien froisse le Chinois. » Il a dit ainsi : La lune lui plaît, à laquelle la femme chinoise ressemble étonnamment. Cette clarté discrète, ce contour précis lui parle en frère ? D'ailleurs, beaucoup sont sous le signe de la lune. Ils ne font aucun cas du soleil, ce gros vantard, ils aiment beaucoup la lumière artificielle, les lanternes huilées, qui, comme la lune, n'éclairent bien qu'elles-mêmes, et ne projettent aucun rayon brutal. Henri Michaux a cité encore des exemples : le saule, arbre chinois par excellence, clair de la lune, etc. Sous la plume d’Henri Michaux, c'est ce que les Chinois aiment le plus. Il a indiqué le caractéristique des Chinois qui aiment beaucoup la lune.
C'est la conception du Vide qui attire Henri Michaux. Les arts chinois ont donné une considération et un langage nouveaux à Henri Michaux qui reflète, d'une manière particulière, la perplexité de l'homme devant la société d'aujourd’hui.
Henri Michaux est un grand artiste. Il adore les arts chinois. Dans les années trente, il a rencontré une culture différente de celle de l'Occident de sorte que ses idées ont tout à fait changé, et surtout dans les arts. Il a découvert aussi la caractéristique commune dans les art chinois. C'est la sagesse du Vide révélée dans toutes les formes artistiques. Son admiration pour le moyen de représentation du théâtre chinois, sa connaissance sur le rôle et la fonction de la musique chinoise, son appréciation pour l'écriture chinoise, sa pratique de la peinture à l'encre, tout cela inspire Henri Michaux dans sa quête de la sagesse et de l'esprit esthétique.
Dans Un Barbare en Asie, Henri Michaux a pris trois genres de l'art oriental pour exemples. Il a dit à François Cheng que ce qui le retenait, c'était la musique de Java, la danse de l’Inde et le théâtre chinois.
En parlant de la présentation de l'acteur, Henri Michaux a dit : « S'il a besoin d'un grand espace, il regarde au loin, tout simplement ; et qui regarderait au loin s'il n'y avait pas d’horizon ? Quand une femme doit coudre un vêtement, elle se met à coudre aussitôt. L'air pur seul erre dans ses doigts ; néanmoins (car qui coudrait de l'air pur ? ) » Aux yeux d'Henri Michaux, le théâtre européen est trop réaliste, « tout est là, sur scène. » Dans le théâtre chinois, « Le spectateur éprouve la sensation de coudre, de l’aiguille qui entre, qui sort péniblement de l'autre côté, et même on en a plus la sensation que dans la réalité, on sent le froid, et tout. Pourquoi ? Parce que l'acteur se représente la chose. »
C'est le théâtre chinois qui attire le plus Henri Michaux. La caractéristique du théâtre chinois consiste à peindre à grand trait dans le contenu et la forme. La transformation du temps et de l'espace, le façonnage des personnages, les rapports triangulaires avec les acteurs, les rôles qu'ils jouent et les spectateurs sont tout à fait différents de ceux du théâtre occidental qui décrit de façon réaliste.
En ce qui concerne la musique, c'est une sorte d'art que Henri Michaux aime beaucoup. Il s'est intéressé à la musique très tôt. Au début des années vingt du XXe siècle, il est frappé par la musique de Stravinski dont l'esprit moderne ouvre un nouveau domaine aux yeux d’Henri Michaux. Il s'intéresse aussi à la musique chinoise. Henri Michaux écoute souvent la musique chinoise. Quand René Bertelé, critique de renom, lui a fait visite, Henri Michaux lui a fait écouter la musique chinoise. Henri Michaux admire la musique chinoise. Il a dit : « Peu d'Européens qui aiment la musique chinoise. Cependant, Confucius, qui n'était pas un homme porté à l'exagération, tant s'en faut tellement pris par le charme d'une mélodie qu'il resta trois mois sans pouvoir manger. » Ici, Henri Michaux est surpris de la manière de Confucius devant la musique. « C'est la musique chinoise qui me touche le plus. Elle m'attendrit. » « Comme cette mélodie est bonne, agréable, sociable. Elle n'a rien de fanfaron, d'idiot, ni d'exalté, elle est tout humaine et bon enfant, et enfantine et populaire, joyeuse et « réunion de famille ». » Henri Michaux a fait attention à la fonction de la musique chinoise.
Pour Henri Michaux, la musique chinoise a une autre fonction, celle de la catharsis. Henri Michaux a dit : « Et de même que certaines personnes n'ont qu'à ouvrir un livre de tel auteur et se mettent à pleurer sans savoir pourquoi, de même quand j'entends une mélodie chinoise, je me sens soulagé des erreurs et des mauvaises tendances qu'il y en moi et d'une espèce d'excédent dont chaque jour m'afflige. » Henri Michaux dit : « La musique chinoise me frappe, m'attriste. » Il observe que la musique chinoise est « la plus paisible, la plus frappante », « Qui n'a pas entendu Mei Lanfang, ne sait pas ce que c'est que la douceur, la douceur déchirante, décomposante, le goût des larmes, le raffinement douloureux de la grâce. » Ce qui frappe Henri Michaux, C'est justement la douceur de la musique chinoise. Mei Lanfang fut rénovateur de l'opéra de Pékin. Il chantait des rôles de femmes jusqu'à un âge avancé. En 1930, Mei Lanfang a fait visite et représentation en Amérique et remporté de grands succès. Après la visite en Amérique, il a visité Pologne, France, Belgique, Italie, Angleterre etc. Retourné en Chine, il fait représentation à Pékin et à Shanghai. Pendant cette période, Henri
Michaux a eu l'occasion de voir la représentation de Mei Lanfang. La musique dont Henri Michaux parle est celle du théâtre chinois. Mei Lanfang ne chante que deux morceaux ponctués par des gestes, alors que l'héroïne qu'il incarne visite douze kiosques. Pendant cette promenade, la galerie décorée, le bassin, les ruines, le pavillon des pivoines, les azalées, les oiseaux, tout n'existe que par l'interprétation du comédien et par l'imagination du public. L'Être naît du vide. Dès que Mei Lanfang s'arrête, tout a disparu, la scène est vide. Sur ce point, Henri Michaux a dit ces mots : « Je retrouvais, je comprenais mieux à présent cette pensée chinoise qui m'avait autrefois tant surpris : « La musique est faite pour modérer. »… mais j'avais mal retenu. Elle dit, la pensée de Yo-ki : « La musique est faite pour modérer la joie. » La joie ! Elle serait donc si immense ! Ici certes elle ne l'était pas, c'était tout l'être devenu expressif par les heures atroces, qu'il fallait modérer. »
Dans Passages, Henri Michaux a dit : « Cet art devait être particulièrement étudié par les Chinois, peuple particulièrement sensible au phénomène de l'imitation et dont la morale dès avant Confucius et même avant Sema Ts'ien [Sima Qian] est une morale d'exemples, de valeurs à reproduire, à copier. Solennellement, les empereurs de Chine d'autrefois donnaient le Jour de l'An la note sur laquelle, pendant toute l'année à venir, l'Empire devait être accordé, harmonisé, tenu dans l'union.
Henri Michaux a peint quantité de tableaux avec l'encre de Chine. Il consacre sa vie à l'écriture et à la peinture pour être en harmonie avec tout et avec Tao. Ce qu'Henri Michaux admire, c'est l'effet de la peinture chinoise où règne la nature.
13 1933
Michaux, Henri. « Vient de paraître » (Gallimard).
Er schreibt : L'auteur de ce livre, étant enfant, allait dans le jardin observer les fourmis. Il les mettait sur une table, ou lui-même s'allongeait par terre, se mettant à leur niveau. Ce voyage dura des années pendant lesquelles il ne fut guère intéressé par autre chose. Cette fois l'auteur a été en Chine et aux Indes, et aussi, quoique moins longtemps, à Ceylan, au Japon, en Corée, à Java, à Bali, etc.
Il n'y a pas observé les fourmis, qui cependant abondent, mais les races humaines. Comme il est naturel, il s'est tenu à l'écart des Européens, et a tenté de disparaître dans la foule étrangère. Henri Michaux a participé à des activités artistiques. Il admire le théâtre, la musique et la danse orientaux. Il lit beaucoup et s'intéresse à la langue et à l'écriture des pays orientaux. Il a attrapé des poux dans tous les théâtres d'Asie. Il connaît, pour y avoir été quantité de fois, le théâtre chinois, japonais, hindoustani, bengali, coréen, malais, javanais, etc., il a vu les films japonais, chinois, bengali, hindoustani. Il a entendu la musique, vu les danses indigènes. Il a assisté aux prières, il s'est approché des temples, des lieux saints, des prêtres de toutes les religions. Il a lu ou bien relu les écrits des philosophes, des saints et des poètes, il a étudié ou parcouru la grammaire de chaque langue et son écriture. Enfin et surtout il a regardé 'l’homme dans la rue', comment on rit, comment on se fâche, comment on marche, comment on fait signe, comment on commande, et comment on obéit, les intonations, la voix, les attitudes, les réflexes (tout ce qui ne ment pas). Il s'est ainsi enfoncé dans la peau des autres. Toutefois, dans la peau du Chinois, il reste lui-même et souffre et regimbe. Il souffre dans la peau de l’Hindou, il souffre d'être homme et de ne pas trouver la Voie. Et tout en souffrant il montre de l'humour, comme on fait, comme tant d'autres ont fait…
14 1933
Cao Yu schreibt seine B.A.-Arbeit über Henrik Ibsen.
15 1933
Yuan, Muzhi. Zhongguo ju zuo jia ji qi zuo pin. 中國劇作家及其作品 [Chinese Playwrights and Their Works].
Er schreibt : Ding Xilin's witticisms and his philosophy of relations between sexes are greatly reminiscent of the aestheticism of Oscar Wilde. His plays are all similarly set in beautiful drawing rooms, his characters chewing on tobacco pipes as they sit sunk in comfortable sofas. We call upon the author to move from aestheticism to materialism, out of the Salon and into society at larg.
16 1933
Lu, Xun. Six essays in defense of Bernard Shaw [ID D27925].

Lu, Xun. Song xiao. (Febr. 15 1933). [In praise of Shaw]. In : Lu, Xun. Wei zi you shu. (Shanghai : Qing guang shu ju, 1933). 偽自由書
= He, Jiagin. "In praise of Shaw". In : Shen bao ; Febr. 7th (1933).
Before Bernard Shaw's arrival, the Da wan bao [Shanghai Evening News] anticipated that Japanese troops in North China would suspend their aggression in deference to Shaw and called him "Old Man Peace." However, after the publication of the translation of the Reuters dispatch of Shaw's speech to the Hong Kong young people, it condemned Shaw for making "Communist propaganda." According to the Reuters report of 11 February 1933, Shaw had remarked that the Reuters reporter did not look Chinese to him and was surprised that there was not a single Chinese among those present. "Are they so ignorant that they have not heard of me?" he asked. Actually we are not ignorant. We understand quite well the benevolence of the Hong Kong governor, the regulations of the Shanghai Municipal Council, the friends and enemies of certain celebrities, as well as the birth- days and favorite dishes of the wives of public figures. But about Shaw, sorry, we only know the three or four titles of his that have been translated.
Thus, we do not know his thoughts before or after the European War, or his thoughts after his Russian trip. But according to a Reuters report of 14 February from Hong Kong, he said to the students of Hong Kong University, "Should you not be a Red revolutionary before the age of twenty, you will end up a hopeless fossil by fifty; should you be a Red revolutionary by twenty, you may be all right by forty," so you know that he is great. What I call greatness lies not in his asking our people to become Red revolutionaries. Our peculiar national condition does not allow one to be Red. Merely declaring oneself a revolutionary could lead to losing one's life the next day. There is no way to see a Red live to forty. I call Shaw great because he thought of our youths' future, when they will have reached forty or fifty, and he did not lose sight of their present either. The wealthy with their future in mind can hide their riches in foreign banks and leave China by airplane. But the poor, in a country where politics are whirlwinds and the people the hunted deer, hardly dare or are able to think about tomorrow. So, how can they think twenty or thirty years ahead ? This is a simple, yet big question. This is why Shaw is Shaw !

Lu, Xun. Xiao Bona jiu jing bu fan. In : Da wan bao (Febr. 17 1933). [Bernard Shaw is truly unusual]. In : Lu, Xun. Wei zi you shu. (Shanghai : Qing guang shu ju, 1933). 偽自由書
There is nothing so bad or so good that you will not find Englishmen doing it ; but you will never find an Englishman in the wrong. He does everything on principle. He fights you on patriotic principles ; he robs you on business principles ; he enslaves you on imperial principles ; he bullies you on manly principles ; he supports his king on loyal principles and cuts off his king's head on republican principles. His watchword is always Duty ; and he never forgets that the nation which lets its duty get on the opposite side to its interest is lost.
This is Bernard Shaw's satirical critique of British society in his The Man of Destiny. It is quoted here by way of introducing him and to let our readers know the secret to becoming great. Satire fills his works, embarrassing its victims and delighting its onlookers; the popularity of these smart lines has established Mr. Shaw. Becoming famous by promoting "isms" is the trend among today's scholars. Shaw has a talent for satirizing Englishmen, though not much talent for evaluating himself. He is at the forefront of pacificism and a lifelong supporter of socialism; his plays, novels, and essays are full of exposition of his doctrines. Though he believes in socialism, he is a mean accumulator of material wealth, as well as a strong denouncer of charity. As a consequence, he has already become a millionaire sitting on immense wealth. Shaw sings the tune of equalizing wealth, speaks up for oppressed workers, and makes sarcastic remarks about parasitic capitalists ; for these he wins the sympathy of the public. When a new book of his is out, all rush to buy it. When one of his plays is presented, it usually runs for a hundred or more performances - he never has to worry about box office sales. Shaw promotes Communism by sitting in an easy chair with smiling complacency. Gaining fame by isms is like displaying a sheep's head yet selling dog meat to cheat buyers. What a deception ! Shaw is very successful and now has come to our poor China to enjoy himself. We thank him for his enthusiasm in advising our young people : in Hong King he told students, "Should you not be a Red revolutionary by twenty, you will end up a hopeless fossil by fifty; should you be a Red revolutionary by twenty, you may be all right by forty." In other words, the reason for being a Red revolutionary is out of fear of becoming a fossil or a dropout rather than for the principle itself, which certainly has very little to do with the future of the individual. To become something in society, one merely has to avoid being petrified or falling behind. How can this famous piece of advice on social behavior, so boldly expressed, not make us reverent toward Shaw the modern-day Confucius ? But Mr. Shaw, don't you look down upon our venerable China. Not that we don't have fashionable scholars like you in our country, sitting in easy chairs and casting sarcastic remarks to propagate isms. This is familiar enough to us, and there is no need for your advice. But had you known this, I imagine you would have merely smiled with delight and said, "I am not alone on this path." According to our humble understanding, the important element of a great personality is honesty. Whatever doctrine one may believe in, one must honestly practice it, not just mouth it and make it sound good. If Mr. Shaw or his compatriots really believe in Communism, please let him distribute his wealth first, then talk. But, come to think of it, if Mr. Shaw were actually to distribute his property, clothe himself in ragged proletarian garb, and come as a third-class passenger to China, then who would take the trouble to see him ? When we think about it this way, Mr. Shaw is truly unusual.

Lu, Xun. Qian wen de an yu. [A footnote to the foregoing essay by Le Wen]. In : Lu, Xun. Wei zi you shu. (Shanghai : Qing guang shu ju, 1933). 偽自由書
The foregoing essay makes several important points: First, Shaw's sharp sarcasm, effective in "embarrassing its victims and delighting its onlookers," is merely a trick to achieve "greatness." Second, this trick of "becoming famous by promoting isms" is equivalent to displaying a sheep's head, but selling dog meat instead. Third, the Shanghai Evening News seems to say that, in principle, one must either sing praises without restraint or open up one's cannibalistic big mouth to swallow one's fellow men; whether one drops out of the rank and file or becomes a fossil at the age of fifty is of no consequence. Fourth, if Bernard Shaw does not agree with these principles, he ought not to sit in his easy chair nor possess any property. Of course, it would be a different story if he did. Yet, even the rottenness of China has reached such a degree that within the class of petty bourgeoisie, people still love the future and do not care to drop out. They march toward the road of revolution. They utilize every posssible personal ability to assist earnestly in the building of revolution. Though previously supporting capitalist connections, they now consciously are transforming themselves into rebels against the bourgeois class, and rebels are often more troublesome than enemies. Their attitude is that, when you are endowed with a million-dollar estate or world-wide prestige and you still rebel and still feel dissatisfied, you are utterly contemptible. So Shaw is contemptible. Fishing for fame by promoting doctrines, as they say, is loathsome philistinism, typical materialism. So Shaw is contemptible. However, you and I know that Bernard Shaw does not belong to these categories, even though he is despised by these critics. The Shanghai Evening News has also mentioned that China, too, has those who "sit in easy chairs and cast sarcastic remarks to propagate isms, . . . there is no need for your [Shaw's] advice." This similarity be- tween China and the West is so obvious to the editorial writer that it seems to need no elaboration, but none of us were ever aware of the existence of these armchair critics. The pity of it is that although cannibalism has been adopted by our ruling class for quite some time, it still has no supporters with Shaw's status. Alas! As for Shaw, his greatness has not been diminished in the least by the loathing of his embarrassed victims. Hence I say good riddance to the troublesome but obsequious literary men in Chinese history who allowed their property to be confiscated by their rulers.

Lu, Xun. Shui de Mao Dun ? (Febr. 19 1933). [Who is being contradictory ?]. In : Lu, Xun. Nan qiang bei diao ji. (Shanghai : Tong wen shu dian, 1934).
Bernard Shaw enjoys not so much cruising about the world, but rather observing journalists' faces around the world. Here in China, they set oral trials for him, and he seems to have failed the ordeal. He was unwilling to accept ceremonial welcomes, but they welcomed him and interviewed him anyway. After the interviews, all made cutting remarks about him. He evaded and hid; they spied and tracked him down. They wrote up a storm about him, then accused him of angling for publicity. They pressed him to talk when he was not in a talking mood, and they egged him on to make speeches. When he complied, the papers would not print exactly what he said and blamed him for being verbose. When he was telling the truth, they said that he was joking. They laughed at him and blamed him for not laughing himself. When he was telling the truth, they obstinately called it sarcasm; they laughed at him and blamed him for conceit. He is not a satirist at heart, but they accused him of being one and looked down on him; then they themselves used sardonic remarks to needle him. He is not an encyclopedia, yet they put trivial queries to him. His answers made them cross, as if they certainly knew better than he. He came with the intention to relax, but they forced him to philoso- phize. After listening to a few words, they were displeased and accused him of coming with the intent "to propagate Communism." Some despised him because he is not a Marxist writer. Were he one, they would not have given him a second glance. Some resented him because he has never engaged in manual labor. Were he a laborer, he would not have been able to visit Shanghai, and they would have had no chance to see him. Some looked down on him because he is not a practicing revolutionary. Were he one, he would have been jailed with the Noulens, and they would have avoided mentioning his name. He has money but he favors socialism. He does no labor and he travels. He came to Shanghai, talked about revolution, talked about Soviet Russia, and purposely gave people no peace. Therefore, he is contemptible. He is contemptible because he is tall. He is contemptible because he is old. He is contemptible because his hair and beard are white. He is contemptible because he does not appreciate ceremonial welcomes and avoids interviews. Even his affectionate relationship with his wife be- comes contemptible. But now he has left China, a Shaw who all agree is a contradiction. I think that we must swallow our pride and accept him as a literary giant of world renown, for our mumbling and backbiting are not going to hurt his image one bit. Furthermore, his visit gives us an excuse to grumble. When the contradictory Shaw declines, or the contradictions of Shaw are resolved, that will mark the time when the contradictions of the world are resolved. That will be the day.

Lu, Xun. Kan Xiao he kan Xiao de ren men. (Febr. 23 1933). [Watching Shaw and those who watches Shaw]. In : Lu, Xun. Nan qiang bei diao ji. (Shanghai : Tong wen shu dian, 1934).
I like Shaw, not because of my reading of his works or his biography, but because I came across some of his epigrams and heard that he often tears the masks off people. That is why I like him. Furthermore, many Chinese who ape Western gentlemen do not like Shaw, and I find that those who are disliked by those whom I dislike are often excellent men. Now Shaw has come to China. I had no special intention to search him out, but on the afternoon of 16 February 1933, Uchiyama Kanzo showed me a telegram from the Tokyo office of Kaizo magazine and asked me to meet Shaw. Since I was needed, I decided to go. On the morning of the seventeenth, Shaw was to have landed in Shanghai, but no one knew where he was hiding himself. Haifa day passed and it appeared that our meeting was not to materialize. However, by that after- noon, a note from Mr. Cai Yuanpei told me that Shaw was having lunch at the home of Madame Sun Yat-sen, and that I was to come forthwith. I got there as soon as I could. Upon entering a small side-room off the living room, I spotted Shaw in the seat of honor at a round table having lunch with five others. Since I had seen photographs of Shaw as a famous man, I knew right away that this was the literary giant. However, there was no special aura of eminence. His snow-white hair and beard, ruddy complexion, and kindly face made me think to myself that he would be an excellent model for a portrait painter. They seemed to be halfway through lunch already. It was vegetarian and very simple. A White Russian newspaper had speculated that there would be a plethora of waiters on such an occasion; in fact, there was only the cook serving. Shaw did not eat much, but he may have started early and therefore had had enough. Midway through the meal, he attempted to use chopsticks, but was not very successful. To his credit, he kept working at it, and soon became rather adept. When he finally got hold of a morsel tightly, he looked from face to face expectantly, but few, unfortunately, observed his success. I did not particularly notice Shaw's satiric traits as we were eating. His conversation topics were the usual things. For example, he mentioned that friends are the best because a lasting relationship can be maintained with them, whereas parents and siblings are not of one's own choosing, so a distance has to be kept. After lunch, three pictures were taken. Standing next to Shaw, I became aware of my shortness. I thought to myself that, were I thirty years younger, I would exercise rigorously to make myself taller. At about two o'clock, the P.E.N. Club was giving a reception. I went along by car. It was held in a large Western-style building called World College. Upstairs, about fifty men of letters, writers of Ethnic Literature, socialites, the king of Peking opera, and so forth had already gathered. They surrounded Shaw and asked him sundry questions as if consulting the Encyclopedia Britannica.
He responded with a few words: "You are all men of letters, hence you are familiar with publicity stunts. The actors among you are practitioners, so you understand these things more than a mere writer such as I. What do I have to say to you? This gathering today is like your visiting an animal in a zoo. Now that you've seen it, it should be enough." Everyone laughed, probably considering it to be satire. Shaw also addressed questions to Dr. Mei Lanfang and other celebrities, which I shall omit. There followed a ceremony to present Shaw with gifts. These were presented by Shao Xunmei, a literary man known for his handsome looks. One gift was a box of small, stylish Peking opera masks made of clay. Another, as I was told, was a stage costume; since it was wrapped in paper, I did not see it. Shaw cordially accepted. According to a later report by Mr. Zhang Regu, Shaw asked a few questions about the gifts and Zhang made some snide remarks, but Shaw did not appear to hear them, and neither did I. Someone asked Shaw his reasons for being a vegetarian. By then, many had started taking pictures. Figuring that my cigarette smoke would not be welcome, I went into the outer room. Since there was another scheduled interview with news reporters at Mme Sun's house at three o'clock, we returned there. Forty or fifty people had already gathered, but only half of them were let in. First came Mr. Ki Kimura and four or five writers. Among the reporters were six Chinese, one English, one White Russian, and three or four photographers. On the backyard lawn, they formed a semicircle around Shaw and again barraged him with detailed questions. Shaw seemed in no mood to talk, but if he would not the reporters would not let him go, so he talked. The more he said, the less the reporters wrote down. In my opinion, Shaw is not really a satirist at all. It is just that he is gifted in eloquence. The quiz ended at about four-thirty. Shaw looked very tired, so Mr. Kimura and I returned to Uchiyama Bookstore. The press releases of the next day were far more colorful than Shaw's own words. The reporters, who had all gathered at the same place, at the same time, and heard the same words, managed to report disparate stories. It was as if the English language that Shaw had uttered had transformed itself. For example, on the topic of the Chinese govern- ment, the Shaw of the English language press said that the Chinese must choose their own favorite man as the leader; the Shaw of the Japanese press said that there was more than one Chinese government; and the Shaw of the Chinese press said that the people had never appreciated their government, no matter how good it was. In this case, we see that Shaw is not a satirist, but a reflective mirror. Most of the news reports on Shaw were unfavorable. Reporters came to hear what they wanted, but also heard disagreeable sarcasms. So each threw barbs at Shaw, saying that he was a mere satirist. In the sarcasm competition, Shaw is the winner, in my opinion. I asked Shaw no question, and he asked me none. Nevertheless, Mr. Kimura wanted me to write my impression of Shaw. I have read reports by others who seem to know the very heart of the one interviewed at a glance; I admire their penetrating observations. As for myself, I have never studied any books on physiognomy, so even when I have met a famous man, I cannot relate a great many words about him. However, since the request came all the way to Shanghai from Tokyo, I must at least write this much to fulfill my obligation.

Lu, Xun. Xiao Bona zai Shanghai xu. (Febr. 28 1933). [A preface to Bernard Shaw in Shanghai]. In : Lu, Xun. Nan qiang bei diao ji. (Shanghai : Tong wen shu dian, 1934).
Nowadays, so-called humans are covered with some type of wrap, be it silk, brocade, flannel, or coarse fabric. Poor beggars wear at least pants, ragged though they be. Even primitives have a string of leaves to cover themselves. Should this covering be removed in public by the wearer or torn off by others, a man would not be considered proper. Improper though he may be, people still like to look. Some stand to watch; others follow him around. Ladies and gentlemen cover their eyes with their hands, but peek through their fingers. They want to see the nakedness of others, however careful they are about their own wraps. The words of men are also wrapped in silk, brocade, or tree leaves. Should the wraps be torn off, people want to listen and, at the same time, fear to hear. Out of curiosity, they surround the speaker; out of trepida- tion, they try to soften the effect by dubbing him a satirist. I believe this is the reason that Bernard Shaw's arrival in Shanghai caused a far greater stir than that of Tagore, not to mention Boris Pilnyak and Paul Morand, because Shaw's speeches are unwrapped. An- other reason is that tyranny turns men into cynics, but that is the worry of the English, not of the Chinese, a people traditionally trained to be mute. Yet, times are different after all. Chinese people now will listen to a foreign satirist for "humor" and for a few laughs. But one must guard his own wraps, and each has a different wish. The lame wanted Shaw to support the use of canes; the scabby-headed wanted him to support wearing hats; women who wear makeup wanted him to ridicule those who do not; and the writers of Ethnic Literature expected him to crush the Japanese troops. What is the result? From the number of complaints we know of, not very satisfactory, it seems. But the greatness of Shaw also lies here. Although newspapers owned by the English, Japanese, and White Russians fabricated different stories, in the end they attacked him in concert, which only proves that Shaw is not to be used by any of these imperialists. As for some Chinese newspapers, their standpoint is hardly worth mentioning since they are the followers of their overseas lords. This habit has existed for a long time; only when it comes to "nonresistance" or "strategic retreats" do they march in the front. Shaw was in Shanghai for less than a day, yet he gave rise to many stories. This would not happen with any other literary man. As it is not a trivial matter, the compilation of articles on him surely is important. In the first three parts, the different faces of writers, politicians, warlords, and lapdogs are reflected as in a flat mirror. Calling Shaw a concave or convex mirror [both distort reality] is not accurate. In the wake of the stir reaching Peking, British reporters drew the conclusion that Shaw did not like having the Chinese welcome him. A Reuters report of the twentieth said that the amount of Peking papers' coverage of Shaw was "enough to prove the callousness of the Chinese." Dr. Hu Shih, especially detached, said that no welcome was the highest form of welcome. The same reasoning applies to "To beat is not to beat, and not to beat is to beat." These events make me feel that I am looking at reflections in a mirror in which men, whatever their pretensions, are all revealed in their true nature. The articles about Shaw in Shanghai, though the writers are less skilled in writing than the foreign reporters and Chinese scholars of Peking, do present variety. The collection has its limits; some articles may have been left out and others may have appeared too late for inclusion, but by and large most are included.

Lu, Xun. Lun yu yi nian. (Aug. 23 1933). [On the anniversary of the "Analects" : another occasion to talk about Bernard Shaw]. In : Lu, Xun. Nan qiang bei diao ji. (Shanghai : Tong wen shu dian, 1934).
The journal Analects has reached its first anniversary, and its editor, Mr. Lin Yutang, has asked me to write a piece about it. This is like having to asked me to write a piece about it. This is like having to write an old-fashioned "eight-legged essay" in the vernacular under the assigned title "Xue er." Impossible though this may be, write I must. To tell the truth, I am often against what Lin promotes. In the past, he has promoted "fair play," and now "humor." I believe that humor is a plaything created by those who are in favor of holding international roundtable conferences. The meaning of the word "humor" is impossible to translate into Chinese. In our country, there were Tang Bohu, Xu Wenchang, and the most famous Jin Shengtan. Jin said once, "Beheading is painful, yet I have arrived at it unexpectedly. Is that not marvelous?" Whether this quotation is truth or joke, fact or fiction, at all events it shows that, first, Jin Shengtan was not a rebel and, second, that he converted the cruelty of butchering into a laughing matter. He made a happy ending of a sad fact. This is the kind of thing we have, but it has nothing to do with humor. In the pages of Analects, there is a long list of names, but very few of these people actually contributed any writings to it. This is the custom in China, to lend one's name, but not one's labor, to a cause. Hence actually publishing two issues a month of "humor" is quite humorous. This humor gives me a pessimistic feeling, though I do not care much for it and I have not been enthused about the Analects. But its Special Issue on Shaw is a good thing. In it, articles rejected elsewhere have been printed, thus exposing twisted remarks about Shaw's speeches. This undertaking has made a few well-known figures unhappy, and some bureaucrats angry and disgruntled. The longer they hate it and the more the people hate it, the more the influence of this Special Issue is proven. Shakespeare may be the English bard of drama, but few of us ever mention him. When Ibsen was introduced to China during the May 4th Movement of 1919, he fared quite well. This year, Shaw's arrival has been a disaster. Even today there are people who are still indignant about him. It is probably because Shaw smiled. Who can tell the meaning of his smile ? Did he smile sarcastically or amusedly? No, it was neither. Was his smile filled with barbs which pierced the viewers' vulnerable parts? No, it was not that either. Litvinov explained that Ibsen was a great question mark, while Shaw was a great exclamation point. Needless to say, Ibsen and Shaw's audiences are mostly upper-class ladies and gentlemen, those concerned with maintaining "face." Ibsen, though he puts them on stage and exposes their weaknesses, offers no conclusions. He deliberately says, "Come, think about it. Why is it this way?" The dignity of the audience is shaken, but it is allowed to return home to contemplate, so it saves people "face." Whether people indeed contemplate or what it is they contemplate is not the issue. Therefore, when Ibsen was introduced to China, public tranquility was undisturbed, and those against him were far fewer than those who enjoyed him. This is not the case with Shaw. Shaw also puts upper-class folks on stage, but he tears off their masks and their finery, and then he grabs one by the ear and points him out to the audience saying, "Look, here is a maggot!" He does not give them the chance to evade or cover up. At this moment, those who can still smile are the lower-class members who do not have the shortcomings he points out. Hence, Shaw is closer to the lower and further from the high and mighty. What is to be done ? There is an ancient way to counteract, which is simply to yell as loudly as one can: He is wealthy! He is pretentious! He is famous! He is tricky! or at least the same as, or worse than, they are. If they themselves live in a cramped latrine, they believe that Shaw too lives in such a place, or must have climbed out of a large one, but is a maggot nevertheless. They believe that those who introduced him are stupid and those who praised him are hateful. Yet I think that even if Shaw were a maggot, he would be an extraordinary maggot, just as among many exclamation points, he is a great point. For instance, there is a certain crowd of maggots, whether they call themselves ladies and gentlemen, writers and scholars, politicians or celebrities, who nod to one another, bow to one another, and all is in peace. But then they are all common maggots. Should there be one who suddenly jumps out and shouts, "We are actually mere maggots!" then, though he too is from a latrine, we have to admit that he is an exceptional maggot. Even maggots vary in size and quality. The theory of evolution was proposed by Charles Darwin, who let us know that our distant ancestors were related to the monkeys. The behavior of these ancients was exactly the same as that of humans today, yet today's beings deride Darwin as a monkey. Dr. Lo Guangting's experiment of natural creation of the species at Sun Yatsen University has not been conclusive, so suppose we just accept the theory that man is a relative of the monkey, undignified though it may be. Among the relatives of the monkey, Darwin cannot but be the greatest. Why ? Because though he believed that, he did not make it taboo to point it out. Rela- tives of the monkey also vary in size and quality. Darwin was good at research but not at making cutting remarks; hence he was laughed at by upper-class gentlemen for half a century. The one who defended him was Thomas Henry Huxley, who called himself Dar- win's bulldog. Huxley, with his profound learning and excellent writing, attacked and demolished the last citadel of those who considered them- selves the descendants of Adam and Eve. The denunciation of calling a man a dog is currently in vogue. But even dogs vary : some eat meat, some pull sleds, some work in the military, some help in police work, some race in the Zhang Garden's racecourse, some follow beggars as their masters. How does a lapdog which gives pleasure to the wealthy compare with a Saint Bernard who rescues the distressed in snow? Huxley was a good dog who benefited mankind. Dogs vary in size and quality too. In order to comprehend, one must first distinguish. Lin Yutang said once, "Humor is something in between cleverness and dignity." Without distinguishing between cleverness and dignity, how does one understand the "in between"? Although we have been branded as the disciples of Confucius, in fact we are the followers of Zhuangzi. Zhuangzi said in his work, "That view involves both a right and a wrong, and this view in- volves also a right and a wrong." So why does one bother to distinguish them? Did Zhuangzi dream about being a butterfly, or did the butterfly dream about being Zhuangzi ? Dreaming and waking, too, are indistinguishable. Life must be chaos. Should chaos be made sensible, life would be no more. Zhuangzi said, "At the end of seven days Chaos died." In chaos, is there a place for an exclamation point ? There is no place for a smile either. The headmasters of the old-fashioned schools never allowed students to show a trace of anger, sad- ness, or gladness. Despots did not smile. Slaves were not allowed to smile. Once they were to smile, they might progress to anger and stir up trouble. Today those who live on royalties of writing dare to make only sad or sarcastic remarks. This shows you that there is no humor in China. This also shows that my pessimism regarding Analects is not due to oversensitiveness. If those having royalty income make only pitiful noises, can we expect those who must live with the dangers of bombing and floods to have a sense of humor ? I am afraid that they make no sound of sadness or sarcasm, not to mention that of a prosperous time. In the future, some of us may be present at a conference roundtable, but we will be the guests. In that case, between host and guest, no humor is necessary. Gandhi refused to eat time and again. Newspapers of his host country suggested that he deserved a whipping. This shows that in India there is no "humor" either. The most severe whipping given to a host country was by Bernard Shaw. For that, some of our Chinese ladies and gentlemen dislike him. This to Shaw is like the case of Jin Shengtan, arriving at a treatment totally unexpectedly. But that would make a good source for a new magazine, Filial Piety, since piety agrees with the ways of our bureaucrats, especially toward their foreign lords. The titles of the Confucian classics, The Golden Mean, The Great Learning, and now the Analects, have been adopted as modern magazine titles. Eventually, Filial Piety must also be put out. Should that happen, the next after could be entitled Zuo zhuan [The Leftist Biography]. In the present situation, how can Analects prosper? Twenty-five issues is good enough for us to say, "What a joy!"
17 1933
Yu, Dafu. Xiao Bona yu Gaoersihuasui. In : Shen bao ; 2 Febr. (1933). [Shaw and Galsworthy].
萧伯纳与高尔斯华绥
Er schreibt : "While we are preparing for the warm welcome of the long-faced prophet Old Mr Shaw, unfortunately we heard about the death of last year's Nobel Prize winner Galsworthy. Shaw is 76, Galsworthy 65. Although comparatively he came from the upper class, we could not help respecting highly his attitude of speaking for humanity and criticizing society, even now when the time is different and the tides are changing rapidly. At first, Shaw seems to be speaking dead words flippantly. But when one closes his eyes and reconsiders, he will find immediately that all his roguish laughter and angry words are cardiac stimulants aiming at social disease."

Kay Li : Yu went on to compare Shaw with Galsworthy, Galsworthy was regarded as a 'detail recorder of British upper class society'. The writer was respected in China because of his social criticism. The writer was respected in China because of his social criticism. Shaw was appreciated for humor and social criticism. Shaw also was associated with socialism. His visit to the U.S.S.R. and his meeting with Stalin were mentioned, quoting Shaw's words, "I studies Marx much earlier than Lenin".
Notice from the editor : "The world-famous Irish humourist-satirist Mr Bernard Shaw will visit our country in the middle of next week. This section [of Shen bao] intends to have a 'special issue on Bernard Shaw' on the day when Shaw arrives at Shanghai. We welcome any contributions on the criticism, the life and works of Shaw. Please limit your article to 600 words."
18 1933
George Bernard Shaw's visit to China.
Febr. 2th

Yu, Dafu. Xiao Bona yu Gaoersihuasui. In : Shen bao ; 2 Febr. (1933). [Shaw and Galsworthy]. 萧伯纳与高尔斯华绥
Er schreibt : "While we are preparing for the warm welcome of the long-faced prophet Old Mr Shaw, unfortunately we heard about the death of last year's Nobel Prize winner Galsworthy. Shaw is 76, Galsworthy 65. Although comparatively he came from the upper class, we could not help respecting highly his attitude of speaking for humanity and criticizing society, even now when the time is different and the tides are changing rapidly. At first, Shaw seems to be speaking dead words flippantly. But when one closes his eyes and reconsiders, he will find immediately that all his roguish laughter and angry words are cardiac stimulants aiming at social disease."

Kay Li : Yu went on to compare Shaw with Galsworthy, Galsworthy was regarded as a 'detail recorder of British upper class society'. The writer was respected in China because of his social criticism. The writer was respected in China because of his social criticism. Shaw was appreciated for humor and social criticism. Shaw also was associated with socialism. His visit to the U.S.S.R. and his meeting with Stalin were mentioned, quoting Shaw's words, "I studies Marx much earlier than Lenin". Notice from the editor : "The world-famous Irish humourist-satirist Mr Bernard Shaw will visit our country in the middle of next week. This section [of Shen bao] intends to have a 'special issue on Bernard Shaw' on the day when Shaw arrives at Shanghai. We welcome any contributions on the criticism, the life and works of Shaw. Please limit your article to 600 words."

Febr. 10th
Xuan. Xiao Bona fang wen Zhongguo. In : Shen bao ; 10 Febr. (1933). [Bernard Shaw's visit to China]. 萧伯纳访问中国
Er schreibt : "The British literary veteran Bernard Shaw will arrive at Shanghai shortly in his world tour. The Chinese literary field will not forget the war introduction of Shaw ten years ago in the May fourth movement. When Ibsen was mentioned, Shaw would be thought of. One would think about the problem raised in Mrs. Warren's profession – the controversies caused by capitalism, and the warm attention youths paid to this in the May fourth. Old Mr Shaw's works are anti-capitalistic. His style is humourous and satiric. Old Mr Shaw exposes the spokesman of imperialism's flattering whitewashing of modern warfare. Galsworthy's works superficially appear to show the controversy and rottenness of modern capitalist society, but basically he affirms and speaks for the present system.
Those advancing toward brightness include Shaw in England. He indicts the atrocities of imperialism. At this time when there are dangerous fast-changing situations in the Pacific, when the imperialist powers are tightening preparations for a world war to divide China and to attack the U.S.S.R, we welcome Shaw's visit to China, and hope that he can take part in the investigating party organized by the International League against Imperialism, which will soon also come to China."

Hong Kong

Febr. 11th

Shaw arrived in Hong Kong from Bombay, via Ceylon and Singapore on the Empress of Britain 11 Febr. (1933).

Hong Kong Telegraph ; 11 Febr. (1933).
Shaw arrives in Hong Kong. The visit got off to a good start with Shaw's refusing to speak to the Rotarians : he reasoned it to reporters who interviewed him on board the Empress of Britain : "I remember the beginning of Rotary. It was a movement to induce captains of industry to take their business more scientifically and to raise business men to the professional rank. Rotary Clubs are merely luncheon clubs, which as a general rule know as much about the aims and objects of Rotary as a luncheon of Church of England members knows about the 39 Articles."

Febr. 13th
South China Morning Post ; 13 Febr. (1933).
"On Saturday there were only six reporters present when G.B.S. strolled in. We watched him anxiously, but our fears were groundless. G.B.S. was at peace with the world. 'Hello, only six of you ? Where's the rest ?' were his first remarks. Someone explained that all the Hong Kong newspapers were represented.
In the afternoon a party on a ramble organized by the Sailors' and Soldiers' Home, in Wanchai, Having visited several old landmarks of the Colony in the Pokfulam neighbourhood, had the pleasure of seeing one of the worlds's landmarks, Mr Shaw, who was returning from a drive round the island under the guidance of Professor R.K. Simpson of Hong Kong University.
Shaw about the Japanese invasion of Manchuria : 'Japan is going to take Manchuria. But hasn't she behaved very correctly over it all ? She pledged herself to the League of Nations that she would not declare war on anyone. Consequently she has not declared war on China, but has contented herself with fighting – all so legitimately. What does China expect the League to do ? An economic boycott ? But the League has funked the issues. And now it is gradually ceasing to exist. Japan has smashed the League, or, let me put it this way, Japan has called the League's bluff'.
[The great] Powers want to come to some arrangement by which they can fight more cheaply. They hold meetings and say to each other 'if you disarm, we'll disarm', and the result is deadlock.
The greatest satisfaction to us is that in the next war we will be knocked by a ten inch shell and not a sixteen inch shell."

Febr. 13th
Shaw accompanied by Professor R.K. Simpson, took 'tiffin' at the residence Idlewild of Sir Robert Ho Tung [Sir Robert Hotung Bosman (1862-1956) : Businessman, manager of the Chinese Department of Jardine, Matheson and Co.]. [Siehe Shaw 1946].

Febr. 14th
South China Morning Post ; 14 Febr. (1933).
Brilliant address
George Bernard Shaw
Breaks resolution
Advises University students
To be communists
Education denounced.
In the afternoon the Great Hall of the University of Hong Kong was packed with students and distinguished guests.
When Mr Shaw was accompanied to the dais by the Vice-Chancellor, Sir William Hornell, there was a terrific out-burst of cheering. Sir William introduced Mr Shaw collectively and then individually to the visitors.
The pair stopped before the Press representatives. "I have met them already", commented G.B.S.
'And this is Mr M.F. Key, formerly of the Press', said Wir William.
"Yes", said Mr Key, "But now secretary of the Rotary Club. I want to tell you, Mr Shaw, that you were quite right in all you said about the Rotary Club the other day".
Sir William interjected, "But Mr Shaw said that the Hong Kong Rotary Club was probably an exception".
"I had to be polite" was the dry comment of the famous man.
Shaw set about his audience with enthusiasm :
"I am here as a guest of the University. I have a very strong opinion that every University on the face of the earth should be levelled to the ground and its foundations sowed with salt. There are really two dangerous classes in the world – the half-educated, who half-destroyed the world, and the wholly-educated who have very nearly completely destroyed the world. When I was young – an incalculable number of years ago – nobody knew anything about the old, old civilizations. We know a little about Greece and Rome and we knew that Rome somehow or other collapsed and was very ably replaced by ourselves. But we had no idea how many civilizations exactly like our own had existed. They almost all collapsed through education.
"What are you going to do ?" "I don't know. You may say 'Shall I leave the University and go on the streets ?' Well, I don't know. There is something to be got from the University. You get a certain training in communal life which is very advantageous. If I had a son I should send him to the University and say 'Be careful not to let them put an artificial mind into you. As regards the books they want you to read, don't read them." (Applause).
Professor Brown : "They never do". (Laughter).
Shaw : "Well, that's very encouraging".
This was the spirit of the assembly : laughter, applause, cheerful backtalk.
"We like it" one student shouted out when Shaw asked if he should continue.
"If your read, read real books and steep yourself in revolutionary books. Go up to your neck in Communism, because if you are not a red revolutionist at 20, you have some chance of being up-to-date at 40. So I can only say, go ahead in the direction I have indicated." (Prolonged applause).
"The thing you have to remember is valuation. Remember all you have to forget or you will go mad. Keep and stick to your valuation. You may be wrong but you must make up your mind. Being human and fallible you may come to wrong opinions. But it is still more disastrous not to have opinions at all. I hope you are properly edified and will not regret having made me break my promise not to make a speech while in Hong Kong."

Florence Chien : Shaw's speech to the students at Hong Kong University created a major stir which widened the gulf of antagonism between the Nationalist and the Communist factions, and also marked Shaw's stance against the reigning Nationalists. Since Shaw sided with the Communists, he was automatically regarded as the enemy of the reigning Nationalists. His safety in 133 was guaranteed by his nationality, but his activity was not to be publicized.

The Hong Kong Telegraphy ; 14 Febr. (1933).
Letter from Robert McWhirter.
"Sir - Allow me to congratulate the Vice-Chancellor of the Hong Kong University on his enterprise in securing the attendance of Mr Shaw at a tea-party held there yesterday afternoon. Sir William Hornell's [Vice-Chancellor] distinguished supporters are also to be thanked, many of whom will no doubt treasure the newspaper account of the affair.
Mr Shaw's student listeners had the treat of their lives. They, really, quite understood that the famous author was but talking with his tongue in his cheek. The Chinese have such a keen sense of Humour !
Seriously, I trust that all concerned in yesterday's farce now see their mistake. I can appreciate the misgivings of those responsible if a lesser light of theirs had raved half so rantingly in a lecture-room of our University.
We can also realise how difficult it will be for those in authority to deal with any mild outbreak of 'Bolshevism' which may occur at our principal seat of learning.
After the wise counsel given yesterday, I can, in addition, appreciate the confusion in the minds of students when next they hear that one [of] their countrymen has been gaoled for preaching 'revolution' in our streets."

Febr. 15th
The Empress of Britain pulled out of Hong Kong harbour.

Febr. 16th
South China Moring Post ; 16 Febr. (1933).
"Reactions to Mr G.B. Shaw's visit are mixed. His ardent admirers stand staunchly by him and dilate upon the brilliance of his utterances, while the mischievous chuckle to see the pained expressions on the faces of the eminently proper. Outrageous ! The average person, perhaps, has been surfeited and, not a few disappointed, having in their dullness expected something far better from the oracle. In fairness, it must be said, however, that no criticism attaches to Mr Shaw. He was on holiday and with no desire to speak or to be interviewed.
Having been pestered, he responded naturally and with Shavian malice aforethought, setting himself out to be deliberately outrageous, by way of reprisal and as though to teach us that stringing plants and insects are best left alone.
Exception has been taken to his remarks to the University students, and it is being said that no explaining may remove all of the harm that may have done thereby. Nevertheless the position remains that upon his hosts falls the responsibility of justifying Mr Shaw's irresponsibility. Himself would offer no apology : and his disciples deny that his satires can have been misunderstood, or, in any event, that any harm can come from candour. The discussion thus ends in impasse or else is ruled out as unnecessary and the episode to be forgotten.
There is only one Shaw, and that he should grace Hong Kong but once in his lifetime is an historical event, to be appreciated in all humility. In comparison, what matters ? If in fact the Shavianism has been overdone, having acquitted Shaw of blame it can only be pleaded that seldom does a fish worth baiting come this way. As we are, Shaw has come and Shaw has gone ; and so back into our narrow beds creep and let no more be said."
"Actually Shaw himself is an example of the tragedy of a mind undisciplined by a University education. Nobody can deny his genius ; everybody is made to laugh by his humour ; but on reflection anyone might also weep that such a genius has done so little, if any, constructive work. Few people in Britain take Shaw's social or political views seriously and it is unfortunate that any of the British in Hong Kong should have done so."
P.H. Larkin : "You have absolutely spoilt him ! You have credited him with a power greater than the Creator ! You have placed him on a pedestal so high that he fears to fall, lest his fall would be disastrous ;hence his attempt to justify his omnipotence by clinging fast to the top, daring not to look down on the ground from his dizzy height ! And what do we, mere men in the street, get from this man-made god ? Trash ! Absolutely undiluted trash ! Shaw is first and last an egoist, and the way he babbled about the affairs of the world as if he knew all, excaping nothing, plainly shows this self-patting of him. For the love of Mike give us less of Shaw and more of the saner men !"

The North China Herold ; 16 Febr. (1933).
Mr Shaw greeted the correspondents with the words : "You do not look very much like Chinese" and expressed surprise at the entire lack of Chinese pressmen. "Where are the Chinese", he asked with his usual genial impertinence. "Are they so primitive that they have not heard of me ?"

South China Morning Post ; 18 Febr. (1933).
"In the welter of correspondence on G.B.S's famous lecture, it appears to me that the most of your correspondents, Shavian and anti-Shavian alike, ignore the main point. I mean the effect that such an open support of Communism will have on the lower social strata of our Colony. I know nothing of the student body of the University, but am willing to take it as read, that they will be able to place such advice in its proper perspective. I take it that representatives of the Chinese press were in attendance at the lecture, and I would like to know how it appeared in their papers, and what the average Chinese would make of it."

Shanghai

The Empress of Britain left Hong Kong on 15 Febr. (1933) and arrived in Shanghai 17 Febr. (1933).

Febr. 17th
Song Qingling met the Empress of Britian at 6.45 in the morning and had breakfast with the Shaws.
[Einige Leute behaupten, dass er im Hotel Cathay (heute Peace Hotel) Shanghai abgestiegen ist. Er wird auch auf der Gäste-Liste des Astor House Hotel aufgeführt. Er war aber nie in einem Hotel, er war 10 Std. tagsüber in Shanghai und ging abends auf sein Schiff Empress of Britain zurück.]

Among the some four hundred people present were Hong Shen, representing the China Film and Culture Society, Ying Yunwei, representing the Xi ju xie she (Joint Drama Society), The Shanghai Students Drama Society and others. The students made a speech welcoming Shaw to China. The banners held by the people at the pier showed their attempt to construct Shaw as a sympathizer of Chinese nationalism. Among the slogans chanted were :
"Welcome, Bernard Shaw the revolutionary artist. Welcome, Bernard Shaw the dramatist. Welcome, Bernard Shaw the god of peace. Welcome, Bernard Shaw who is sympathetic to the integrity of the Chinese territory. Welcome, Bernard Shaw who is sympathetic to the independence and liberation of China. Welcome, Shaw the vanguard of anti-imperialism. Welcome, Shaw who wants to overthrow imperialism. Welcome, Shaw who wants to oppose the Japanese invasion of North East China. Welcome, Shaw who is against the Second world war. Welcome, Shaw who does not want to be left behind."

The crowd waited. Four hours later, the marine police informed the exhausted fans that Shaw had landed elsewhere.

12.00
Song Qingling gave a dinner at her home Rue Molière 29 in honour of George Bernard Shaw, with Agnes Smedley, Lu Xun, Cai Yuanpei, Harold Isaacs, Lin Yutang, Yang Xinfo [(1893-1933) ermordet Shanghai) : Wissenschaftler, Aktivist, Dozent Southeast University].
On the afternoon Shaw met a dozen writers and news reporters representing different papers, including Japanese, English, Russian, and Chinese.

Xiao Bona guo Hu tan hua ji. In : Lun yu ; vol. 1, no 13 (1933). [Bernard Shaw's conversations during his stopover in Shanghai].
Before he left Hong Kong, Shaw sent a cable to Song Qingling, informing her that he would pay her a visit. Song Qingling considering Shaw's age and the fact that this was his first trip to China, went all the way to meet him, accompanied by two friends. Shaw said he would have had no intention of leaving the ship when it arrived in Shanghai were it not for his wish to meet Madame Song. The trip from ship to Shanghai and back again lasted for four hours - time enough for "Shaw, the outspoken conversationalist, to comment on a wide range of topics wittily." The major concern was politics, specifically the example of Soviet Russia. In the rapporteurs words, "during the four hour conversation, Shaw never stopped discussing this." Alas, there was, moreover, the usual discourse on Stalin : What is freedom ? The British give the Indians a free trial by jury, in which the judge would go back on the verdict if the jury decided that the accused should be released, and send him to jail. This is the so-called free system of the British. And what about the freedom of speech in various countries ? Only a privileged few have the right to say a few words. The freedom of speech or democracy that is truly valuable should give to peasants and workers the freedom to cry aloud when they are hurt, and improve their conditions subsequently. This is the freedom that the Russians have. I paid close attention to Stalin. When we were talking to him, everyone thought that we had only talked for twenty-five minutes, but actually we had been talking for two and a half hours already. He seemed to pay little attention to theory. He is a practical man. He finds solutions to problems by experiments, and calls all successful projects Marxism. . . . He values the objective and not the theory. He may be unscrupulous in trying to reach his goal, but in the end, he manages to reach it. Shaw : The Peace Conference cannot stop the war, and neither can we end a war by starting another war. Only when all nations are determined to have peace can the war be ended. The people themselves do not want war. After the European War, all the nations that took part discovered that they were worse-off than before. Everyone was destroyed. Facts like these can make people weary of war. The League of Nations has a tool called the International Committee of Intellectual Cooperation. If all the Intellectuals in the world can make use of this tool, it may be more effective than forming another conference. Shaw : The Peace Conference cannot stop the war, and neither can we end a war by starting another war. Only when all nations are determined to have peace can the war be ended. The people themselves do not want war. After the European War, all the nations that took part discovered that they were worse-off than before. Everyone was destroyed. Facts like these can make people weary of war. The League of Nations has a tool called the International Committee of Intellectual Cooperation. If all the Intellectuals in the world can make use of this tool, it may be more effective than forming another conference. Madame Sun : . . . The only effective way to eliminate wars is to eliminate the system which gives rise to wars - the capitalist system. Shaw: But aren't we all capitalists? I admit that I am - to a certain degree. Aren't you ? Madame Sun: No. Not entirely.

The subjects discussed at the luncheon party included vegetarianism, the Chinese family system, the war, drama taught in the British universities, and Chinese tea.
Lin, Yutang. Tan Xiao Bona. In : Lun yu. [On Shaw]. 谈萧伯纳
Lin, Yutang recalls Shaw’s comments on war : "The English never quarreled with the Germans. When they met on the battlefield, they only took their knives and if one did not kill the other, the other would kill him. But the English hated the French, and the French hated the Americans. By the time the European war was over, the bad feeling among the Allies was high.
We often talked about the courage of the warriors. But since the European war, bravery was a historical fact. In the war nobody tells about his courage, but just about his fear. Now the modern war was cruelest. I once heard a pro-war person talking about the good the war can do to the human character, for it encourages sacrifice, bravery, and fearlessness. I told them how to eliminate war. I said that we should abolish the military review that took place in autumn, for this did not kill, and will not raise one's character. Instead, those who are pro-war should go to the fields and kill one another. This will satisfy their barbaric cannibalism."

Shaw meets Mei Lanfang
Mei Shaowu [Son of Mei Lanfang] : Shaw asked my father "Why is Beijing opera so loud with all those gongs and drums ?". My father answered, "Chinese opera began as entertainment for the masses. They had to use gongs and drums to attract the audience".
The North China Herald reports : [Shaw] : "Will you please tell me how a Chinese actor can do anything in the midst of such infernal uproar as one hears on your stage ? In our theatre, they put a man out if he sneezes. But you have gongs and symbals [sic] and the competition of half the audience and innumerable vendors. Don't you object ?" Mei Lanfang : "[The noisy drums and gongs were necessary] because the opera was a folk art first performed in the open air and the drums have been kept to this day".

14.00
George Bernard Shaw : "Speech at the Pen Club Shanghai". In : Xiao Bona zai Shanghai. [Shaw in Shanghai]. In : Shen bao ; 28 Febr. (1933). 萧伯纳在上海
"China and the East don't have much culture worth speaking of. Culture, by scientific definition, is all those human activities which enable human beings to control nature. In China, except for the little culture that can still be found in the farms, there isn't any culture to speak of. China is now importing from Western Europe, a lot of so-called 'cultural ideas' which have long ceased to be effective and have in fact had harmful effects on the people. What good will it do to bring this sort of Western culture to China ?
When I was in Hong Kong, I urged the students to start revolutions. But please don't misunderstand ; I didn't ask them to go to the streets and fight the police. When the police come to suppress revolutionaries with their clubs, the safest way is to run. You should run as fast as you can to your head won't bleed. And you don't have to get into a confrontation with the police, for policemen are like the gun in a robber's hand ; of course you don't want to fight against the gun when you're robbed, nevertheless those with guns in their hands should still be beaten down. But this takes time and you cannot make it by sheer force.
The international conditions of the Soviet Union both spiritually and materially are improving vastly these days. And this systematic improvement is not only to the best interests of the Russians alone. It serves as an example for all the other countries which should learn from her strong points and start imitating her. Socialism will surely be implemented in every country sooner or later. The means and process of the revolution may appear in different forms in each country, but as all roads lead to Rome so all countries will be on the same path and the same level in the end."
At the Pen Club Shaw was presented with a box of miniature clay masks, like those used by the Bejing opera, and an embroidered ancient Chinese robe.

15.00
Press Conference at Song Qingling's house.
Shen bao reports ; 18 Febr. (1933) :
"Shaw criticizes Chinese culture. He said that China and the East did not have culture. This is because, scientifically speaking, culture refers to all human behavior that can increase human happiness, especially the control of nature. In China, apart from finding a little culture in the fields on the countryside, there is no culture. Nowadays, China adopts from the West a lot of 'culture' that is no longer effective, and is harming the people instead. For example, the parliament started when the English did not want a government, and made use of it to upset monarchical rule and church authority. Yet eventually it could not overturn the power of the capitalists, since it was fundamentally controlled by the capitalists. What good can this kind of so-called Western culture do for China ?"

Bai, He. Xiao Bona fang wen Zhongguo. In : Shen bao ; 17 Febr. (1933). [Bernard Shaw's visit to China]. 萧伯纳访问中国
Er schreibt : "I remember old Mr Shaw having a very good impression after visiting the USSR. After his visit to India, he advocated that England should give up her sovereignty over India. This time, when he visits China, I think he will not have impressions of 'pigtails' and 'foot binding'. What does he think about Hong Kong under British rule ?"

Miao, Shen. You mo yu feng ci. In : Shen bao ; 17 Febr. (1933). [Humorous and satiric writing] 幽默与讽刺
Er schreibt : "In an oppressive serious situation, one cannot frankly scold the pains one is suffering, nor can one be warned kindly. Consequently, one has endless grievances and worries. At this time, if we have the power to make humorous and satiric discussion, one can attack by innuendo, tactfully using humorous words to present reality satirically. This is the so-called 'the art of scolding people'."
"At the time of serious national calamity, the people are numb, the government officials are at ease. We can think about the tragedy of a dying nation. Of course we hope that, on one hand, we can have loud, deafening, fervent words of warning. On the other hand, we need many humorous and satiric words in order to wake up and strengthen our hearts. Therefore I hope that all kinds of publications can bear this mission, and publish more literary works on the difficulties of people's livelihoods. Works making the youth's body and mind drunk should be published less. At this time when we are standing together through thick and thin, we should save and arouse in many ways."

Juan, Yun. Xiao xian sheng yu Xiao tai tai. In : Shen bao ; 17 Febr. (1933). [Mr and Mrs Shaw]. 萧先生与萧太太
Er schreibt : "Since the Indian poet Tagore's visit to China, the visit of the world-famous personages making the Easterners drunk with respect was not realized until the coming of Bernard Shaw. Shaw became one of the then most famous people in the world."

Yu, Dafu. Jie shao Xiao Bona. In : Shen bao ; 17 Febr. (1933). [Introducing Shaw]. 介绍萧伯纳
Er schreibt : "We hope that Shaw will make use of his humor to go to the countries of the world, and tell them about our government's humor toward Japanese imperialistic invasion, and the League of Nation's humor toward this event."

Zheng, Baiji. [Shaw is welcome to listen to the sounds of the cannons]. In : Shen bao ; 17 Febr. (1933).
Er schreibt : "Bernard Shaw comes to China. This great satirist of the world is coming to China. The large-scale Japanese invasion triggers the world war and is the prelude to the world revolution. If Shaw uses his astute mind and analyses these cannon sounds clearly, just as he analyses the human relationships in his plays, he may give a good report to the masses of the world."

18.00
Shaw returns to the Empress of Britain.

Febr. 18th
The interview of 17th was reported in different papers, each had its own version. Zi lin xi bao, an English paper, reported Shaw's response to a question about the Chinese government : "They [the oppressed people] should rely on themselves. China should do the same. The Chinese people should organize themselves and choose for their ruler their favourite man, not an actor nor a feudal lord". Da lu bao, a conservative, semi-government Chinese paper in English language reported : "Even a good ruler can hardly ever establish a good reputation among the people, because in nine out of ten cases a leader is not a good actor, and he does not know how to please his people". Mei re xing wen, published in Japanese, reported it with even greater variation : "What is your view on the Chinese government ?" Shaw replied "In China, as I know, there are several governments. Which one are you referring to ?" The Shanghai daily, published in Japanese, reported Shaw as attacking both Communism and the United States, an anti-Communist nation, saying : "The anti-Communist movement waged by various countries going against Communism. It is also an oppressive country with no freedom for its people. While in China, Communism seems to have been misunderstood. Those so-called Communists who raid and suppress people are nothing but bandits".
Lu Xun said about the event : "The reporters, who had all gathered at the same place, at the same time, and heard the same words, came up with disparate stories. It seemed that the same English words manifested themselves differently in different ears. In this case, we can see that Shaw is not a satirist, but a reflective mirror".

Fei, Ming. Tan Xiao Bona. In : Shen bao ; 18 Febr. (1933). [On Shaw]. 谈萧伯纳
Er schreibt : "Shaw and Galsworthy are most famous among the world's great writers China is familiar with, whose names are translated into Chinese. This great writer [Shaw] is a satirist with a strong Chines flavour. Apart from accent, costume, and eating habits, his speech and actions do not look like a mechanical European, but like a comical Easterner."

Xuan. Tan Xiao Bona. In : Shen bao ; 18 Febr. (1933). [On Shaw]. 谈萧伯纳
Er schreibt : "Shaw's major works reveal the fallacies of man's traditional beliefs, which reminds one of how Shaw was used as an iconoclast against tradition in 1919 in the May fourth movement."

Yang, Xingzhi. Hallo Shaw. In : Shen bao ; 18 Febr. (1933).
Er schreibt :
Dear Shaw, why do you come to Shanghai?
To visit us slaves of colonialism?
To salute the British flag at the Whampao River?
To listen to the cannons of the Japanese?
To praise our nonresistance philosophy?
But I tell you:
Shanghai is not London, New York or Paris,
Nor is it a red city like Leningrad.
The British, American, Japanese, French flags fly proudly in the sky,
Clearly saying that China is only a colony.
The black smoke of the warships in the Whampao River,
The coolies at the Whampao River are panting rapidly for breath,
The blood and flesh of the weak are supporting the authority of the strong,
Shanghai is this colonial city.
Do you feel that this is a tragedy?
I tell you also:
Your words in Hong Kong are preposterous!
Youths listening to it will pull their tongues,
Old people hearing will say "fart."
Maybe some will even be rude to you,
Don't say anything foolish when you arrive at Shanghai,
This is because we do not know humor,
And you cannot say anything you like,
We warn you to keep your mouth shut here,
Actually there is no need to tell nonsense.
But, when you return,
Bring good tidings!
You only have to say:
China will be saved,
The Whampao River will rise one day,
And wash the darkness and authority of the land!

Febr. 19th
Zhang Menglin. Shuo zhen hua. In : Shen bao ; 19 Febr. (1933). [Telling the truth]. 说真话
Er schreibt : "People can only follow their instincts. When you instinctively feel that this action is not right, you will think of ways to change. If you cover reality with words, you cannot change for the rest of your life. You cannot evolve to a higher creature. Then, creatures higher than you (what old Mr Shaw calls the Superman) will appear, and treat you as you would treat a monkey."

Febr. 20th
[Shaw, George Bernard. Speech at the Beijing Hotel in Beijing]. In : Shen bao ; 20 Febr. (1933).
"I came to Beijing for sightseeing and to visit the world-famous old capital. I do not have any responsibility or mission. The newspaper said that the Sino-Japanese problem is serious, and that Jehol was especially tense. In the future, Beijing and Tientsin may be included in the dangerous zones. I have come to tour China at a time when the situation is serious. This seems to be different from Europeans coming to China under normal conditions. Beijing is a rich and grand old capital. If people of the world cannot forget China, they cannot forget Beijing. The Japanese immigrants are preparing to return to their country, as the catastrophe is coming. The rich Chinese also moving south, as if Beijing could be abandoned. The property of the rich cannot be damaged. I do not understand : is the price of the property of the rich higher than Beijing ? The antiques of the Forbidden City are being moved south, and this move adds another new leaf in the cultural history of Beijing, as if the antique were more important than the lives of a few million of Beijing's citizens. If we tour Italy, the antiques from the ancient Roman Empire are still there. These were not moved in spite of the wars in Italy. The Chinese love peace, and the Japanese also claim to be peace-loving. But the peace of the Japanese is the peace that follows war. The peace of the Chinese is the peace of peace. The Japanese told the League of Nations that they have the duty to protect Manchukuo, and claim that they invade Jehol to protect Manchukuo. They invade in the name of protection and claim that their actions are undertaken in self-defense. China has adopted the policy of nonresistance. I feel that the policy of nonresistance no longer applies. It changes to resistance, and China thinks that resistance no longer applies. It changes to resistance, and China thinks that resistance means self-defense. I do not know when the self-defense of China and Japan will end. Some Chinese youths are interested in communism. Although the government has repeated injunctions, the students are still studying. Communism is a political problem. At first it was an economic problem. Communism is still a problem deserving study. The absolute communism first adopted by the USSR has failed, so that the country turned to th4e New Economic Policy and implemented the five-year plans. Now this plan is successful. It is not easy to spread communism in China, and China does not have big capitalists. The labor-capital relations problem is not studied academically in China. Therefore I cannot say whether people to learn the Three People's Principles as good students. Therefore whether a discipline is right or not is determined by time. A am touring China because I believe the historic sites to be unique, and to have great value in cultural history."

Beijing

Shaw left Shanghai on 20 Febr. at 7.00 and arrived at Beijing via Chinwangtao at 18.40 on 20 Febr.

Febr. 21th
Press conference by Shaw in the Beijing Hotel, at which he commented on various subjects, from war to cheap labor, from communism to language.
The educational institutions and literary circles in Beijing decided not to give Shaw an official reception. Hu Shi announced diplomatically before Shaw's arrival that "the most respectful form of welcome to a special guest like Shaw is to leave him alone ; let him move about freely, meet whomever he wants to meet and see whatever he wants to see".

The Great Wall.
On her recovery, Shaw insisted that Charlotte Shaw should go with him to see the Great Wall of China. The best way to see it, he decided, would be from an airplane which would reveal the vast expanse of the wall. The plane was one of the early biplanes, their seats were open to the sky. As the plane flew low over the Great Wall, Shaw was horrified to see a fierce battle in progress just below them between the Chinese Army and a horde of armed Japanese. Shaw frenziedly jabbed the shoulder of the pilot in front. "Turn back ! Turn back !" he shouted. "I don't like wars. I don't want to look at this".
Apparently they flew back to Beijing in silence.
George Bernard Shaw to Hesketh Pearson :
"Did you see the Great Wall in China ?"
"I flew over it in an aeroplane."
"Interesting ?"
"As interesting as a wall can be."

Febr. 25th
Yu, Dafu. [Literary and military lessons]. In : Shen bao ; 25 Febr. (1933).
The literary lesson is from the glib Old Mr. Bernard Shaw. He told reporters in Beijing : "The Chinese have a strange character. They are inconceivably polite and friendly toward the foreigners. But among themselves they are so impolite and always fighting one another". He also said that the Great Wall was like a common low wall.

Leaving China, Shaw went on to Beppu, Japan, arriving there on Febr. 28 (1933).
19 1933
Brief von George Bernard Shaw an Edward Elgar ; 30 May (1933).
I recommended Peiping where you must go to the Lama temple and discover how the Chinese people produce harmony. Instead of your labourious expedient of composing a lot of different parts to be sung simultaneously, they sing in unison all the time, mostly without changing the note ; but they produce their voices in some magical way that brings out all the harmonies with extraordinary richness, like big bells. I have never had my ears so satisfied. The basses are stupendous. The conductor keeps them to the pitch by tinkling a tiny bell occasionally. They sit in rows round a golden Buddha fifty feet high, whose beneficent majesty and intimate interest in them is beyond description. In art we do everything the wrong way and the Chinese do it the right way.
At Tientsin they had a Chinese band for me. It consisted of a lovely toned gong, a few flageolets (I don't know what to call them) which specialized in pitch without tone, and a magnificent row of straight brass instruments reaching to the ground, with mouthpieces like the one I saw in the Arsenal in Venice many years ago: brass saucers quite flat, with a small hole in the middle. They all played the same note, and played it all the time, like the E flat in the Rheingold prelude; but it was rich in harmonies, like the note of the basses in the temple. At the first pause I demanded that they should play some other notes to display all the possibilities of the instrument. They pleaded that they had never played any other note; their fathers, grandfathers and forbears right back to the Chinese Tubal Cain had played that note and no other note, and that to assert that there was more than one note was to imply that there is more than one god. But the man with the gong rose to the occasion and proved that in China as in Europe the drummer is always the most intelligent person in the band. He snatched one of the trumpets, waved it in the air like a mail coach guard with a post horn, and filled the air with flourishes and fanfares and Nothung motifs. We must make the B.B.C. import a dozen of these trumpets to reinforce our piffling basses.
But the Chinese will reveal to you the whole secret of opera, which is, not to set a libretto to music, but to stimulate actors to act and declaim. When there is a speech to be delivered, the first (and only) fiddler fiddles at the speaker as if he were lifting a horse over the Grand National jumps; an ear splitting gong clangs at him; a maddening castanet clacks at him, and finally the audience joins in and incites the fiddler to redouble his efforts. You at once perceive that this is the true function of the orchestra in the theatre and that the Wagnerian score is only gas and gaiters.
20 1933
Shaw, George Bernard. A message to the Chinese people [ID D27970].
I am flattered by this request for a message to the Chinese people, for it implies that I am a modern Confucius. I, however, cannot see myself in that magnitude.
The Chinese people cannot live on messages, and too many messages are not news for the press, and usually provide the dullest reading. Besides, I am at present trying to find out what message China has for me and for the West. Her history since the year 1911, when it is completed, will be the fullest instruction for students of political science. Then she will have achieved a complete cure for that disease called civilization, either by changing it to her own benefit or rejecting it altogether. In the meantime I can only look on and wonder what is going to happen. It is not for me, belonging as I do to a quarter of the globe which is mismanaging its affairs in a ruinous fashion, to pretend to advise an ancient people desperately striving to set its house in order.
Europe can give no counsel to Asia, except at the risk of the old rebuff 'Physician, heal thyself'. I am afraid I have likewise nothing to say in the present emergency except 'China, heal thyself'.
With China's people united who could resist her ?

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