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Year

1954

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Notes de voyage en Chine. Photos de Henri Cartier-Bresson [ID D24707].
Il y a deux Chine, l'une réservée aux étrangers, la Chine des chinoiseries, des mandarins à l'esprit compliqué et des étudiants à lunettes dangereusement intelligents. L'autre est une Chine secrète et difficile, simple dans ses manifestations artistiques comme dans sa vie. C'est celle du peuple, d'un peuple qui a, même quand il devient ouvrier des villes, l'amour de la terre native et qui reste attaché à sa stabilité éternelle au point qu'il absorbe tout l'étrange, tout l'étranger qui le peut conquérir ou tenter de le séduire. Les Huns, les Mandchous, les Mongols, conquérants successifs sont venues les uns après les autres se fondre dans cette Chine. La Grande Muraille n'a jamais rien arrêté mais la terre chinoise a toujours tout absorbé. Toutes les races, toutes les religions, tous les gouvernements n'ont jamais réussi à avoir une influence quelconque sur cette ruche gigantesque trop patiemment travailleuse pour se préoccuper des frelons parasites qui meurent lentement une fois anesthésiés par elle.
La guerre : invasions, conquêtes, brigandages, révolutions, luttes intestines, est à l'état endémique en Chine, mais elle n'a jamais eu d'influence plus profonde que n'en ont la peste, le choléra ou toute autre constante sanitaire de tels ou tels états asiatiques. En sera-t-il de même cette fois-ci ? Les conquérants de la Chine ont toujours vécu sur la richesse matérielle de leur Empire sans rien changer à la masse humaine. Mais le communisme ne prétend pas être un pouvoir extérieur à la masse. Il est ciment, organisation, agent interne.
Qu'adviendra-t-il de l'expérience communiste en Chine ? Il y a toujours eu un pourrissement des pouvoirs qui s'y sont succédés, pourrissement tel que le peuple chinois a toujours bien accueilli les conquêtes et les changements de pouvoir, car ils représentaient la nécessaire réorganisation, c'est-à-dire une organisation... en attendant le nouveau pourrissement. C'est à l'échelle des siècles que l'on peut supputer ce qu'il en sera d'un pouvoir celui-ci ne deviendra-t-il pas tout simplement und structure sociale commode remplaçant à travers des régimes variés la structure sociale établie par Kong-fou-Tseu ? Ne sera-t-il pas, tout simplement, l'agent catalyseur permettant au corps chinois d'intégrer la civilisation matérialiste de l'Occident ? Peut-être le nouveau pouvoir aboutira-t-il à cette simple imprégnation pour laisser la place à des régimes politiquement différents. Mais peut-on parler de politique à propos de la Chine ?
Dans tous les cas, une chose était observable : la relève du régime précédent par le régime nouveau. Permanence de la Chine, pourrissement du pouvoir qui disparaît, bon accueil réservé au nouveau, respect de la permanence par ce pouvoir, tout cela était discernable et de façon particulière au moment même où les troupes de Tchang-kaï-Tchek battaient en retraite devant celles de Mao-tse-Toung. Cet état d'équilibre instable, rien ne permettait de le saisir comme la photographie. Henri Cartier-Bresson alla voyager en Chine afin d'observer et de noter les événements et se fixa près de la ligne de combat. Ainsi, il put assister aux derniers jours du Kuomingtang, aux premières heures de la conquête communiste. De cette expérience, il ramène des 'images à la sauvette', dont nous pulions quelques-unes aujourd'hui.

Mentioned People (1)

Cartier-Bresson, Henri  (Chanteloup-en-Brie 1908-2004 Monjustin, Provence) : Photograph, Regisseur, Schauspieler, Zeichner, Maler

Subjects

Art : Photography / Travel and Legation Accounts

Documents (1)

# Year Bibliographical Data Type / Abbreviation Linked Data
1 1954 Cartier-Bresson, Henri. Notes de voyage en Chine. Photos de Henri Cartier-Bresson. In : Photo monde, special Christmas issue no 31 (1954). Publication / Cart2
  • Cited by: Asien-Orient-Institut Universität Zürich (AOI, Organisation)