Claudel, Paul. La politique française en Chine de 1894 à 1898 : d'après le nouveau Livre jaune. In : L'écho de Chine ; 26-27., 29.8.1898. [Attribué à Claudel].
L'Imprimerie Nationale a procédé récemment à la distribution d'un Livre Jaune relatif aux Affaires de Chine. Les 77 dépêches contenues dans ce document se répartissent sur un espace de quatre années, la première portant la date du 24 septembre 1894 et la dernière du 11 juin 1898. C'est un laps de temps déjà long et qui permet de dégager les lignes générales de notre action en Chine, d'en éprouver la valeur et d'en apprécier les résultats. La lecture des 56 pages du Livre Jaune fait voir combien sont peu mérités les reproches de défaut de netteté et de suite que l'on adresse souvent à notre politique extérieure. La diplomatie française, servie à Pékin par une série d'excellents ministres qui ont su réparer les conséquences de notre longue inertie, paraît s'être proposé dès l'abord un objet précis dans un champ d'action nettement limité et à aucun moment ne s'est laissée dévier ou fourvoyer.
Les dépêches du récent Livre Jaune peuvent se diviser en deux séries ; les unes se rapportant à la constitution de notre « Sphère d'influence » en Chine, à un point de vue politique comme à un point de vue commercial ; les autres au protectorat que nous exerçons sur les Missions Catholiques. C'est sur les régions limitrophes de son Empire d'Indo-Chine que la France était le plus naturellement appelée à concentrer son intérêt. Nous avions conquis le Tonkin, il importait tout d'abord d'assurer pour ainsi dire, la fermeture de nos nouvelles possessions et d'achever le dessin de notre frontière. Cette opération languissait depuis de longues années ; elle est aujourd'hui terminée.
« La frontière sino-annamite, dit M. Gérard dans une dépêche en date du 19 juin 1897, est donc aujourd'hui entièrement abornée depuis la mer jusqu'au Mékong. Il n'avait pas fallu moins de neuf ans, de 1885 à 1894, pour achever les travaux d'abornement entre Mon-kay et les limites communes du Kouang-si et du Yun-nan. La section infiniment plus étendue, comprise entre la frontière commune du Kouang-si et du Yun-nan et Je Mékong, a été tout entière abornée en moins de dix-huit mois. Cette différence seule suffit à marquer le changement survenu dans les dispositions de la Chine à l'égard de la France et de l'Annam. Le Gouvernement chinois a témoigné de la sorte, non seulement qu'il acceptait les faits accomplis et consacrés par les traités et conventions de 1885, 1886, 1887 et 1895, mais qu'en délimitant exactement les domaines respectifs de la Chine et de l'Annam, il entendait entretenir avec nos possessions de l’Indo-Chine les rapports les plus étroits de bon voisinage, d'amitié et de commerce. » [Livre Jaune, p. 40, n°51]
II est superflu de rappeler que la nouvelle délimitation a été faite dans le sens le plus favorable pour nous. La Convention du 20 juin 1898 nous permettait d'enclore dans nos possessions du Tonkin l'enclave importante formée par la principauté de Déo van tri et nous laissait tout le territoire à l'Est du Mékong. On se souvient des réclamations justifiées que fit entendre l'Angleterre à cette époque. Mais après avoir complété la clôture de nos propriétés et par là même en avoir assuré la police, il importait que nous prissions nos garanties contre les risques d'un voisinage importun. La constitution de notre banlieue, la création à notre bénéfice d'une situation privilégiée dans les trois provinces limitrophes de nos possessions Tonkinoises, Yunnan, Kouang-Si et Kouangtoung, fut l'œuvre qui, grâce à une série d'actes successifs se complétant l'un par l'autre, est aujourd'hui à peu près entièrement terminée.
Nous passerons tout d'abord en revue les clauses de ces arrangements qui offrent un caractère purement politique.
La Convention de Commerce Complémentire du 20 juin 1895 ouvrait au Commerce français les trois ports de Tong-hing, Hok'eou et Szemao et prévoyait l'établissement dans ces villes d'agents consulaires de notre nation. Le 1er février 1897, à la suite de l'ouverture de la Rivière de l'Ouest obtenue par l'Angleterre, M. Hanotaux donnait l'instruction à M. Gérard de réclamer des compensations en vue de rétablir l'équilibre ainsi troublé à notre détriment. Un télégramme de M. de Montebello en date du 12 février mandait au Département que le « Gouvernement russe avait prescrit au ministre de l'Empereur à Pékin d'appuyer de tout son pouvoir les démarches de son représentant ». L'action énergique de M. Gérard fut couronnée de succès : nous obtînmes entre autres avantages sur lesquels nous aurons à revenir plus loin, la promesse écrite du Tsong li-Yamen que l'île de Haïnan ne serait aliénée ni concédée à aucune autre puissance. Voici le texte de cette pièce importante :
A M. HANOTAUX, Ministre des Affaires étrangères.
Pékin, le 18 mars 1897.
Votre Excellence m'avant invité à réclamer du Tsong-ly-Yamen la réponse du à ma Note du 2 mars, j'ai, le 13, dans une entrevue avec le Prince King et les Ministres, et malgré le refus antérieur de Son Altesse d'aborder de nouveau ce sujet, insisté pour que, selon les instructions très nettes dont j'étais muni, l'incident ne fût clos que quand toutes satisfactions nous auraient été données. Après un court débat, le Prince céda et me promit que cette réponse allait m'être adressée, en m'indiquant sommairement le sens dans lequel elle serait conçue. Le 15 mars, me parvint la réponse annoncée. J'en envoie, sous ce pli, à Votre Excellence la traduction française.
A.GÉRARD
Annexe à la dépêche du Ministre de la République à Pékin en date du 18 Mars 1897.
Le TSONG-LY-YAMEN à M. GÉRARD, Ministre de la République française
à Pékin.
Le 13e jour de la 2e lune de la 24e année Kouang-siu (15 mars 1897).
Le 1er jour de la 2e lune de la 23e année Kouang-siu [3 mars 1897], Nous avons reçu la dépêche par laquelle vous nous dites que la France, étant donné les relations étroites d'amitié et de bon voisinage qu'elle entretient avec la Chine, attache un prix particulier à ce que jamais l'île de Haï-nan ne soit aliénée ni concédée par la Chine à aucune autre Puissance étrangère, à titre de cession définitive ou temporaire, ou à titre de station navale ou de dépôt de charbon.
Notre Yamen considère que Kiong-tchéou (l'île de Haï-nan) appartient au territoire de la Chine qui, de règle, y a son droit de souveraineté. Comment pourrait-elle la céder aux nations étrangères ? D'ailleurs, le fait n'existe nullement à présent, qu'elle en ait fait le prêt temporaire aux nations étrangères. Il convient que Nous répondions ainsi officiellement à Votre Excellence. »
[Suivent les signatures du Président et des Membres du Tsong-ly-Yamen]. [Livre Jaune, p. 33, n" 43]
Enfin à la suite de la concession à l’Allemagne de la baie de Kiao-tcheou, de l'occupation par la Russie de Port-Arthur et de Talienwan et des avantages de nature diverse accordés à la Grande-Bretagne, nous eûmes à faire valoir les titres que nous possédions, nous aussi, à des gages positifs de l'amitié de la Chine. Dans les premiers jours d'avril 1898, un échange de lettres fort intéressantes avait lieu entre notre Chargé d'Affaires à Pékin et le Tseng li-Yamen. Les deux clauses les plus importantes de l'accord ainsi constaté avaient pour objet, l'une la prise à bail de la baie de Kouang-tcheou-ouan qui nous fut louée pour une durée de 99 ans, avec la faculté d'y établir une station navale et un dépôt de charbon ; l'autre une garantie d'inaliénabilité analogue à celle déjà consentie par la Chine en ce qui concerne l'île de Hainan, se rapportant aux trois provinces limitrophes du Tonkin, Yunnan, Kouang-Si et Kouang-toung. Nous donnons ci-dessous le texte de l'engagement soucrit par le Tsongli-yâmen :
M. DUBAIL, Chargé d'affaires de la République française à Pékin, au TSONG-LY-YAMEN.
Pékin, le 4 avril 1898.
Dans la pensée d'assurer les rapports de bon voisinage et d'amitié de la Chine et de la France, dans la pensée également de voir maintenir l'intégrité territoriale de l'Empire chinois et en outre par suite de la nécessité de veiller à ce que, dans les provinces( limitrophes du Tonkin, il ne soit apporté aucune modification à l'état de fait et de" droit existant, le Gouvernement de la République attacherait un prix particulier à recueillir du Gouvernement chinois l'assurance qu'il ne cédera à aucune autre Puissance tout ou partie du territoire de ces provinces soit à titre définitif ou provisoire, soit à un titre quelconque.
Je serai reconnaissant à Vos Altesses et à Vos Excellences, en m'accusant réception de cette lettre, de vouloir bien répondre par dépêche officielle au désir du Gouvernement de la République.
G. DUBAIL
[Livre Jaune, p. 49, n° 12]
Annexe no 2 à la dépêche du Chargé d'affaires de la République française à Pékin, en date du 11 avril 1898.
Taduction
Le TSONG-LY-YAMEN à M. DUBAIL, Chargé d'affaires de la République française à Pékin.
Le 20e jour de la 3e lune de la 24e année Kouang-siu (le 10 avril 1898).
Le 14e jour de la 3e lune de la 20e année Kouang-siu (le 4 avril 1898), Nous avons reçu de Votre Excellence la dépêche suivante :
(Voir la pièce à-dessus.)
Notre Yamen considère que les provinces chinoises limitrophes du Tonkin, étant des points importants de la frontière, qui l'intéressent au plus haut degré, devront être toujours administrés par la Chine et rester sous sa souveraineté. Il n'y a aucune raison pour qu'elles soient cédées ou louées à une Puissance. Puisque le Gouvernement français attache un prix particulier à recueillir cette assurance, Nous croyons devoir adresser la présente réponse officielle à Votre Excellence, en La priant d'en prendre connaissance et de la transmettre. »
(Suivent les signatures du Président et des Membres du Tsongli-Yamen.)
La formule employée paraît analogue à celle dont se servirent les ministres chinois en ce qui concerne la garantie d'inaliénabilité de la Vallée du Yangtsze, ainsi qu'il résulte de la pièce suivante :
Pékin, 18 avril 1898.
Le Ministre d'Angleterre m'a dit que, contrairement à certaines allégations, il est depuis plusieurs semaines, en possession d'une lettre du Tsong-ly-Yamen, par laquelle il est déclaré que la Chine ne cédera ni ne louera à aucune Puissance les territoires de la vallée du Yangtse-king. La formule employée est identique à celle qui se trouve dans la lettre qui m'a été écrite au sujet de l'inaliénabilité des provinces limitrophes du Tonkin.
G. TONKIN
[Livre Jaune, p. 51, n° 66]
Nous avons indiqué dans notre article d'hier les garanties que le Gouvernement de la République a su obtenir de la Chine pour la préservation de sa zone d'influence. Ces garanties constituent un privilège d'ordre purement négatif. Il importait de lui donner des applications positives et pratiques. Aussi parallèlement à leur action proprement politique, nos représentants à Pékin ont-ils porté tous leurs efforts à assurer à la France l'usufruit d'un domaine dont nous ne désirions pas voir passer en d'autres mains la nu-propriété.
On sait que la France fut la première à se préoccuper des perspectives qu'ouvrait l'établissement en Chine d'un système de voies ferrées. Malgré les restrictions fâcheuses et l'insuffisance de sa rédaction, l'art. XII du traité du 9 juin 1885 constituait à notre bénéfice un véritable droit moral de préférence : « ...La France construira des Chemins de fer au Tonkin. Quand la Chine, de son côté, aura décidé de construire des Chemins de fer, il est convenu qu'elle aura recours à l'industrie française et que le Gouvernement de la République française donnera toutes facilités pour qu'elle se procure en France le personnel nécessaire... »
En 1895, la France avait rempli sa part de cet engagement réciproque et un chemin de fer avait été construit entre Pha-Lang-Thuong et la frontière chinoise. L'article 5 de la Convention Complémentaire signée le 20 juin 1895 vint préciser la nature des obligations souscrites, huit ans auparavant : « II est convenu que les voies ferrées soit déjà existantes, soit projetées en Annam pourront, après entente commune et dans des conditions à définir, être prolongées sur le territoire chinois. »
Le 9 juin 1896, M. Gérard annonce à M. Hanotaux, qu'après une année de négociations, le Gouvernement chinois vient de remplir ses engagements en accordant à la Compagnie de Fives-Lille le prolongement jusqu'à Langson de la ligne de Longtcheou. (Livre Jaune, p. 21). Les travaux commencèrent aussitôt. Mais chacun savait que le tronçon concédé n'avait que la valeur d'une amorce et qu'il n'acquerrait d'importance véritable que si la ligne pouvait être poussée jusqu'aux grands marchés de la haute rivière de l'Ouest, Nanning et Pesé. Par l'arrangement du 12 juin 1897, nous obtînmes toutes les facilités désirables : « II est entendu que, conformément à l'article V de la Convention commerciale complémentaire du 20 juin 1895, ainsi qu'au contrat intervenu le 5 juin 1896 entre la Compagnie de Fives-Lille et l'Administration officielle du chemin de fer de Dong-dang à Long-tcheou, et aux dépêches échangées les 2 et 25 juin de la même année entre la Légation de la République et le Tsong-ly-Yamen, si la Compagnie de Fives-Lille a convenablement réussi, et dès que la ligne de Dong-dang à Long-tcheou sera achevée, on ne manquera pas de s'adresser à elle pour les prolongements de ladite ligne dans la direction de Nan-ning et de Pe-se. » [Livre Jaune, p. 38)
Nous nous étions assuré une voie de pénétration dans le Kouang-si ; il importait davantage encore que les mêmes facilités nous fussent attribuées en ce qui concerne le Yunnan. L'arrangement du 12 juin stipulait déjà dans son troisième paragraphe que « la Chine entreprendra des travaux pour l'amélioration de la navigabilité du haut Fleuve Rouge et qu'en vue des intérêts du commerce, elle aplanira et amendera la route de Ho-keou à Man-hao et Mong-tse jusqu'à la capitale provinciale. Il est entendu, en outre, que faculté sera donnée d'établir une voie de communication ferrée entre la frontière de l'Annam et la capitale provinciale, soit par la région de la rivière de Pe-se, soit par la région du haut Fleuve Rouge, les études et la mise à exécution par la Chine devant avoir lieu graduellement ». (Livre Jaune, p. 38) Le 9 avril 1889, nous obtenions plus et mieux. Dans une dépêche adressée à M. Dubail, le Tsong li-Yamen déclare que « le Gouvernement chinois accorde au Gouvernement français ou à la compagnie française que celui-ci désignera, le droit de construire un chemin de fer allant de la frontière du Tonkin à Yunnan-fou, le Gouvernement chinois n'ayant d'autre charge que de fournir le terrain pour la voie et ses dépendances. Le tracé de cette ligne est étudié en ce moment et sera ultérieurement fixé d'accord avec les deux Gouvernements. Un règlement sera fait d'accord ». (Livre Jaune, p. 50)
Enfin, et tout récemment, nous complétions dans le Kouangtoung, le plan du réseau dont le tracé était déjà indiqué pour le Kouang-si et le Yunnan. Par une dépêche en date du 28 mai 1898, M. Pichon annonçait à M. Hanotaux que « le Gouvernement chinois consentait à nos demandes pour le Chemin de fer de Pakhoi au Sikiang. Il est entendu que seule une Compagnie française ou franco-chinoise pourra construire tous les chemins de fer ayant Pakhoi pour point de départ ». Enfin notre position économique dans les trois provinces limitrophes du Tonkin était consolidée par le paragraphe 2 de l'arrangement du 12 juin 1897 qui stipulait que « il est entendu que, conformément à l'article V de la Convention commerciale complémentaire du 20 juin 1895, dans les trois provinces limitrophes du Sud, Kouang-tong, Kouang-si et Yun-nan, le Gouvernement chinois fera appel, pour les mines à exploiter, à l'aide d'ingénieurs et industriels français ». (Livre Jaune, p. 50)
II nous reste à examiner les conditions dans lesquelles, au cours des quatre dernières années, la France a rempli son rôle de protectrice des Missions Catholiques en Chine.
Ce protectorat est la partie la plus grande des attributions de notre représentant à Pékin ; c'en est peut-être aussi la plus importante comme elle est la plus honorable. Sur toute l'étendue d'un territoire plus grand que celui de l'Europe, quinze cent mille catholiques tournent leurs yeux vers le Ministre de France pour le libre exercice de leurs croyances et la sauvegarde de leurs propriétés et de leurs vies. A chaque instant, aux points les plus divers des trente-sept Vicariats sur lesquels l'Eglise répartit ses travaux apostoliques, ce sont des troubles à réprimer ou à prévenir, de vieilles injustices à réparer, des enquêtes à mener, des compensations à estimer, des droits à faire reconnaître, et partout des procédures laborieuses à poursuivre, à travers les détours et les embûches ménagés par la mauvaise foi et la mauvaise volonté des Autorités Chinoises. De ce chef est dévolu à nos Ministres et aux Agents placés sous leurs ordres, un rôle multiple et chargé qui exige d'eux une vigilance sans relâche, une patience à toute épreuve, et aussi cette espèce d'énergie, la plus précieuse et la plus rare, qui s'appelle la persévérance. On ne saurait donc s'étonner que quelques-uns de nos représentants aient parfois défailli sous le fardeau. Mais on ne doit aussi que plus d'éloges, à ceux qui ont exercé leur action avec tant de discernement et de fermeté, que, depuis quatre ans, on chercherait vainement l'occasion où leur intervention ait été inefficace.
Le plus important succès remporté sur le terrain du protectorat religieux par M. Gérard, et qui est pour nos missions d'une conséquence infinie est la mise en vigueur de la Convention Berthemy, qui permet aux Missionnaires Catholiques d'acquérir des immeubles sans avoir obtenu l'autorisation préalable des mandarins.
«J'ai reçu, dit M. Gérard, dans une lettre adressée à M. Hanotaux et datée du 30 avril 1896, (Livre Jaune, p. 6, n" 9), la dépêche par laquelle Votre Excellence a bien voulu répondre à la suggestion que je lui a avais soumise concernant l'opportunité de donner à la Convention conclue le 20 février 1865 entre M. Berthemy et le Tsong-ly-Yamen, une consécration et une autorité nouvelles. Cette Convention, qui concerne l'acquisition à titre collectif, par les missions, de terrains et de maisons dans l'intérieur du pays, se recommandait à notre attention, d'abord, parce que la plupart des affaires récentes sont des contestations en matière d'immeubles, ensuite parce que ladite convention semble n'avoir été portée à la connaissance des Vice-Rois qu'avec des additions et commentaires qui en dénaturent le sens.
Un règlement adressé en 1863 aux Vice-Rois par le surintendant du commera des ports du Nord a, en effet ajouté à cette Convention une clause aux termes de laquelle tout Chinois doit, avant de vendre aucune propriété aux missionnaires demander aux autorités locales une autorisation préalable, qui, en fait, es d'ordinaire refusée. La Légation a souvent protesté contre ce règlement ; le Tsong-ly-Yamen a admis le bien-fondé de ses réclamations, notamment dans le: lettres du 5 février 1882 et du 31 août 1888, dont j'ai donné lecture aux Ministres Et cependant la Convention, dans la plupart des cas, n'est pas observée, ou plutô les autorités locales continuent à y adjoindre l'obligation de l'autorisation préalable qui en est comme l'abrogation.
J'ai eu la satisfaction d'annoncer il y a quelque temps à Votre Excellence qui mes efforts avaient abouti, et qu'après une série de pourparlers et un échange de dépêches qui s'étendent du 24 juillet au 3 décembre, j'avais réussi à obtenir de Tsong-ly-Yamen le rétablissement intégral et l'envoi aux autorités provinciales di l'Empire du texte authentique réglant le droit d'achat, par les missions catholiques de terrains et de maisons dans l'intérieur de la Chine. »
Nous donnons ci-dessous ce texte déjà publié, mais dont 1; connaissance ne saurait être trop répandue. (Livre Jaune, p. 7. Annexe à L dépêche du ministre de la République à Pékin en date du 30 avril 1895.)
« A l'avenir, si des missionnaires français vont acheter des terrains et de maisons dans l'intérieur du pays, le vendeur (tel ou tel, son nom) devra spécifiei dans la rédaction de l'acte de vente, que sa propriété a été vendue pour faire parti des biens collectifs de la mission catholique de la localité. Il sera inutile d'y inscrir les noms du missionnaire ou des chrétiens. La mission catholique, après conclusioi de l'acte, acquittera la taxe d'enregistrement fixée par la loi chinoise pour tous le actes de vente, et au même taux. Le vendeur n'aura ni à aviser les autorités locale de son intervention de vendre ni à demander au préalable leur autorisation. »
il convient de remarquer que le bénéfice de l'acte précité est réserv aux seules missions catholiques ; la rédaction de cette pièce ne laisse à c sujet aucun doute.
Quelque temps après, les émeutes du Szechuen virent [sic] fournir notre diplomatie l'occasion d'un nouveau succès. Par une mesure jusque-L inouïe, le Vice-Roi du Szechuen fut dégradé et dut lui-même payer sur le ressources qu'il avait accumulées par quatre années d'exactions le indemnités dues aux missions dont il avait organisé le pillage.
Pendant les années qui suivent, il y eut une sorte de liquidatioi générale des affaires religieuses qui depuis de longues années restaient san solution ; nous citerons les affaires de Koueïtcheou qui attendaient leu règlement depuis 1883 ; celles du Thibet où les missionnaires puren rentrer après vingt années d'exil ; enfin celles du Kiang-si ; nous voyon que M. de Bezaure vient tout récemment d'obtenir la réintégration de 1 Mission Lazariste dans la capitale de la province, à Nantchang, d'où, depui 1865, et malgré la démarche personnelle de M. de Rochechouart, elle s trouvait expulsée [Livre Jaune, pp. 44, 47 et 56]. Il convient aussi de mentionner la reconstruction de la Cathédrale de Tientsin qui efface le dernier souvenir de l'attentat de 1870. Enfin nous avons obtenu pour le meurtre des P.P. Mazel et Berthollet, au Kouang-si, les satisfactions que nous réclamions.
On peut dire aujourd'hui, avec vérité, que la situation des Missions Catholiques en Chine est meilleure qu'elle ne l'a jamais été à aucun moment. Le Saint-Siège au mois de juillet 1897 en a fait exprimer officiellement sa reconnaissance à notre Légation. Comme le dit M. Dubail dans sa lettre du 12 septembre 1897, « ce témoignage de gratitude est légitime. Je ne crois pas, ajoute-t-il, qu'à aucun moment notre protectorat religieux ait été aussi solidement établi en Chine et ses résultats aussi efficaces ».
En dehors des grandes catégories d'affaires que nous avons déterminées, l'activité de nos ministres, a remporté sur des terrains différents d'autres succcès. C'est ainsi que nous avons obtenu que l'Arsenal de Foutcheou fût confié à une direction française. C'est ainsi que la Chine a pris envers nous l'engagement de placer son service des Postes sous le contrôle d'un de nos compatriotes.
En somme, comme nous le disions au début de ce travail, la lecture du nouveau Livre Jaune laisse une impression des plus favorables. La diplomatie française ne désire pas la dissolution définitive de ce vaste corps sans tête et sans organes qu'est à l'heure actuelle l'Empire chinois. Nous avons été les derniers à entrer dans la voie des acquisitions territoriales. Mais d'autre part, on ne saurait nous reprocher d'avoir d'ores et déjà déterminé la zone où nous jugeons que l'intervention politique et économique d'autres Puissances serait préjudiciable à notre sécurité ou à nos intérêts. C'est l'œuvre que nos ministres ont menée aujourd'hui à bonne fin. Mais leur intérêt ne saurait se limiter à un seul point du vaste Empire. La France est une puissance européenne, et en cette qualité, rien de ce qui est chinois ne saurait lui être indifférent. Il n'est pas de région où depuis quelques années l'action de notre pays se soit exercée d'une manière aussi continue et aussi bienfaisante. De la Mandchourie au Tonkin, du Thibet à la mer Jaune, dans les coins les plus reculés de Ta-tsin, tous savent que ce n'est jamais en vain qu'on s'est adressé à la France pour la défense du droit et de la faiblesse opprimés. Ce sont là des traditions dont nous aurons à cœur de ne pas déchoir, et le passé nous répond de l'avenir.
History : China - Europe : France
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Literature : Occident : France