Chateaubriand, François-René de. Voyages en Amérique et en Italie [ID D22990].
Er schreibt : "Les Arabes voyaient au nord de l'Asie un pays affreux qu'entourait une muraille énorme et le château de Gog et de Magog. Vers l'an 715, les Arabes connurent la Chine où ils envoyèrent par terre des marchands et des ambassadeurs : ils y pénétrèrent aussi par mer, dans le IXe siècle. Wahab et Abuzaid abordèrent à Canton. Dès l'an 850 les Arabes avaient un agent commercial dans la province de ce nom; ils commerçaient avec quelques villes de l'intérieur, et, chose singulière, ils y trouvèrent des communautés chrétiennes. Les Arabes donnaient à la Chine plusieurs noms : le Cathai comprenait les provinces du nord, le Tchin ou le Sin les provinces du midi."
"Le pays des Mille et une Nuits, le royaume de Cachemire, l'empire du Mogol, les mines de diamants de Golconde, les mers qu'enrichissent les perles orientales, cent vingt millions d'hommes que Gengis-Kan avait conquis, ont pour propriétaires et pour maîtres une douzaine de marchands anglais dont on ne sait pas le nom, et qui demeurent à quatre mille lieues de l'Indostan, dans une rue obscure de la cité de Londres. Ces marchands s'embarrassent très peu de cette vieille Chine, voisine de leurs cent vingt millions de vassaux : lord Hastings leur a proposé d'en faire la conquête avec vingt mille hommes. Mais quoi ! le thé baisserait de prix sur les bords de la Tamise !"
"Les tempêtes ? on en rit. Les distances ? elles ont disparu. On a des Itinéraires de poche, des Guides, des Manuels, à l'usage des personnes qui se proposent de faire un voyage d'agrément autour du monde. Ce voyage dure neuf ou dix mois, quelquefois moins; on part l'hiver en sortant de l'Opéra; on touche aux îles Canaries, à Rio-Janeiro, aux Philippines, à la Chine et l'on est revenu chez soi pour l'ouverture de la chasse."
"Et s'il plaisait à la France, à l'Allemagne et à la Russie d'établir une ligne télégraphique jusqu'à la muraille de Chine, nous pourrions écrire à quelque Chinois de nos amis, et recevoir la réponse dans l'espace de neuf ou dix heures."
"Parmi les modernes sectaires, il en est qui, entrevoyant les impossibilités de leurs doctrines, y mêlent pour les faire tolérer les mots de morale et de religion ; ils pensent qu'en attendant mieux, on pourrait nous mener d'abord à l'idéale médiocrité des Américains ; ils ferment les yeux et veulent bien oublier que les Américains sont propriétaires, et propriétaires ardents, ce qui change un peu la question. D'autres plus obligeants encore et qui admettent une sorte d'élégance de civilisation, se contenteraient de nous transformer en Chinois constitutionnels, à peu près athées, vieillards éclairés et libres, assis en robes jaunes pour des siècles dans nos semis de fleurs, passant nos jours dans un confortable acquis à la multitude, ayant tout inventé, tout trouvé, végétant en paix au milieu de nos progrès accomplis, et nous mettant seulement sur un chemin de fer comme un ballot, [comme un ballot dans un avion, dirions-nous] afin d'aller de Canton à la grande muraille deviser d'un marais à dessécher, d'un canal à creuser avec un autre industriel du Céleste Empire. Dans l'une ou l'autre supposition, Américain ou Chinois, je serai heureux d'être parti avant qu'une telle félicité me soit advenue."
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